C’est l’attaque la plus meurtrière depuis la signature des accords de paix d’Alger, en juin 2015. Près de 60 personnes ont été tuées et 115 blessées, mercredi 18 janvier, dans l’explosion d’un véhicule piégé à l’intérieur d’un camp militaire de Gao. Le site est symbolique. Il accueille, depuis le début de l’année, 600 combattants maliens du Mécanisme opérationnel de coordination (MOC): issus des rangs de l’ex-rébellion touareg, des milices d’autodéfense progouvernementales et de l’armée nationale, les hommes rassemblés dans le camp devaient prochainement effectuer, pour la première fois, des patrouilles communes.
«La voiture, maquillée aux couleurs du MOC, a forcé la barrière et a foncé sur un groupe de combattants qui étaient en pleine séance d’entraînement, raconte Souleymane Ag Anara, correspondant malien de l’agence Reuters, joint par téléphone. L’explosion a été hyperpuissante. J’ai été traumatisé par le bruit et blessé à la tête, alors que je me trouvais à l’autre bout de la cour. Il y avait des corps décapités, du sang partout, des morceaux de corps projetés à 50 mètres. Je n’avais jamais vu ça. Les gens criaient, couraient dans tous les sens». Le président malien, Ibrahim Boubacar Keïta, a annoncé un deuil de trois jours. Le carnage a été revendiqué dans la soirée par le groupe Al-Mourabitoune, affilié à Al-Qaïda au Maghreb islamique et dirigé par le vétéran du jihad, Mokhtar Belmokhtar (qui aurait été visé par une frappe aérienne, en Libye, dans la nuit de 14 au 15 novembre). Selon un communiqué du groupe djihadiste envoyé à l’agence de presse mauritanienne Alakhbar, l’attaque a été menée par un certain Abdellah Hadi, surnommé Al-Ançari. Régulièrement, les jihadistes font circuler le message dans les villes de l’Azawad: tout collaborateur des forces françaises de l’opération «Barkhane» ou de la Mission des Nations Unies au Mali (Minusma) s’expose à des représailles.
Patrice Zehr