Sahara : Horst Köhler se retire. Et après ?

Sahara : Horst Köhler se retire. Et après ?

Ainsi donc, ce 22 mai 2019, l’Envoyé personnel du Secrétaire général des Nations Unies pour le Sahara, l’Allemand Horst Köhler, a démissionné de ses fonctions.

Depuis cette démission, deux grandes questions sont posées.

D’abord, pourquoi ce retrait ?

Ensuite, qu’est ce qui s’en suivra ?

En ce qui concerne la 1ère question, la raison avancée officiellement (annonce faite par l’ONU) est que Horst Köhler aurait démissionné de son poste «pour raisons de santé».

Ce à quoi personne ne croit vraiment.

Mr Köhler est certes âgé de 76 ans, mais, aussi bien en décembre 2018 qu’en mars dernier (2019), lorsqu’il avait réuni le Maroc, l’Algérie, le Polisario et la Mauritanie, en Suisse, il assumait ses fonctions avec un incontestable dynamisme. Et à l’issue de la 2ème table ronde, il avait déclaré que les positions des parties demeuraient «fondamentalement divergentes», mais il prévoyait une 3ème rencontre cet été.

Si l’on exclut, même partiellement, les «raisons de santé», que se serait-il passé d’autre ?

Un jour, peut-être, l’intéressé le dira.

Mais en l’absence de véritables explications de sa part ou de celle de l’ONU, chacun y va de son «analyse», voire de ses divagations…

Divagations à la pelle chez les séparatistes du Polisario -eux qui s’étaient échinés à faire de l’Envoyé personnel un allié (comme ils l’avaient fait avec Christopher Ross)- et qui expriment aujourd’hui leur désarroi en allant chercher les causes de cette démission dans des complots internationaux imaginaires.

Dans ces élucubrations, la France est accusée de nourrir de douteux desseins et l’affaire du Sahara est présentée comme un enjeu géostratégique majeur que se disputeraient Paris et Washington, en vue de faire main basse sur l’Afrique… Excusez du peu !

Le Maroc, bien sûr, se voit réserver une part léonine dans les accusations attribuées aux uns et aux autres.

La page Köhler est désormais tournée

Or, s’il est certain que le Maroc, qui défend avec force son intégrité territoriale, a réagi fermement, chaque fois que le dossier du Sahara menaçait de sortir des paramètres fixés par l’ONU, c’est que le Polisario et ses mentors algériens n’ont manqué aucune occasion de créer des tensions autour de ce dossier. Surfant tantôt sur la question des droits de l’homme, tantôt sur celle des ressources naturelles, ou encore sur celle des zones tampons, ils ont fait en sorte qu’il n’y ait pas de pourparlers sereins autour d’«une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable», tel que recommandé par toutes les résolutions du Conseil de Sécurité, depuis 2007. Et continuant, parallèlement, à s’accrocher à la solution du referendum qui a déjà été tentée, sous l’égide de l’ONU, sans succès.

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A qui imputer donc l’échec de Horst Köhler ? Avait-il ses propres inclinaisons qui auraient été contrariées ? A-t-il fait erreur sur la nature de sa fonction qui est celle d’être «un facilitateur», ce qui ne lui permet d’imposer aucune solution, à quelque partie que ce soit ?   Comptait-il sur des appuis qui lui ont fait défaut, ou sur des moyens qu’il n’a pas pu mettre en œuvre ? A-t-il dû faire face à des pressions ? …Ou un peu de tout cela à la fois ?

Le fait est que la page Horst Köhler est désormais tournée.

Les objectifs de l’administration Trump

Reste à savoir quels développements connaîtra le dossier du Sahara, maintenant ? La 1ère réponse attendue est celle de l’identité du successeur de Horst Köhler. Une règle semble être de mise concernant ce poste, où alternent diplomates américains et européens. D’où certaines supputations selon lesquelles le prochain Envoyé personnel du Secrétaire général des Nations Unies pour le Sahara, serait un Américain. Mais la nationalité n’est pas tout. Quoiqu’il en soit, les Etats Unis ont toujours eu la haute main sur ce dossier. Ce qu’il serait intéressant de savoir, c’est avec quelles intentions viendra le nouvel Envoyé personnel ? Selon certaines thèses, l’administration Trump aurait pour objectif de mettre un terme à des conflits qui auront trop duré, tels que le conflit israélo-palestinien, ou celui du Sahara. Concours de circonstance (ou pas), les deux conflits se retrouvent liés dans le contexte international actuel.

En effet, l’administration Trump, qui a prévu d’organiser une conférence à Manama, capitale de Bahreïn, les 25 et 26 juin, pour dévoiler le volet économique du plan de paix israélo-palestinien qu’elle compte proposer ; et qui est censé «encourager le soutien à des investissements et initiatives économiques potentiels qui pourraient être rendus possibles par un accord de paix», selon la Maison Blanche ; cherche des appuis côté pays arabes.

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Le gendre du Président américain au Maroc

Dans cet objectif, le gendre et conseiller principal de Donald Trump, Jared Kushner, est arrivé au Maroc, mardi 28 mai, accompagné d’un autre conseiller du Président américain, Jason Greenblatt. Ils ont été reçus par SM Mohammed VI et partagé avec le Roi, son Conseiller Fouad Ali Al Himma et le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, un «Iftar» (repas de rupture du jeûne).

Les discussions qui ont eu lieu, à cette occasion, ont porté «sur le renforcement du partenariat stratégique ancien, solide et multidimensionnel entre le Maroc et les Etats-Unis, ainsi que sur les évolutions et les développements que connaît la région de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient», a-t-il été annoncé.

Le Maroc –dont le Roi préside le Comité Al Qods- est ainsi sollicité pour appuyer le plan américain, sachant que les Palestiniens refusent toute médiation américaine dans le conflit qui les oppose aux Israéliens, depuis que Donald Trump a transféré son ambassade à Al Qods (Jérusalem).

Et ceci, au moment où le dossier du Sahara est en attente d’un nouvel Envoyé personnel de Gutteres, lequel –selon 90% des chances- serait américain… Tout est dit.

Quelle réponse du Maroc a pu avoir le gendre du Président américain, qui a, soit dit en passant, une certaine autorité sur John Bolton ?

Les entretiens semblent, en tout cas, s’être bien déroulés. Si l’on tente d’interpréter le Tweet du Conseiller Greenblatt, posté le soir-même de la rencontre et de l’«Iftar ». Dans ce Tweet, le Conseiller du Président Trump a loué la «sagesse» de «Sa Majesté le Roi Mohammed VI», ajoutant que «le Maroc est un ami important et un allié des Etats-Unis».

Bahia Amrani

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