Abdelkader Retnani est titulaire d’une maîtrise de gestion et éditeur depuis 31 ans. En 1980, il a créé sa première maison d’édition, Eddif. En 1988, il a présidé le Raja de Casablanca (qui a remporté sa première Botola) et en 1993, il a fondé une autre maison d’édition, La Croisée des Chemins.
Retnani a édité plus de 600 titres au catalogue et quelque 1.800.000 exemplaires, dont plus de 1.500.000 vendus. Il est consultant auprès des organismes internationaux, dont l’Agence intergouvernementale de la francophonie et l’Unesco. Il était aussi ancien secrétaire général de l’Association des éditeurs africains francophones et est actuellement président fondateur de l’Association Marocaine des Professionnels du Livre (AMP).
L’éditeur Abdelkader Retnani est membre depuis 1992 du Conseil d’administration du CAFED (Centre africain de formation des éditeurs et libraires) situé à Tunis. Il était organisateur et président du Congrès international des études francophones sous l’égide de feu SM Hassan II, à Casablanca.
Retnani a été décoré par feu SM Hassan II du «Ouissam alaouite» en 1993, en tant que président du Raja de Casablanca, champion du Maroc en 1988 et premier champion des clubs champions d’Afrique en 1989. Il était également ancien membre du Comité exécutif du Conseil International des études francophones qui regroupe des universitaires d’Amérique du Nord. En mai 2011, la Société Académique d’Education et d’Encouragement à Paris lui a accordé une médaille d’argent.
«Le secteur de l’édition est un secteur plein de promesses, mais aussi de difficultés liées à la façon dont les décideurs dans notre pays conçoivent l’avenir de ce métier. Si responsables et intervenants continuent d »’ignorer », en »parfaite » connaissance de cause, la gravité de la situation du livre au Maroc, de son industrie qui n’est pas comme les autres et où se mêlent raison et passion, de la problématique de la lecture, la crise ne peut qu’empirer et les perspectives… Il n’y en aura pas ou très peu», relève Abdelkader Rétnani. Et d’ajouter: «Parmi les innombrables difficultés, on peut citer le manque tragique de structures appropriées au livre (un produit pas comme les autres, qui renferme entre ses pages toute l’âme d’un peuple). Il y a aussi l’entrave d’une certaine centralisation »bureaucratiste » qui voudrait penser à la place des professionnels et peut-être même à la place des auteurs et des lecteurs. Un débat national, où tous les acteurs intéressés de près ou de loin traiteraient du sujet (ministères, professionnels, société civile…), serait à mon humble avis chose nécessaire pour réfléchir à la meilleure façon d’assurer le décollage du secteur qui, avec l’éducation nationale, la santé, l’emploi… représente le starting block d’une réforme culturelle globale réussie. À propos de l’emploi, ce secteur peut, plus que nos responsables n’imaginent, en être un générateur des plus porteurs».
Selon Retnani, «si toutes les personnes qui aiment le livre -du parent analphabète soucieux d’instruire ses enfants jusqu’au plus grand des décideurs- lui tendent vraiment la main, sa condition, celle du livre, retrouvera ses jours heureux… Je dis »retrouvera » parce que le Marocain des années soixante et soixante-dix cherchait les livres… disponibles sur les rayons des dizaines de librairies qui ont disparu (65 libraires en 1985 à Casablanca, 15 librairies en 2012)». Mais tout ça est perdu maintenant. Dans les pays industrialisés, avec internet et le téléchargement, les bibliophiles commandent des livres support-papier et téléchargent des e.books payants. Malgré cela, le livre continue de progresser, informe-t-il.
«Alors, soyons tous ces bons citoyens qu’on nous conseille de devenir sur les chaînes nationales! Mettons tous la main dans la main pour sauver une composante essentielle de notre culture, donc de notre avenir et de celui de ce pays que nous voulons offrir en rêve à nos enfants et petits-enfants… Ministères, communes, mairies, gouverneurs en concertation avec les professionnels, associations de parents d’élèves et toutes les composantes de la société civile doivent œuvrer pour la création de librairies modèles au service du livre qui seraient peut-être source d’inspiration pour d’autres pays aux mêmes contraintes et qui ne sont pas toujours d’ordre économique. Le mot-clé, c’est une politique volontariste, intelligente et participative… A commencer par les villes les plus exclues du cycle de production des valeurs symboliques. »Il faut souffrir doucement les lois de notre condition », disait Montaigne», rappelle Retnani. «Je souhaite que mon pays accepte le principe de »la lecture pour tous » et ce point sensible peut être atteint avec la volonté des responsables politiques. »Lire, c’est s’émanciper », briser les barrières de l’ignorance; pas besoin de voter des budgets supplémentaires mais de conjuguer nos efforts et atouts et surtout innover, imaginer et mettre en avant cette volonté, pour briser ce carcan d’ignorance, afin de créer cette ouverture indispensable pour que le Maroc, avec ses potentialités, avance durablement. C’est un espoir que je veux voir devenir une réalité et nous aurons gagné notre pari avant qu’il ne soit trop tard», a conclu Abdelkader Retnani.