Ahmed Ouayach, Président de la COMADER

«Voilà comment le secteur de l’agriculture évolue au Maroc»

Ahmed Ouayach, Président de la COMADER
 Comment évolue, aujourd’hui, le secteur de l’agriculture au Maroc?

Le secteur de l’agriculture évolue favorablement. Comme vous le savez, aujourd’hui, le Plan Maroc Vert (PMV) a terminé sa première phase qui correspond à dix ans. La majorité des objectifs de ce plan ont été atteints. Il faut souligner que ces objectifs sont le fruit d’une longue restructuration. D’abord, au niveau des outils de production et également au niveau des instruments de la nouvelle politique, engagée en 2008 sous le Haut patronage de SM le Roi. S’agissant des outils, il y a lieu de rappeler la création de nombreux organismes étatiques. A savoir, notamment, l’Office National de Sécurité Sanitaire des produits Alimentaires (ONSSA) qui s’occupe de la sécurité sanitaire. Une question qui devient de plus en plus d’actualité. De même, il y a eu la création de l’Agence pour le Développement Agricole (ADA), laquelle a engagé la première opération du PMV. Cette opération, qui portait sur le partenariat public-privé autour des terres SODEA et SOGETA, a été une réussite. Les objectifs ont été atteints et le volume des investissements étatiques était extrêmement moins important. C’est le privé qui investit et, bien entendu, l’Etat est là pour l’inciter à investir à travers, notamment, les subventions qui lui ont été accordées. Ces terres sont, aujourd’hui, mieux gérées et mieux mises en valeur. Avec des conséquences très positives, notamment en ce qui concerne la création de l’emploi. Par ailleurs, il convient de souligner qu’il y a eu également la création de l’Office nationale du Conseil agricole (ONCA) qui est aujourd’hui opérationnel. Côté «Recherche Développement» et «Organisations professionnelles», je dois d’abord rappeler que ce sont les deux grandes actions qui ont conduit l’Europe à moderniser son agriculture après la 2ème Guerre mondiale. Au Maroc, sincèrement, nous n’avons rien inventé. Nous avons vu ce qui a marché en Europe et nous l’avons adapté aux conditions marocaines. C’est tout à fait normal. Avec l’ONCA, l’Institut agronomique et vétérinaire Hassan II, l’Ecole de Meknès et les centres de recherches qui existent aujourd’hui un peu partout, nous assistons à une nouvelle impulsion pour la recherche agronomique; sachant que la recherche privée est très importante en matière de création de variétés végétales et également au niveau de l’amélioration génétique animale.

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Les produits phares exportés restent les agrumes et les tomates. Comment, aujourd’hui, se positionnent les exportations marocaines sur les marchés internationaux?

Au moment du lancement du PMV, les agrumes et les tomates étaient, en effet, les deux produits phares. Mais aujourd’hui, on est bien loin de ce schéma. Car, on a diversifié notre offre exportable, aussi bien en produits qu’en destinations. Cela figure d’ailleurs parmi les objectifs du Plan Maroc Vert. A noter que les agrumes et la tomate se partagent pratiquement les 90%, pour ne pas dire plus. Au niveau maraîchage, nous avons aussi diversifié notre offre exportable. Pour certains produits, comme les haricots verts, par exemple, le Maroc est parmi les grands producteurs, sachant que la diversification concerne plusieurs autres produits, à savoir notamment la tomate cerise, les poivrons, les melons, la courgette, etc. N’oublions pas que le Maroc était parmi les pourvoyeurs en légumineuses alimentaires pour tout le pourtour méditerranéen. C’est une position que nous avons perdue et il est très difficile de revenir sur le podium. Mais ce n’est pas  impossible. Au niveau de l’arboriculture fruitière, on a également diversifié notre offre exportable. On a une part extrêmement importante pour la clémentine et Nador cott qui est une variété exclusivement marocaine, bien qu’il y ait encore quelques petits problèmes à régler. Du côté des fruits rouges, il y a aussi de nouveaux produits qui sont exportés par le Maroc et je dois dire que c’est une réussite. Le Maroc devient même un concurrent à prendre au sérieux par nos concurrents directs, notamment l’Espagne. On peut dire qu’on offre un plateau assez diversifié pour nos consommateurs européens et aussi aux Marocains.  

Par ailleurs, avec l’arrivée de l’ADA, il y a des produits labélisés qui commencent à paraître (Mejhoul, l’huile, etc.). Là aussi, les choses commencent à se développer. Il y a également diversification au niveau d’une nouvelle niche, notamment en ce qui concerne les produits de l’argan (huile d’argan et produits cosmétiques). Et puis, il y a un secteur qui n’est malheureusement pas encore organisé. Il va constituer une niche extrêmement importante pour l’année prochaine. Il s’agit du secteur des plantes aromatiques sur lequel la COMADER (Confédération marocaine de l’agriculture et du développement rural) va également axer ses efforts. Nous sommes d’ailleurs en train d’examiner la manière d’améliorer les choses, en ce qui concerne cette filière.

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Aujourd’hui, il y a une inquiétude qui est prise en compte dans l’action des autorités sanitaires, notamment à l’Union européenne: l’utilisation des pesticides dans l’agriculture. Au Maroc, cette année, plusieurs affaires ont fait la Une des journaux, concernant certains produits qui contiendraient beaucoup de pesticides. Qu’en dites-vous?

La prise de conscience est là. Elle existe et, en plus, il y a des lois. Les pollueurs doivent normalement passer à la caisse. Malheureusement, ces lois ne sont pas appliquées, mais il convient de souligner que c’est en voie de l’être. Ceci dit, nous pouvons dire, sans risque d’être contredits, qu’il y a des efforts qui ont été faits, notamment au niveau de la fertilisation, de l’utilisation des produits et du respect de l’environnement. Il y a une sensibilisation à ce niveau. Toutefois, on ne peut pas dire que l’erreur zéro existe. Aujourd’hui, à l’UE, on s’oriente vers zéro pesticide. Les lois vont donc changer et, croyez-moi, quand les lois changent un peu partout, nous sommes obligés de suivre. Car, lorsqu’on change les lois européennes, c’est le consommateur européen qu’on veut protéger des produits, quelle que soit leur origine, qu’ils viennent de chez nous ou d’ailleurs. Cela veut dire aussi que c’est un savoir-faire qu’il faut mettre en place. A noter, enfin, que la majorité de ces produits chimiques sont importés. Ils coûtent donc chers et si on peut les réduire, cela contribuera à baisser le coût de la production. Encore faut-il qu’on puisse produire plus, mieux et d’une manière propre. C’est cela le défi de demain.

Entretien réalisé par Naîma Cherii

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