Entretien avec Tareq Sijilmassi, président du Directoire du groupe Crédit Agricole
Le commerce agricole est l’une des problématiques centrales, selon Tareq Sijilmassi, président du directoire du Crédit Agricole du Maroc.
Lors du SIAM 2012, le chef de gouvernement avait souligné qu’il fallait accorder une attention particulière aux petits agriculteurs. Pensez-vous que les orientations vont aujourd’hui dans ce sens ?
Je pense que c’est effectivement une orientation stratégique essentielle pour notre pays. Au Crédit Agricole du Maroc, nous sommes très occupés par ce sujet. Il suffit de regarder la structuration du groupe. A ne citer dans ce cadre que «ARDI», une structure de microcrédit qui est essentiellement réservée aux populations rurales. Sur les microcrédits octroyés par cette structure, un peu plus de la moitié est destinée à des activités agricoles. Il y a aussi le programme «Tamouil Al Fellah». Cette nouvelle structure que nous avons aussi créée est dédiée au petit agriculteur non éligible au financement traditionnel. C’est une structure qui est en train de prendre son envol et qui répond exactement à ce souci de traitement des conditions particulières que vivent les petits agriculteurs. Car la problématique principale des agriculteurs, c’est qu’ils ne sont pas nécessairement éligibles à des financements traditionnels. Il fallait donc mettre en place des systèmes de financement de la même manière qu’au niveau du Plan Maroc Vert (PMV) il y a des mécanismes particuliers qui sont prévus pour le petit agriculteur. Au Crédit Agricole, en accompagnement du PMV, nous avons ainsi tenu à mettre en place des mécanismes spécifiques pour pouvoir financer des populations qui, normalement -selon les normes bancaires classiques-, ne pourraient pas avoir accès au financement. C’est cela «Tamouil Al Fellah».
Le Crédit Agricole du Maroc serait-il la principale banque de financement du secteur? Comment expliquez-vous le désintéressement des autres banques?
Toutes les banques participent au financement du PMV et chacune à son niveau fait ce qui est nécessaire. Elles sont très présentes, notamment dans l’agro-industrie. En fait, là où le Crédit Agricole du Maroc est seul, c’est dans le financement des petits agriculteurs, surtout ceux qui ne sont pas bancables facilement. C’est là que nous sommes seuls, parce que cela nécessite effectivement un certain nombre de mécanismes très particuliers et un soutien de l’Etat. A souligner que le Crédit Agricole est une banque publique qui peut se permettre de travailler avec une population qui n’est pas extrêmement rentable. Mais, concernant le grand agriculteur et le reste de l’agro-industrie, les autres banques prennent leur part de marché. D’ailleurs, on se fait la concurrence et elles sont très impliquées, même au niveau du financement PMV. Il n’y a pas de souci à ce niveau-là.
Quelles sont les particularités de l’édition 2013 du SIAM pour le Crédit Agricole du Maroc?
Le Crédit Agricole du Maroc est le partenaire officiel du SIAM et il y est intimement impliqué. L’édition 2013 du SIAM est organisée sous la thématique du commerce agricole. Et pour nous, le commerce agricole, ce sont plusieurs réalités. C’est d’abord le commerce intérieur dont la première étape démarre par le souk traditionnel. Mais ce sont également les filières et les interprofessions pour l’organisation des échanges internes au Maroc. Ce sont aussi les exportations génératrices de devises qui vont dans le sens de l’amélioration de la balance des paiements du Maroc. Il faut voir le commerce agricole comme une thématique vraiment très large. Il va du petit fellah, qui vend son produit au souk local, jusqu’au grand agriculteur exportateur qui vend ses oranges aux USA ou à la Russie. Et ça, c’est bien représentatif de ce que fait le Crédit Agricole. Car nous nous intéressons aussi bien au petit fellah, qui vend son produit au souk à travers notre présence, qu’au grand agriculteur qui a besoin de notre salle des marchés pour pouvoir traiter ses flux d’exportation et d’importation de devises. Nous sommes donc présents sur toute la filière. Ainsi, par rapport à l’édition 2013 du SIAM, je pense que la thématique du commerce agricole qui a été choisie est très pertinente. Car, aujourd’hui, le commerce agricole est l’une des problématiques centrales. Problématique de souk, problématique des marchés de gros, de l’organisation des interprofessions et de l’exportation… Tout cela, ce sont en effet des problématiques. Le Plan Maroc Vert va permettre d’améliorer la production et la productivité des produits. Mais tous ces produits, il va falloir les vendre. Et donc, le commerce est vraiment l’étape nécessaire pour pouvoir assurer la réussite du Plan Maroc Vert. Il faut vendre au bon moment, au bon prix, avec de bonnes conditions et une sécurité de paiement. Il faut dire qu’il y a donc beaucoup de choses qui entrent en ligne.
La mécanisation est un des piliers de la politique agricole. Quelle place occupe ce pilier au Crédit Agricole du Maroc?
Pour nous au Crédit Agricole en effet et pour le PMV d’une manière générale, la mécanisation est bien un des piliers de la stratégie agricole. Il aurait été anormal que, face à la baisse de la vente du matériel agricole, on ne réagisse pas. La convention que nous venons de signer il y a quelques jours, avec l’Association marocaine des importateurs du matériel agricole (AMIMA), a d’ailleurs pour objectif de permettre de booster les ventes de matériel agricole, sachant qu’une campagne de financement de machines-outils de tracteurs, à des taux préférentiels, vient d’être lancée.