Pour qui, la patate chaude ?

Comme dit un proverbe marocain: «quand les soucis atteignent un trop haut niveau, ça devient cocasse» (Ketret el hemm katdahhak).
Ce qui nous fait rire cette semaine ? Ce sont les attitudes et réactions en chaine, face à la hausse des prix à la pompe qui est effective au Maroc depuis le 16 septembre à 0 heure.
D’abord, l’attitude incompréhensible du gouvernement. Non seulement il a commencé à expliquer cette décision (d’indexer, partiellement, les prix des carburants au Maroc sur les cours mondiaux) 5 jours seulement avant sa mise en application, alors que la décision avait été prise à la mi-août. Mais les explications ne sont même pas complètes, puisque les détails de la décision ne sont pas encore au point (ils sont en cours de finalisation, comme l’a expliqué le ministre des Affaires générales à la presse).

Et, en plus, après avoir tenté d’apporter les premiers éléments d’éclairage, au Parlement, à la presse et au patronat (chacun séparément) sur le pourquoi de la décision d’indexation, le ministre des Affaires générales, Najib Boulif, s’est éclipsé cédant la place au ministre du Budget, Driss El Azami qui a tenté de rassurer syndicats et consommateurs sur les mesures d’accompagnement, avant de devenir plus discret à son tour. Tandis que le chef de gouvernement, Abdelilah Benkirane, observe un silence étrange (il aurait lui-même été surpris que le décret qu’il a signé mi-août ait été appliqué dès le 16 septembre)… Silence aussi du reste des alliés de la majorité gouvernementale, d’ailleurs. Mais l’on peut comprendre que, pour eux, il n’y a aucune urgence à endosser et défendre une décision impopulaire pour laquelle ils n’auraient même pas été consultés.
Alors, pour qui la patate chaude ?
Au Maroc, tous les acteurs politiques savent que le coût de la compensation coule le budget de l’Etat. Que, plus le prix des carburants grimpe à l’international, plus la facture enfle pour le pays. Que c’est ainsi que le déficit du budget de l’Etat ne cesse de se creuser. Et qu’il n’est plus possible de continuer ainsi.
Mais tous les acteurs politiques savent aussi que la moindre décision en la matière aurait un impact sur le pouvoir d’achat des bourses les plus vulnérables (celles des démunis, mais aussi de la classe moyenne, aujourd’hui largement fragilisée). D’où le report, de législature en législature, de la réforme de la compensation. Ce gouvernement a pris le taureau par les cornes, parce qu’il n’avait plus le choix, c’est tant mieux. Mais, son chef de file, le PJD, ne semble pas avoir mesuré à sa juste valeur la sensibilité de la question. S’il l’avait fait, il aurait accordé beaucoup plus d’importance à la concertation. Il aurait associé tous les acteurs à la décision qu’il vient de prendre. Les politiques en auraient débattu publiquement et les citoyens auraient suivi le débat. Cela aurait préparé tout le monde à la décision finale…
Au lieu de cela, les partis de l’opposition et les syndicats sont montés au créneau pour fustiger le gouvernement, jouant l’indignation, l’incompréhension, voire l’étonnement. Leurs déclarations avaient ceci de cocasse qu’elles étaient identiques à celles des citoyens Lambda qui, eux, tombaient réellement des nues, exprimant dans les micros-trottoirs leur total désappointement.
Le représentant de l’Istiqlal déclarait même sur les ondes de la radio que toute augmentation de prix était une ligne rouge… Parti de l’Istiqlal qui, il y a 2 mois encore, était au gouvernement –et y était depuis des décennies- validant toutes les hausses décidées alors…
Tout cela sera certainement moins risible si ces partis et syndicats s’avisaient d’exprimer concrètement leur opposition en mobilisant la rue. Ce qu’ils menacent de faire…
Ne parlons même pas de ce que sera la réaction à la hausse des prix à la pompe qui interviendra inévitablement le 16 octobre, puisque la décision d’indexation s’applique rétroactivement aux hydrocarbures achetés pendant les 4 mois précédant la décision et que pour les deux derniers mois, les cours mondiaux s’étaient envolés dans la crainte de frappes contre la Syrie…
Il est donc urgent que le gouvernement réagisse. Un énorme travail de persuasion est à accomplir, ou de vraies menaces planeront sur la paix sociale.

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