Conformément à la loi organique 29-11 relative aux partis politiques, les formations politiques marocaines sont tenues d’organiser leurs congrès nationaux respectifs au moins une fois tous les quatre ans. A défaut, le parti contrevenant s’expose à la perte de son droit au financement public.
Après avoir reporté leurs messes partisanes au-delà des législatives du 7 octobre 2016, quatre partis politiques mènent aujourd’hui une course contre la montre pour préparer leurs Congrès nationaux qui se tiendront au cours des prochains mois.
Parti de l’Istiqlal: dans l’œil du cyclone
Arrivé troisième à l’issue des dernières élections législatives, le Parti de l’Istiqlal (PI) a annoncé qu’il tiendra son Congrès national les 24, 25 et 26 mars 2017. A l’ordre du jour, l’élection d’un nouveau Secrétaire général du parti, en plus des discussions qu’auront les adhérents au PI au sujet des moyens à même de permettre au parti de dépasser sa crise engendrée par les résultats médiocres obtenus lors des élections législatives du 7 octobre 2016. En effet, le Parti de l’Istiqlal vit une crise identitaire et organisationnelle sans précédent. Son Congrès national, prévu en mars prochain, se tiendra donc dans un contexte particulier, marqué par l’avalanche des réactions suscitées après la dernière déclaration du SG du parti de la balance. Hamid Chabat avait, en effet, créé une vive polémique après sa déclaration au sujet des frontières du Maroc avec la Mauritanie.
Chabat, accusé par ses détracteurs, à l’intérieur comme à l’extérieur du parti qu’il dirige, d’incarner le populisme pur et dur, a poussé le bouchon plus loin. Pas plus tard que le 8 février 2017, il a fait une sortie médiatique à la suite de la parution d’un article mis en ligne sur le site de son parti. Ledit article, qui a d’ailleurs été retiré après avoir été largement repris sur les réseaux sociaux, explique que la carrière politique et l’intégrité physique de Chabat seraient menacées par «l’Etat profond». Cette déclaration a poussé le ministère de l’Intérieur à adresser une lettre au département de la Justice, demandant l’ouverture d’une enquête à ce sujet. Cette affaire va certainement se répercuter sur le prochain Congrès national du PI et son SG qui, jusque-là, était presque certain d’être reconduit dans ses fonctions à la tête du parti.
Nombreuses sont les voix qui crient à la destruction du parti, depuis que l’Istiqlal est dirigé par Hamid Chabat. Plusieurs Istiqlaliens, dont Taoufik Hejira, Karim Ghellab et Yasmina Baddou (traduits devant le Conseil de discipline du parti et condamnés, le 9 février, à 18 mois de suspension) qui appellent les membres du PI à faire bloc contre la réélection de Chabat à la tête d’un parti menacé de dislocation.
Chabat sera-t-il réélu? Les voix s’accordent à dire que la publication dudit article, accusant ce qu’il nomme «Etat profond» de vouloir assassiner politiquement et peut-être même physiquement le SG du parti, rend impossible l’élection de Hamid Chabat à la tête du Parti de l’Istiqlal. Les détracteurs du SG pensent, quant à eux, que le moment est enfin venu pour redonner au PI la place de choix qu’il occupait en tant que formation politique ayant son mot à dire et jouissant du respect d’une grande partie des électeurs.
