Lamia est cadre dans une grande multinationale. Elle raconte pourquoi elle est parfaitement convaincue de son célibat et pourquoi elle exècre le mariage et la vie de couple.
«Je suis célibataire; une vraie célibataire endurcie! J’ai 38 ans et je suis cadre dans une grande entreprise. Je gagne très bien ma vie. J’ai trois sœurs et deux frères. Mes parents sont à la retraite; ils étaient tous les deux fonctionnaires dans l’administration publique. Ils forment un couple à l’ancienne, sans tracas, sauf peut-être aujourd’hui ceux de leur descendance. J’ai aussi des frères et sœurs qui sont hélas mariés avec chacun un ou deux enfants. Mes amis et amies du voisinage ou d’école, eux aussi, sont presque tous sont rangés. Tout ce petit monde ne m’inspire ni jalousie, ni convoitise. Ils sont sans aucun doute, même maintenant, la raison qui m’empêche de me décider à me caser. Je suis une jeune femme plutôt jolie, tout à fait normale, n’ayant eu à ce jour aucune déception amoureuse grave. J’ai eu comme tout le monde des aventures avec des garçons quand j’étais jeune, avec des hommes quand j’ai grandi. Certains, je les ai aimés, d’autres, tous justes appréciés. Aucun ne m’a fait perdre la boussole.
Oui, me marier, fonder une famille ne sont que pure folie. J’ai eu des demandes en mariage et j’en ai encore quelques-unes, mais je ne me sens ni attirée, ni séduite pour ça. Je n’ai pour ainsi dire que des exemples exaspérants et dégoutants de vie commune.
Dans ma famille, j’ai pu constater et constate encore avec effroi ce que sont devenues mes sœurs et leurs mariages. Elles ne sont plus aussi coquettes: de vraies loques, tristes, complètement dépassées et désemparées. Elles ont fondé leur foyer et ont leur propre habitation, mais elles sont trop souvent dans la maison paternelle. Elles y viennent tous les jours de la semaine pour y déposer leurs tout-petits. Du coup, mes frères aussi ont ramené les leurs. Sans parler des week-ends: on assiste au grand souk. Tout le monde est présent: sœurs, frères, conjoints et enfants. Impossible de faire la grasse matinée, regarder un film, lire un bouquin. Des repas interminables avec des discussions vaines qui tournent autour des mêmes sujets: les diablotins ou la popote. Sans oublier les disputes et les crises. La vie des couples n’est jamais un long fleuve tranquille, mais plutôt une infinité d’enfantillages et de calculs mesquins qui n’ont rien à voir avec ce qu’on nomme l’amour à deux. Les femmes se plaignent d’avoir trop de boulot et de ne pas être aidées et les hommes, eux habitués à être servis, s’offusquent et se rebiffent assez indélicatement. Les uns et les autres s’acharnent à essayer de se convaincre qu’ils n’avaient jamais appris, avant, à vivre en couple et à élever des enfants et travailler en même temps. Faire l’arbitre équitable, c’est tout simplement impossible. Les parents, pour contourner ces situations critiques, s’obligent à raconter que si rien ne va plus, c’est de la faute aux «bonnes» devenues mauvaises… Qu’elles ne veulent plus travailler dans les maisons et que ces «foutues associations» les ont remontées et leur ont appris à revendiquer des droits… Et que maintenant, le pays allait se retrouver avec des familles éclatées avec un nombre incalculable de couples déchirés et d’enfants abandonnés, parce que les mères de famille ne peuvent pas tout faire toutes seules… En somme, tout s’amplifiait et devenait problème d’Etat! Ah, les pauvres parents ! Ils n’ont pas vu le temps passer…
D’ailleurs, d’autres disputes démarraient, une fois les autres partis, entre les parents. Ma mère, ne voulant pas se retrouver avec des divorcés avec leurs enfants sur les bras, se prenait la tête avec mon père qui disait qu’il fallait les laisser régler leurs problèmes entre eux et que lui n’avait plus de tranquillité chez lui. Et qu’il n’avait pas marié et installé ses enfants pour qu’ils lui reviennent en double ou en triple gonflés de tracas en sus. Que ce n’était pas son éducation à lui, mais la leur. Voilà encore un bûcher d’allumé pour la soirée ou la semaine! Ma vie chez les parents était devenue un vrai cauchemar. Je ne supportais plus toute cette comédie, pas plus que de voir souffrir ma mère et mon père. Moi qui pensais vivre tranquillement dans le cocon familial, j’ai finalement été contrainte d’aller vivre ailleurs. Je me suis acheté mon propre logement à crédit pour fuir toute cette laideur. Mes parents, trop préoccupés par les conflits des autres, n’ont même pas réagi.
Quant à mes amies, quand elles ont du temps et que l’on peut se rencontrer, l’œil toujours rivé sur le téléphone ou la montre, elles n’arrêtent pas de parler de leurs histoires de maison, de mari et d’enfants. Après les avoir poliment entendues, les unes terminent en prenant un air terriblement affligé, les sourcils en accent circonflexe. Elles osent me demander quand viendra le jour où je leur présenterai un heureux élu et qu’il serait quand même grand temps de faire des enfants. Et elles continuent. «Franchement, on se demande où ils ont les yeux ces hommes. Tu es si jolie, intelligente, avec un super job. On se fait une soirée et on te présente le frère du meilleur ami de …». Hébétée, insensible, je n’ai même pas envie de leur rétorquer que ça ne m’intéresse pas. Les autres, visiblement très mal dans leur mariage, affirment que j’ai une chance inouïe d’être encore célibataire et de ne surtout pas commettre d’erreur fatale, ou du moins de prendre encore mon temps; qu’il est certain que, les premiers temps du mariage, tout est si magique. Mais peu à peu, on se rend compte de l’arnaque. Pourquoi se précipiter pour aller direct dans un guet-apens où l’on devra s’affoler pour deux en faisant les interminables courses, rangements, lavages, repassages, repas, vaisselles. Et qu’au moins, moi, je ne peux me faire belle tout le temps et tranquillement, que je m’habille avec ce qui me plaît et que je mange aussi ce qui me plaît. Qu’elles ne m’imaginent pas paniquer pour mettre en état la salle de bain après mon bain et celui des autres. Qu’en plus, je n’ai pas à temps plein un bonhomme machiavélique sur le dos et des mioches entre les pattes qui n’arrêtent pas de se chamailler, ou qui sautent dans tous les sens en tirant avec eux le fond de tous les tiroirs qu’ils trouvent sur leur passage. Que ma maison doit certainement être bien propre et rangée et que je n’y trouve pas traîner tous les jouets et biscuits de la planète. Et qu’enfin, je dois faire des tas d’envieux au boulot tellement j’ai la mine sereine, sans inquiétude d’avoir à partager injustement ce que je gagne. Ce sont ces amies-là que j’embrasse, parce que leur discours approfondit mes convictions. Je suis triste pour elles, mais heureuse pour moi et le resterai pour un grand nombre d’années encore, inch Allah!».
Je suis triste pour elles, mais heureuse pour moi et le resterai pour un grand nombre d’années encore, inch Allah!». Tout est dit !!! LOL LOL LOL A BON ENTENDEUR
bravo et bonne continuation. Antoine, quadra célibataire
Vive le célibat ! Que du bonheur !! 🙂