140.000 morts, des centaines de milliers de personnes déplacées, des relations internationales dégradées et un conflit dans l’impasse. A l’aube de son année 4, le conflit syrien voit cependant Damas reprendre la main et le président Al-Assad envisager un nouveau mandat.
On est loin d’un printemps arabe annoncé encore une fois imprudemment et d’un soulèvement populaire.
Voilà une analyse du journal français Le Monde qui a soutenu la rébellion, qui a toujours été très hostile au régime de Damas et qui le reste.
«Sûr de sa force, le régime syrien prépare la réélection de Bachar Al-Assad en juin.
Alors qu’il entre dans sa quatrième année, le conflit syrien n’offre plus aucune perspective de règlement, ni militaire, ni politique, ni diplomatique. Toutes les voies ont été méthodiquement épuisées par les différents protagonistes. Depuis l’attaque chimique de la Ghouta, le 21 août 2013, qui a causé quelque 1.500 morts, la perspective d’une intervention militaire occidentale est définitivement enterrée, Barack Obama ayant renoncé à une telle option.
Ce retournement majeur, qui fait du gouvernement syrien le garant du bon déroulement de l’opération menée par l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC), a vidé de leur sens les pourparlers de «Genève 2» que le médiateur des Nations Unies et de la Ligue arabe, le diplomate algérien Lakhdar Brahimi, a péniblement mis sur pied au prix d’un an d’efforts. Lancées le 22 janvier en Suisse, ces négociations se sont achevées le 15 février, au sortir d’une deuxième session totalement infructueuse, la délégation gouvernementale refusant d’aborder le volet de la transition».
Alors, le point militaire maintenant.
«Pendant ce temps, la Russie, qui parie sur la victoire du régime de Bachar Al-Assad, continue d’envoyer de plus en plus d’armes en Syrie», souligne une source diplomatique. Profitant de l’affaiblissement de la rébellion, rongée par les luttes intestines entre les groupes djihadistes et les autres mouvements dans le nord du pays et handicapée par les dissensions entre le Qatar et l’Arabie Saoudite, ses deux principaux bailleurs de fonds, le régime cherche à reprendre le massif du Qalamoun qui occupe une position stratégique entre Damas et Homs. Il pourrait ensuite tenter d’encercler les rebelles dans Alep, toujours avec l’aide de supplétifs du Hezbollah libanais et de pasdaran (gardiens de la révolution) iraniens, dont le soutien ne faiblit pas.
Sans perspective, ni efforts pour en venir à bout, le drame syrien se résume désormais à des chiffres qui dépassent l’entendement. Au moins 140.000 morts et, avec 2,5 millions de réfugiés (sur 22 millions d’habitants), les Syriens sont en train de devenir la plus importante population de réfugiés du monde, devant les Afghans».
L’approche de Libération, lui aussi sur une ligne anti-Assad depuis le début, n’est pas très différente.
«Trois ans de combats et bombardements ont détruit le pays, plongé dans une crise humanitaire majeure dans laquelle les enfants sont en première ligne.
Le soulèvement en Syrie est né quelques semaines après le renversement des dictateurs tunisiens et égyptiens, par des rassemblements pacifiques, les 15 et 16 mars 2011 pour protester contre l’arrestation de jeunes accusés d’avoir tagué des graffitis anti-régime. Face à l’impitoyable répression, il s’est militarisé au fil des mois jusqu’à devenir une guerre totale.
Samedi 15 mars, des combats acharnés avaient lieu dans la ville de Yabroud, un des principaux bastions des rebelles dans la province de Damas, selon une source militaire. »Les 13 chefs rebelles qui dirigeaient les opérations sont morts », a-t-elle dit.
L’Observatoire syrien des droits de l’Homme avait rapporté plus tôt des »combats acharnés » à l’entrée est de Yabroud »entre rebelles d’une part et Hezbollah libanais et armée d’autre part, accompagnés de bombardement intenses des hélicoptères du régime ». Depuis plusieurs semaines, armée et Hezbollah pilonnaient fréquemment Yabroud, la dernière ville importante tenue par les rebelles dans la région de Qalamoun.
Fort notamment de ses derniers succès sur le terrain, le président Bachar Al-Assad n’est aucunement prêt à lâcher le pouvoir et à se réconcilier avec l’opposition».
Le régime a repris ces derniers mois du terrain, profitant d’une opposition divisée et d’une rébellion gangrénée par des groupes Djihadistes. Mais aucun des protagonistes -ni le régime soutenu par la Russie et l’Iran, ni l’opposition appuyée par Ryad et Doha- ne semblent avoir les moyens de l’emporter militairement, en tout cas rapidement. La guerre va donc continuer avec des risques de régionalisation encore plus forte ou même d’internationalisation.
Personne à Washington et à Paris ne pensait qu’Al-Assad pourrait tenir, que l’Iran s’impliquerait si fortement, que le Hezbollah serait aussi efficace et que les islamistes tenteraient d’éliminer l’opposition démocrate armée, créant une guerre civile dans une guerre civile.
3 ans et en avant pour une nouvelle horrible année pour les Syriens! Car, dès le début, on s’est trompé sur la nature et donc sur la manière de traiter ce conflit.
Patrice Zehr