Un réel défi pour la classe politique française: la manifestation contre le mariage gay a drainé la foule et a été un succès. Reste qu’il est difficile de prédire l’avenir de ce mouvement. Une chose est sûre: la France en sort divisée.
Qui dit vrai, s’agissant de la guerre des chiffres des manifestants qui ont bien fait entendre leur voix, dimanche 26 mai 2013 aux Invalides, lors de ce qui a été appelé la «Manifestation pour tous»? Organisateurs et police se sont opposés dans une véritable guerre des chiffres.
Les anti-mariage gay ont été évalués par les organisateurs à 1 million de personnes. Plus frileuse, la Municipalité de Paris les a réduits à quelque 150.000. D’autres observateurs ont estimé la participation de la foule à plus de 500.000 manifestants, critiquant la méthode de calcul de la préfecture de Paris et n’excluant pas la possibilité d’engager une action en justice pour ce qu’ils qualifiaient de comptage faussé.
Au-delà des contractions relevées au niveau du comptage des participants de tous bords, la manifestation contre le «Mariage pour tous» a eu ce côté fâcheux d’avoir divisé les Français et creusé davantage le fossé entre ceux qui approuvent et ceux qui désapprouvent. Elle a mis dans l’embarras la classe politique et plus particulièrement les partis qui n’arrivent pas à la situer et, surtout, à lui donner un qualificatif. Pour les uns, elle se veut annonciatrice d’un réel débat de société, une épreuve de force. Pour d’autres, c’est une résistance et même un «printemps français». En témoignent les slogans véhiculés lors des débordements qui ont parlé ouvertement de «résistance» et de «reprise des choses en main», ce qui n’a pas laissé le président français, François Hollande, indifférent et l’a fait sortir de ses tranchées pour répondre à la mouvance ultra de la «Manif pour tous» et dire que «la résistance, c’était par rapport au nazisme et à l’occupation» et que «nul n’a le droit d’utiliser ces mots pour défendre des idées, si on peut appeler cela des idées».
Un courant de pensées donc. En tous cas, le responsable d’Alliance Vita et porte-parole de la «Manif pour tous», Tuqdal Derville, y croit fermement. «Il faut dorénavant, assure-t-il, compter avec le courant de pensée sur la question de la famille et du genre». Une chose est désormais acquise: il y a des gens qui représentent un courant de pensée et qui ont émergé de cette manifestation; des gens qui n’ont certes pas le profil habituel de la Manif, à tel point que la classe politique et les observateurs se prennent la tête. Qui sont-ils et que veulent-ils? Est-ce que leur sortie dans la rue, cette mobilisation monstre, se limite à la seule contestation de la fameuse loi Taubira contre le mariage homosexuel? Ou est-ce qu’ils se proposent et envisagent d’aller encore plus loin et de mettre en cause tout un système dans un brusque «printemps français»? Et quel serait alors le prix à payer d’une éventuelle mue de la France et surtout d’une fracture de la société française aujourd’hui consommée, fragilisée et divisée en deux par une Manif, alors qu’un des thèmes phares de la campagne électorale du candidat François Hollande était justement de réconcilier les français?
Autre question qui taraude la classe politique, tout comme les politologues et les médias français, c’est de savoir si cette «Manif pour tous» ne va pas se transformer à court ou à long terme en une véritable force politique, en une formation politique. Mais quel leader à cet éventuel nouveau-né? Le nom de Brigitte Bargeot, porte-parole du mouvement, est prononcé du bout des lèvres. Un enjeu donc pour les prochaines élections primaires.
En effet, le parti UMP, bien que divisé sur sa participation à la manifestation pour tous, prisonnier meurtri par sa crise intérieure et fragilisé par les blessures de novembre 2012 occasionnées par le combat Fillon-Copé, a semble-t-il bien compris l’enjeu. Et il l’a prouvé en tenant à être magistralement présent à la grande «Manif pour tous», même si des figures emblématiques de l’Union, avec en tête François Fillon et Juppé, étaient absentes et ont été sévèrement vilipendées par Henri Guaino, auxquels il en a voulu pour cette absence et pour avoir donné «un chèque en blanc au gouvernement». La droite divisée espère néanmoins récupérer les fruits de la mobilisation anti-Hollande.
D’autres absents lors de cette Manif et non des moindres, malgré le poids des 150.000 ou du million de participants: les gens de l’Eglise et les bourgeois de la France, mais aussi l’électorat du Front National. Marine le Pen était absente, préoccupée qu’elle est par les élections 2014 et les élections européennes où elle compte battre à plate couture ses adversaires socialistes et ceux de l’UMP en mettant à profit la crise économique, morale et le ras-le-bol exprimé par la «Manif pour tous».
Les partis politiques sont embarrassés par ce mouvement et la droite, comme la gauche, le centre et les populistes ne cachent pas la difficulté de récupérer un mouvement qui est encore sans visage, d’où sa complexité. Car, nonobstant sa farouche opposition au mariage gay, rien ne filtre encore sur ses autres éventuelles revendications. Certes, la Manif du dimanche 26 mai est considérée par certains comme «une sortie de révolte contre l’Etat». Elle a été une sorte de caisse de résonnance et a donné une opportunité à plusieurs casseurs et autres groupuscules de faire entendre leurs revendications, même si cela a été fait par la violence dont la Manif s’est désolidarisée.
Malgré toutes ces interrogations sur l’avenir et le devenir de la «Manifestation pour tous», une chose est sûre: on a senti une réelle sincérité des manifestants de tous bords contre le mariage gay et une sorte d’affiliation au «Printemps français». Le débat est ouvert…
Nous avons manifesté.Moi catho, centriste.Mon mari de gauche athée + trois grands ados ou jeunes adultes pas tous cathos et votant PS. Nous ne ressemblons pas à ce que vous dites pernicieusement à la fin: nul de nous n’est affilié au Printemps français (marginalisé et mis au ban de LMPT!) et aucun de nos très nombreux amis ne s’y reconnaît.C’est honteux de terminer votre article ainsi. Et si la France est divisée, ce n’est pas du fait des manifs comme le sous entend votre article.
Si vous voulez aider à la réconciliation, alors il faut permettre le dialogue, donc écouter les gens.C’est justement ce que FH a refusé de faire: nos arguments n’ont jamais été entendus, mais déformés, ridiculisés, amalgamés…Nous avions sans doute trop de chance de convaincre, on nous a fait taire.
Ne pouvant pas avoir d’enfant le dossier que nous avons mis sur pied pour adopter avec mon mari est en train de tourner au vinaigre car il y a déjà peu d’enfants à adopter par rapport à la demande, et en plus avec le mariage pour tous, tout les pays ferment les uns après les autres leurs portes à la France en ce qui concerne l’adoption de leur ressortissants….
Je ne peux en conséquence que être remonté par rapport à cette loi, quand le dernier sondage crédible estime à 100000 en France le nombre de couple homo pour 65 million d’habitants! Et pourtant je n’ai aucun mépris, rejet, et haine envers les homos. Cependant c’est typiquement le genre d’aspect qui a été bâcle par nos élus.