Le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique (CSEFRS), présidé par Omar Azziman, est sorti de son silence, dans le cadre de la polémique autour d’un avis qu’il a donné en faveur d’une suppression, sous conditions, de la gratuité de l’enseignement.
Dans son plaidoyer, le CSEFRS a fait savoir que l’avis qu’il a donné en faveur de l’instauration de frais supplémentaires dans l’enseignement public se limitera aux catégories sociales les plus aisées, contrairement aux couches sociales défavorisées qui, elles, vont continuer de bénéficier de la gratuité de l’enseignement. Ceci dit, le Conseil a souligné que les informations ayant circulé dernièrement au sujet du financement du système éducatif et de la diversification de ses sources sont «imprécises».
Ce n’est qu’un avis, pas plus
Pour donner plus de précisions au sujet de la gratuité de l’enseignement dans le Royaume, le président du Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique, Omar Azziman, a fait savoir que, pour engager un débat constructif à ce sujet, une réunion des membres dudit Conseil a été convoquée, les 21 et 22 novembre 2016, consacrée à la loi-cadre pour la réforme du système éducatif, suite à la demande du chef de gouvernement. Il s’agissait de s’assurer de la conformité des dispositions de cette loi aux contenus et aux recommandations énoncés dans la Vision stratégique de l’éducation et de la formation 2015-2030. Le président du Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique a en outre rappelé que cette Vision, approuvée à l’unanimité par le Conseil en mai 2015 et par le gouvernement, est basée sur le contenu de la réforme de l’éducation, y compris le financement du système éducatif et la diversification de ses sources de financement. Il a ensuite rappelé que l’avis que donne cette instance revêt un caractère consultatif et n’est en rien obligatoire ou contraignant.
Dépense éducative et développement du pays
Concernant les fonds collectés grâce à la contribution de l’Etat et des familles aisées dans l’enseignement post-obligatoire (lycée et université), le CSEFRS a rappelé que la Charte nationale de l’éducation et de la formation a déjà considéré la dépense éducative comme un investissement public visant la mise à niveau du capital humain et le développement du pays. Il a ajouté que l’Etat doit assurer la majeure partie du financement de l’éducation, tout en veillant à en diversifier les sources pour les cycles secondaire et universitaire, grâce à la contribution de l’Etat, en partenariat avec l’ensemble des parties prenantes et des partenaires, en particulier les collectivités territoriales, les établissements publics et le secteur privé, outre les ressources propres et les revenus perçus par les établissements d’éducation, de formation et de recherche scientifique.
Lorsque pauvreté devient gage de sécurité…
Le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique a réfuté les accusations dont ses membres font l’objet depuis plusieurs jours. En effet, sur les réseaux sociaux -et même les terrasses des cafés-, l’image du CSEFRS véhiculée depuis quelques jours est celle d’une instance qui va porter préjudice de l’école publique marocaine au profit du secteur privé. Pour dissiper tout quiproquo sur ce point, le Conseil de Omar Azziman a assuré que, lors de la tenue de la dernière session du Conseil, plusieurs mesures ont été approuvées en faveur de l’application du principe d’exemption automatique des familles nécessiteuses qui ne devront pas payer de frais liés à l’enseignement post-obligatoire. Parmi les autres recommandations données par le CSEFRS, relatives à la suppression de la gratuité de l’enseignement dans le cycle secondaire et universitaire public, figure l’appel à la réalisation d’une étude détaillée qui servira de base pour la définition des cas d’exemption de frais d’inscription. C’est justement ce point qui risque de poser un vrai problème. En effet, sur la base de quel critère est-il possible de dire, en 2016, que telle personne est pauvre et que telle autre appartient à la classe moyenne ou roule sur l’or?
Pour rappel, cette volonté de disposer d’une base de données des catégories de citoyens, selon leurs revenus et leurs conditions sociales, a été pour beaucoup dans l’incapacité du chef de gouvernement d’aller jusqu’au bout sans son projet. Un projet qui visait la suppression quasi-totale de la Caisse de compensations et la transformation de la subvention accordée à certains produits en virements directs au profit des populations ciblées.
D’aucuns estiment que l’enseignement public a besoin d’une refonte ciblée qui permettra, in fine, la remise sur pied d’un secteur souffrant depuis fort longtemps. Les professionnels de l’enseignement estiment que le gouvernement devrait faire en sorte que le budget alloué à ce secteur soit revu à la hausse, au lieu de cliver une société marocaine fracturée.
Mohcine Lourhzal