Tout phénomène est, au début, en germe puis finit par devenir une réalité. Amorcé à la fin des années cinquante, le départ des Marocains vers l’étranger a pris des proportions considérables à partir des années soixante-dix, jusqu’à aujourd’hui.
D’abord limitée aux ouvriers destinés aux mines françaises, puis aux secteurs du bâtiment et de l’industrie, la migration des Marocains a concerné, au départ, des contingents de quelques milliers de travailleurs. Cette migration, voulue et organisée par la France en premier lieu, puis par d’autres pays européens (Belgique, Hollande, Allemagne…), s’est rapidement étendue à l’ensemble des pays du vieux continent. D’une migration temporaire et limitée, originaire de certaines régions du Maroc, comme le Souss et l’Oriental, le mouvement a été généralisé à l’ensemble des régions du Royaume et a pris, progressivement, le caractère d’une émigration dite d’installation définitive. Le regroupement familial a consacré cette tendance. Aujourd’hui, on estime à plus de quatre millions, le nombre de Marocains installés à l’étranger. Ces derniers, sont établis dans plus de 100 pays dont la France, l’Espagne, l’Italie, la Belgique, les Pays-Bas, l’Allemagne, les Etats-Unis et le Canada.
Les grandes phases de l’émigration marocaine
Pour mieux cerner la problématique de l’émigration des Marocains vers l’étranger, il est nécessaire de distinguer quatre grandes périodes qui ont marqué ce phénomène. Une première phase, entre 1956 et 1968, a été caractérisée par la mise en place d’un cadre institutionnel et la signature de nombreuses conventions d’immigration entre le Maroc et les pays demandeurs. Une seconde étape, de 1969 à 1974, a accompagné la période de l’explosion migratoire vers l’Europe occidentale, notamment vers la France, la Belgique, la Hollande, l’Allemagne et les pays scandinaves. Une troisième phase, de 1975 à 1989, a fait suite à la montée du chômage sur le vieux continent, durant laquelle l’émigration s’est nettement ralentie devant le verrouillage des frontières, les incitations au départ des immigrés et la montée du racisme dans les pays d’accueil. S’en sont suivies, une intensification des mouvements de regroupements familiaux et l’émergence d’une nouvelle génération d’immigrés Marocains. Dès le début des années 90, l’on assistera au démarrage de la quatrième étape. Durant cette période de la fermeture des frontières, dans le cadre de la politique migratoire restrictive mise en place par les pays européens, l’institution du visa et d’autres conditions sévères visant à réduire au strict minimum le nombre de candidats à l’immigration, de nouveaux débouchés pour la main d’œuvre marocaine sont apparus. Intervient alors le rêve américain ou encore la fuite vers le Canada. Et pour cause? Beaucoup de Marocains, notamment les jeunes couples, se sentent mal dans leur pays et n’y trouvent plus de réponses satisfaisantes à leurs attentes, préoccupations et besoins. Pour certains, c’est surtout la non reconnaissance de leurs compétences et pour d’autres, il y va plutôt de l’avenir de leurs enfants. Le choix des Marocains d’aller vivre au Canada, se justifie aussi par des raisons linguistiques, ce qui correspond à la politique d’immigration dans ce pays, qui encourage l’arrivée des expatriés francophones. Selon une récente étude réalisée au Maroc, le Canada est de plus en plus attractif. 37 % des sondés, souhaitent s’y installer définitivement. En effet, le Canada a l’une des politiques d’immigration les plus positives au niveau international. Il est reconnu comme un pays créant un espace favorable à l’épanouissement et d’insertion sociale et professionnelle des arrivants et de leurs familles.
Face aux politiques gouvernementales inefficaces et sans effets sur l’amélioration des conditions de vie des citoyens, les nationaux continueront fort probablement de rêver de quitter le Maroc. Leur souhait le plus cher, construire un avenir meilleur, loin des structures mentales archaïques accusées d’avoir bloqué l’ascenseur social. Face à cette situation insoutenable, la majeure partie des Marocains sont en quête de nouveaux horizons, prometteurs.
Mohcine Lourhzal
Immigration Déguerpir volontiers Selon une enquête réalisée par le portail de recrutement «Rekrute.com», portant sur les facteurs et leviers de motivation qui poussent les Marocains à quitter le pays, 91% des personnes sondées seraient prêtes à quitter le Maroc et à s’installer à l’étranger. Le Canada figure en tête des pays les plus attractifs dans les classements mondiaux. Il se démarque ainsi des autres pays, comme la France, précise la même étude. Une récente enquête du Cabinet «Sunergia», a fait ressortir des chiffres pour le moins alarmants. En effet, 4 Marocains sur 10 affirment être prêts à quitter le pays si une opportunité venait à se présenter. Ce chiffre témoigne un changement de la perception de l’émigration chez la société marocaine. Auparavant, c’est l’homme qui émigrait à l’étranger. Le plus souvent, la femme restait au pays, pour prendre soin des enfants en attendant que son époux revienne. De nos jours, il semble que la gent féminine soit aussi intéressée par l’aventure de la migration avec l’espoir d’un avenir meilleur.