Un satellite au top technologique appartenant à 100% au Maroc ? Au-delà de la divine surprise et du royal cadeau de SM Mohammed VI à son pays, cet évènement –qui n’a pas été fêté comme il se doit- a été ressenti par les Marocains comme une belle revanche sur le passé, autant qu’une assurance pour l’avenir.
Au tout début, la surprise. Totale. Gigantesque. Renversante. De celles qui clouent d’abord au sol, le temps d’en assimiler tous les éléments… Ils tombent en rafale. Et, à mesure qu’on en apprend, on écarquille les yeux. Un Satellite pour le Maroc à lui tout seul ? Le contrat passé en 2013 ? Le secret gardé toutes ces années ? Un avantage militaire pour la surveillance des frontières ? Un avantage tout court pour tout ce à quoi sert un satellite d’observation ?! De l’état d’hébétude, on passe à celui d’euphorie. Waw ! Le citoyen marocain n’a alors plus de mots pour qualifier l’évènement, qui fait faire des bonds au plafond… Coup de maître… Coup de génie… Top du Top… Cadeau royal de reconsidération (rad al Iâtibar) offert à tous les Marocains !
C’est que le citoyen marocain en en avait accusé des coups en silence, impuissant devant l’arrogance des uns, le bellicisme des autres…
Entre autres avantages du Satellite (voir suite du dossier), le Maroc pourra désormais avoir sa propre information sur tout ce qui concerne ses frontières, ainsi que tous éventuels mouvements, militaires ou mafieux, dans les zones et espaces environnants. C’est un avantage incontestable sur tout le voisinage.
Deux pays, en particulier, viennent à l’esprit.
D’abord, l’Algérie, où le pouvoir et ses généraux, grisés par la rente pétrolière, ont passé plus de 40 ans à se surarmer… Pour découvrir aujourd’hui qu’ils se sont dotés d’armement devenu en grande partie inutile, vu l’évolution du monde et des moyens d’autoprotection autrement plus intelligents… Et ce, au lieu de construire au peuple algérien un pays à la hauteur de ses richesses nationales et répondant à ses besoins.
Avec ce Satellite, le Roi du Maroc vient de donner à ces dirigeants-va-t-en-guerre une petite leçon d’humilité.
Il y a également le voisin du nord, l’Espagne, grande puissance européenne qui ne dispose pas d’un satellite à son usage exclusif. Juste une infime participation (2,5%) dans le programme satellitaire français «Helios» (où la Belgique, l’Italie et la Grèce, ont également une participation mineure).
Certes, l’Espagne entretient actuellement d’excellentes relations avec le Maroc ; et il y a fort à parier que, si le gouvernement de Madrid avait besoin du satellite Mohammed VI, le Maroc qui a mis en partage avec l’Espagne de nombreux programmes sécuritaires, ne rejetterait pas la demande… Mais les gouvernements de Madrid changent… Et les Marocains qui n’ont pas oublié l’incroyable armada espagnole (sou marins compris) mise en route par l’ex-chef de gouvernement, José Maria Aznar, en direction du minuscule îlot Leïla où broutent deux chèvres, pour en déloger une poignée de Marocains, se sentent aujourd’hui, quelque peu réhabilités dans leur amour-propre.
Quant aux séparatistes du Polisario, ils peuvent bien rêver de provocations à Guergarate ou ailleurs, aux frontières de la Mauritanie ou dans les sables du Sahel. Désormais, l’œil du Satellite ne les quittera plus.
La nuit du lancement…
Il y avait donc plus d’une raison pour faire de la nuit du lancement du satellite (nuit du mardi au mercredi, à 01h 42min GMT) une nuit exceptionnelle, au niveau national.
On imaginait toutes les chaînes de télévision mobilisées, les responsables du gouvernement, des partis politiques et de la société civile, invités à suivre et commenter l’évènement sur les plateaux de télévision, les citoyens associés aux débats, ou du moins à l’effervescence générale… Un peu à l’image d’une nuit électorale…
On imaginait même un ou deux membres du gouvernement présents sur le site de Vega, à Kourou (Guyane française) d’où a été lancé le satellite… Voire, seulement reliés en visioconférence avec la salle où se trouvaient les ingénieurs en charge du programme et la délégation marocaine et d’où arianespace retransmettait les images du lancement… L’évènement en valait bien la peine…
Mais le Maroc a joué la modestie. En dehors des médias qui n’en reviennent toujours pas de voir le Maroc doté d’un tel satellite, les responsables ont eu le triomphe modeste.
Les citoyens, eux, hallucinés par l’intelligence de cette initiative royale et le secret qui l’a entourée, ont fébrilement suivi la retransmission du lancement du satellite Mohammed VI – A, en direct et à la source, c’est-à-dire, sur le site de Arianespace.
Aucune miette n’en a été perdue… Depuis le compte à rebours, suivi du lancement de la fusée Vega porteuse du satellite, suivi des différentes étapes de séparation, suivies de la dernière extinction de feu et de la mise en orbite… Jusqu’à cette phrase de l’ingénieur-commentateur de l’opération, qui a rompu le silence religieux dans lequel était plongée la salle… La phrase magique: «Lancement terminé, trajectoire normale, séparation réussie».
…Et même plus. Car, après cette phrase, il y a eu les émouvantes congratulations échangées entre les membres de toutes les parties chargées de ce projet, heureux du succès de la mission ; puis les allocutions prononcées par les représentants de Arianespace, Thalès ; par le chef de la délégation marocaine, Karim Tajmouati ; ainsi que par tous les concernés qui avaient un mot à dire, à ce sujet, cette nuit-là.
Allocutions pour rappel de quelques informations techniques, remerciements, appréciations professionnelles… Le tout dans une concision exemplaire.
Lorsque l’écran de Arianespace s’est éteint aux alentours de 3h 20 du matin, il était difficile de trouver le sommeil, tant l’émotion et la fierté étaient grandes.
Pour un coup, SM Mohammed VI a bel et bien réalisé un coup de maître !
Et si le satellite provoque rage et inquiétude ailleurs ; au Maroc, il inspire admiration et profonde gratitude pour ce coup de génie royal.
Bahia Amrani
Le projet, pas à pas… Après 4 années passées sur terre, le Satellite Mohammed VI-A a été envoyé dans l’espace à l’aube du mercredi 8 novembre. C’est à 01h42min31s, très précisément, que le compte à rebours a été commencé. Une fusée Vega a mis le satellite sur orbite héliosynchrone (SSO). Ainsi qu’il est rapporté dans la fiche technique de Arianespace, 6mn et 35s après le décollage, les trois premiers étages de Vega ont été séparés du satellite. Ensuite, le troisième étage du lanceur s’est séparé du composite supérieur, Puis, l’AVUM a allumé une première fois le moteur pendant plus de 7min, avant une phase balistique d’une durée de 37 minutes environ. L’AVUM a allumé une deuxième fois le moteur pendant 1 minute et 50 secondes environ avant de séparer le satellite MOHAMMED VI – A, près d’1minute et 30 secondes après son extinction. Le satellite MOHAMMED VI – A a été séparé, avec succès, 55 minutes et 33 secondes après son décollage. Le satellite a été réalisé par le consortium Thales Alenia Space et Airbus pour le compte du Maroc qui a conclu, à cet effet, un contrat avec la France, sous la présidence de François Hollande, pour une somme totale de 500 millions d’euros. A partir de ce 8 novembre, ce sont les équipes marocaines, représentées à Arianespace par Karim Tajmouati, qui prendront les commandes pour orienter les missions du satellite.