Le leader auto-proclamé des manifestations ou «Hirak» d’Al Hoceima, Nasser Zefzafi, a été arrêté ce lundi 29 mai 2017 par la police, après une cavale qui n’a duré que 3 jours. Ci-après, les événements les plus saillants de ces derniers jours.
Une délégation officielle à Al Hoceima
Sur instructions de SM le Roi Mohammed VI, une délégation de haut niveau, composée de plusieurs ministres et des directeurs des institutions publiques concernées par les chantiers de développement dans la province, se rend à Al Hoceima, lundi 22 mai 2017. Conduite par le ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit et comptant pas moins de sept ministres, elle est chargée d’évaluer les chantiers en cours et de tenir des consultations avec des responsables locaux, en vue de donner suite aux revendications socio-économiques de la population locale. Les membres de la délégation effectuent par la suite des visites de terrain dans plusieurs chantiers relevant de leurs départements respectifs, au cours desquelles ils s’enquièrent de l’état d’avancement des travaux et des difficultés rencontrées dans l’exécution des projets dont ont besoin la ville et la région.
Le gouvernement fait machine-arrière
Au début, le gouvernement qualifie les revendications des habitants d’Al Hoceima de légitimes. Par la suite, à l’issue de sa réunion hebdomadaire (jeudi 25 mai 2017), le gouvernement, par la voix de son porte-parole, Mustapha El Khalfi, affirme que des parties tentent d’exploiter le mouvement de protestation au Rif pour semer le trouble et porter atteinte à la stabilité du Royaume. El Khalfi ajoute que le gouvernement réaffirme sa détermination à appliquer la loi pour assurer la protection des citoyens et de leurs biens. «Personne n’est au-dessus de la loi. D’autant plus que personne ne pourra se substituer au gouvernement», déclare-t-il devant les journalistes.
Zefzafi sème le trouble dans une mosquée
Les faits se déroulent dans la mosquée Mohammed V d’Al Hoceima. Au moment où les fidèles écoutent avec attention le prêche du vendredi, l’autoproclamé leader du Hirak du Rif, Nasser Zefzafi, sort de nulle part et se met à hurler, avant de se diriger vers le «mihrab» et s’en prendre à l’imam, à l’Etat et à ses symboles. «Ils veulent nous humilier. Ils veulent nous faire plier. Ils veulent que les (pingouins) viennent violer nos femmes et nos filles», s’écrit-il. «Comment peut-on nous accuser de vouloir semer la zizanie (fitna) quand tous nos jeunes sont au chômage ou ont été forcés à émigrer?», s’interroge-t-il, sur fond d’«Allah Akbar» lancé par ses sympathisants. Sentant le danger venir, Zefzafi prend la fuite, de peur d’être appréhendé par la police.
Le Procureur général ordonne son arrestation
Le Procureur général du Roi près la Cour d’appel d’Al Hoceima ordonne, vendredi 26 mai 2017, l’arrestation du leader du mouvement Hirak Chaabi, Nasser Zefzafi, pour enquête, avant de le déférer devant le parquet, pour entrave à la liberté du culte dans la mosquée Mohammed V à Al Hoceima.
Les pro-Zefzafi promettent de le protéger
Des manifestations sont déclenchées dans la ville d’Al Hoceima, ainsi que dans d’autres villes de la région en guise de soutien à Zefzafi. Certains manifestants vont jusqu’à scander «Birouh, bi dam, nafdik ya Nasser» (avec le sang, avec notre âme, on se sacrifie pour toi, Nasser). Ils font même un barrage devant l’entrée de la maison de Zefzafi. En même temps que la police mène son enquête.
Nasser Zefzafi arrêté
Recherché depuis vendredi, le leader de la contestation à Al Hoceima est arrêté lundi 29 mai 2017, tôt le matin. Le Procureur général du Roi près la Cour d’appel d’Al Hoceïma, en annonçant l’arrestation de Zefzafi, ajoute que le détenu est poursuivi dans le cadre de la loi pour entrave à la liberté de culte. Au moment de son arrestation, Zefzafi se trouvait en compagnie d’autres personnes toutes remises à la Brigade nationale de la police judiciaire (BNPJ) à Casablanca. Les faits qui lui sont reprochés, ainsi qu’aux autres personnes interpellées, concernent l’atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat et d’autres actes constituant des crimes en vertu de la loi.
Mohcine Lourhzal
Zafzafi-Bio express
Nasser Zefzafi est né à Al Hoceima dans la région du Rif au nord du Maroc. Ses parents sont originaires de la tribu d’Aït Ouriaghel. Agé de 39 ans, Zefzafi n’a pas vraiment réussi dans la vie.
Il s’est d’abord essayé à l’entrepreneuriat en réparant des téléphones portables et des ordinateurs après avoir mis sur pied un semblant de société qui tourne court. Criblé de dettes, il met la clé sous la porte et retourne vivre chez ses parents. Parfois, il est hébergé par des amies suite à des conflits avec ses parents à cause de la rareté de l’emploi dont il souffre. Au lendemain de la mort de Mohcine Fikri, marchand de poisson à la sauvette, Nasser Zefzafi participe aux protestations qui éclatent à Al Hoceima pour dénoncer les carences sociales et économiques dont souffre la ville et la région du Rif.
Ce mouvement de contestations va prendre graduellement une tournure politique. Aujourd’hui, les revendications d’une poignée de manifestants ne se limite plus aux revendications sociales comme la lutte contre le chômage, mais vont jusqu’à demander l’indépendance du Rif.
Selon nombre d’analystes politiques, l’Etat doit donner suite aux revendications sociales des citoyens, tout en faisant montre d’intransigeance avec les fauteurs de trouble qui veulent surfer sur la vague des protestations sociales pour porter atteinte à la stabilité du pays.
En attendant que les choses se précisent davantage, Nasser Zefzafi est aujourd’hui entre les mains de la police. Appréhendé le 29 mai 2017, il encourt une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à la perpétuité vu la gravité des faits qui lui sont reprochés.