USFP: la Rose se fane
L’autre parti à avoir annoncé la date de la tenue de son prochain congrès est l’Union Socialiste des Forces Populaires (USFP). Classé à la septième position aux législatives du 7 octobre 2016, le parti de la Rose compte tenir sa messe partisane du 19 au 21 mai 2017. Là aussi, c’est un congrès qui se tiendra dans un contexte particulier, marqué par une série d’évènements qui ont ébranlé le parti. Il n’est pas exclu que ce congrès connaisse des développements inattendus. A l’USFP, nombreux sont les adhérents qui appellent à élire un successeur de Driss Lachgar, Premier secrétaire, dont le nombre des détracteurs ne cesse de se multiplier. Malgré la fronde à laquelle il fait face, Lachgar tient à rester aux commandes du parti. Il compte ainsi se présenter comme candidat pour un deuxième mandat de Premier secrétaire de l’USFP. Ce qui fait beaucoup de mécontents. Plusieurs USFPéistes, qui se désolent de ce qu’ils estiment être «la descente aux enfers d’un parti jadis respecté de tous», rappellent que l’USFP doit se ressaisir au plus vite, afin de faire face au populisme qui le gangrène et menace son avenir. Pour rappel, ce populisme a été décrié par feu Ahmed Zaïdi en 2014. Zaïdi, pour attirer l’attention sur le recul de l’USFP, avait choisi de faire scission et créer avec d’autres grosses pointures du parti le mouvement «Ouverture et Démocratie». Ce mouvement était l’ébauche d’un nouveau parti. Mais cette aventure a été mise en stand-by après la disparition tragique de feu Ahmed Zaidi, fin 2014, dans la commune de Oued Cherrat. Les USFPéistes assoiffés de changement à la tête de leur parti parviendront-ils à se faire entendre et à élire un Premier secrétaire, autre que Driss Lachgar? Réponse le 21 mai prochain.
RNI: la colombe prend son envol
Le Rassemblement National des Indépendants (RNI) tiendra lui aussi son congrès national, du 19 au 21 mai 2017. Après avoir élu un nouveau président en la personne de Aziz Akhannouch, également ministre de l’Agriculture et de la Pêche maritime, il discutera lors de son prochain congrès des moyens à même de permettre l’application de l’opération de restructuration et de renouveau annoncée par Akhannouch en sa qualité de nouveau Président du parti.
Pour rappel, le RNI s’est classé à la quatrième position aux élections législatives du 7 octobre 2016.
Selon les observateurs de la scène partisane au Maroc, Aziz Akhannouch s’est fait remarquer par sa volonté concrète d’insuffler aux instances et organes du RNI un nouvel élan.
Le 15 janvier dernier, Akhannouch, en sa qualité de nouveau Président du parti de la colombe, a tenu un meeting qui a couronné une série de concertations régionales qu’il avait engagées. Cette ultime étape, à laquelle a assisté le Secrétaire général de l’Union Constitutionnelle, Mohamed Sajid, ainsi que des membres du Bureau politique du RNI, a été considérée comme un tournant décisif qui marquera l’avenir d’un parti fort de ses 39 ans d’existence et d’un savoir-faire dans le domaine politique.
Le Congrès national du RNI sera l’occasion pour le successeur de Salaheddine Mezouar de rappeler l’essentiel de l’action qu’il compte entreprendre à court et moyen termes. Akhannouch a été on ne peut plus clair quand il a rappelé, lors du meeting qu’il a animé à Agadir, qu’il placera les intérêts de la nation et les attentes des citoyens en tête de ses priorités. «La mise en place d’une nouvelle stratégie faite de proximité avec les citoyens est un travail de longue haleine avec les bases et les différents adhérents du parti», a-t-il ajouté.
Au PJD, l’heure est à l’incertitude
Le PJD, qui avait lui aussi reporté son Congrès national au-delà des élections législatives du 7 octobre 2016, a finalement décidé de confier à Mohamed Yatim, un des idéologues du parti de la lampe, la préparation du prochain congrès national.
Les instances décisionnelles du PJD ont également accordé les pleins pouvoirs au SG, Abdelilah Benkirane, pour poursuive les consultations en vue de la formation du prochain gouvernement.
Lors de la réunion du Conseil national du parti, tenue les 18 et 19 février à Bouznika, plusieurs militants n’ont pas écarté l’hypothèse que Benkirane puisse rempiler pour un 3ème mandat à la tête du PJD. D’ailleurs, cette possibilité divise au sein du parti. Du côté des pro-Benkirane, on estime qu’un amendement des statuts permettra au Secrétaire général de briguer un troisième mandat à la tête du parti. Mais d’autres estiment que cet amendement, n’est pas nécessaire. Il faudra donc attendre la tenue du Congrès national du parti pour avoir le cœur net à ce sujet.
Le Secrétaire général adjoint du PJD, Slimane Amrani, a confié au Reporter que la date de la tenue du prochain Congrès national du parti sera fixée par le Conseil national du PJD, sur la base d’une proposition de la Commission préparatoire de ces Assises.
Mohcine Lourhzal