(De g. à d.) Saâd-Eddine El Othmani et Nabil Benabdallah
L’alliance scellée entre le Parti de la Justice et du Développement (PJD) et le Parti du Progrès et du Socialisme (PPS), risque de tomber à l’eau.
En 2011, après avoir remporté les élections législatives anticipées, sans avoir une majorité réelle, le Parti de la Justice et du Développement (PJD), devait se trouver des alliés politiques pour former son gouvernement. L’une des formations politiques ayant accepté d’intégrer l’Exécutif a été le Parti du Progrès et du Socialisme. Malgré son référentiel complètement à l’opposé de celui du PJD, le parti du livre, dirigé depuis 2010 par Mohamed Nabil Benabdallah, a justifié son adhésion au gouvernement par son désir de servir le pays et la nation. Néanmoins, force est de constater qu’aujourd’hui, l’alliance contre nature entre ces deux formations politiques, qui a déjà plus de sept ans, montre des signes d’effritement sur fond de crise entre la Lanterne et le Livre.
La goutte qui a fait déborder le vase
A l’origine du malentendu: l’annonce de la suppression du secrétariat d’Etat chargé de l’eau, dirigé jusqu’au 20 août 2018 par l’une des membres du Bureau politique du PPS, Charafat Afailal. L’absorption dudit secrétariat d’Etat par le ministère de l’Equipement, du Transport, de la Logistique et de l’Eau, avec à sa tête un ministre du PJD et la manière avec laquelle Afailal a été éjectée du gouvernement, n’ont apparemment pas été appréciées par le PPS qui a fini par hausser le ton en tenant Saâd-Eddine El Othmani, le chef du gouvernement, pour premier responsable de cette situation.
En effet, le 20 août 2018, le Cabinet royal avait annoncé que «SM le Roi a bien voulu donner son approbation à la proposition du chef de gouvernement portant sur la suppression du secrétariat d’Etat chargé de l’Eau auprès du ministère de l’Equipement, du Transport, de la Logistique et de l’Eau».
Considérant, ainsi, que le limogeage d’Afailal, qui s’est fait sur proposition de Saâd-Eddine El Othmani, ne doit pas passer sous silence, le Bureau politique du Parti du Progrès et du Socialisme (PPS) s’est réuni en urgence, mardi 28 août 2018. A l’issue de cette réunion, le PPS a exprimé sa «surprise quant à la manière et la méthode avec lesquelles le chef de gouvernement a géré cette question; puisque ni le parti, ni la secrétaire d’Etat concernée n’ont été informés de cette proposition». Le parti a également exprimé son «incompréhension quant à la signification de cette proposition qui a concerné uniquement le secteur de l’eau, sans prendre en considération les constantes politiques et déontologiques nécessaires en matière de gestion des alliances et des relations au sein de toute majorité gouvernementale mûre».
Sur la base de ces éléments, le Bureau politique du PPS a annoncé la tenue, le 22 septembre prochain, d’une réunion extraordinaire de son Comité Central, pour «approfondir l’analyse de la situation et adopter la position qui s’impose».
De son côté, le Parti de la Justice et du Développement (PJD) a décidé de réunir, le 15 septembre 2018 à Rabat, son Conseil National (CN) en session extraordinaire. Inscrite dans le cadre des préparatifs de la rentrée politique, cette réunion sera l’occasion de débattre de plusieurs sujets d’actualité, dont la crise avec le PPS après le départ de Charafat Afailal du gouvernement.
Si certains estiment que le PPS entendra les voix qui l’appellent à quitter le gouvernement, d’autres pensent que le parti du livre fera le dos rond en attendant que la tempête passe et en espérant des jours meilleurs.
En attendant d’y voir plus clair, le suspense demeure entier. Affaire à suivre…
Mohcine Lourhzal
2 hypothèses La curieuse et brusque suppression du secrétariat d’Etat chargé de l’Eau, induisant le départ de Charafat Afailal, ouvre la voie à plusieurs explications. Cependant, deux cas restent plausibles et logiques. Le premier concerne un probable rapport accablant de la Cour des comptes qui serait à l’origine de cette décision. Le deuxième serait dû au fait que le ministre l’Equipement, du Transport, de la Logistique et de l’Eau, Abdelkader Amara, aurait présenté un compte rendu défavorable à Afailal; l’objectif étant de trouver des arguments à même de renforcer au maximum ce qu’il a proposé au chef de l’Exécutif, en l’occurrence, la suppression de ce département. Questions à… Mohamed Zineddine, professeur de droit constitutionnel «Une nouvelle crise de la majorité se profile à l’horizon» A la suite de la suppression du secrétariat d’Etat chargé de l’Eau et le limogeage de Charafat Afilal, le Parti du progrès et du socialisme (PPS) a publié un communiqué bouillant, pour exprimer son mécontentement. Sommes-nous face à une crise entre le PJD et le PPS? En effet, une nouvelle crise de la majorité se profile à l’horizon. Cette situation confirme l’absence de confiance entre ces deux organisations politiques, surtout après le départ du gouvernement de Nabil Benabdallah et de Lahoucine Louardi (Ndlr: anciens ministres respectivement de l’Habitat et de la Santé). Le Comité Central du PPS se réunira en session extraordinaire, le 22 septembre 2018, pour décider des suites à donner à cette affaire. Un éventuel départ du parti de la coalition est-il envisageable? Tout dépendra de la décision que prendra le Comité Central du parti, lors de sa session extraordinaire. Cela dit, le chef de gouvernement tentera, par tous les moyens, de convaincre le PPS de rester dans la majorité. Saâd-Eddine El Othmani n’a d’autre alternative que de ménager les composantes de son équipe gouvernementale. Le communiqué du PPS, après la suppression du secrétariat d’Etat chargé de l’Eau et le départ de Charafat, dénote un manque de confiance, du PPS en le chef de gouvernement, Saâd-Eddine El Othmani.
Propos recueillis par: ML