La présidente du Conseil national des droits de l’homme (CNDH), Amina Bouayach, a appelé mardi à Rabat, le gouvernement à apporter des amendements urgents à même de garantir l’effectivité des droits des enfants à la protection contre toute forme de violence, en particulier la violence sexuelle.
Dans une allocution lors d’une réunion interactive organisée par le Conseil avec des organisations non gouvernementales et des chercheurs sur la violence sexuelle à l’égard des enfants, Mme Bouayach a invité le gouvernement à saisir l’occasion de la célébration du 30ème anniversaire de l’adhésion du Royaume à la Convention relative aux droits de l’enfant (21 juin prochain), « pour procéder à des amendement urgents en vue de garantir l’effectivité des droits des enfants à la protection contre toutes les formes de violence, conformément aux dispositions de l’article 19 de la Convention relative aux droits de l’enfant, en particulier la violence sexuelle telle que prévue à l’article 34 de la Convention ».
Sur le plan normatif, la conjoncture actuelle, a-t-elle poursuivi, exige également de hâter le parachèvement du processus de ratification de la Convention de Lanzarote du Conseil de l’Europe relative à la violence sexuelle à l’égard des enfants, considérée comme un cadre normatif pour l’adaptation de la violence sexuelle, la consolidation de la protection juridique, la prévention de la violence et le renforcement de la coopération internationale en matière de lutte contre les agressions sexuelles contre les enfants à caractère transnational, en plus du parachèvement du processus de ratification du troisième protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, qui donne aux enfants la possibilité de présenter leurs plaintes au Comité des Nations Unies après l’épuisement des recours nationaux.
Elle a renouvelé, à ce propos, la proposition de réformer le modèle qui régit la politique punitive et de procéder à une reclassification du viol et de l’agression, conformément aux normes internationales, pour les considérer comme des violences sexuelles, c’est-à-dire des crimes visant à attenter et à nuire à l’intégrité physique de la victime, qui doivent être punis sévèrement quelles que soient les circonstances, et non simplement considérés comme une violation du système familial comme c’est le cas aujourd’hui. »
Pour Mme Bouayach, « l’enjeu majeur est l’efficacité de notre système de protection et son adaptation aux normes internationales de protection des droits de l’enfant », à travers un système de protection, tel que défini par l’UNICEF (système de protection), qui comprend des lois, des politiques, des institutions et des ressources visant à protéger les enfants contre la violence et à assurer leur prise en charge multidimensionnelle.
Elle a, par ailleurs, rappelé que la réunion d’aujourd’hui intervient quelques semaines seulement après le rapport du Conseil sur la dénonciation et la lutte contre l’impunité en cas de violence contre les femmes et les enfants, soulignant que « sur 180 jugements analysés, la justice a été rarement rendue dans les affaires de violence contre les femmes et les filles, en général en raison de la réadaptation des faits, de l’invocation des circonstances atténuantes ou de l’abandon des plaintes à cause de pressions exercées sur les victimes ».
Et de poursuivre que le récent jugement rendu contre les violeurs d’une fillette de moins de 12 ans près de la ville de Tiflet confirme les observations du Conseil publiées dans son rapport de mars dernier sur « l’encouragement des victimes à signaler toute forme de violence pour lutter contre l’impunité », visant à développer le débat public à travers les dossiers et les cas de violence, y compris la violence sexuelle et l’exposition nécessaire et requise pour y faire face, en s’appuyant sur un certain nombre d’expériences internationales qui ont prouvé que la dénonciation des crimes violents est un moyen efficace de mobiliser la société pour lutter contre la violence sexuelle et l’extorsion.
Dans ce sens, Mme Bouayach a indiqué que le cas de violence sexuelle contre la fillette de Tiflet « nous a mis devant trois victimes dans cette affaire : d’abord la fillette victime qui a subi une injustice, étant donné que le jugement de première instance n’a pas protégé son intégrité physique, psychologique et sociale, ensuite l’enfant né de la violence sexuelle, et enfin la société qui résiste à la normalisation de la violence et craint de réduire le caractère criminel de toutes les formes de violence, et qui s’inquiète que les normes et les règles juridiques n’agissent plus en tant que moyen civilisé en mesure d’imposer l’équilibre et la justice au sein d’une société qui protège ses femmes, ses filles et ses enfants contre les violations graves.
Elle a souligné que la révision des normes de protection sociale doit être fondée sur le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant, afin de développer des systèmes de protection de l’enfance dans toutes les régions Aldar.
LR/MAP