L’Afrique est au cœur de la diplomatique marocaine et de la stratégie Développement des grands groupes privés nationaux. La visite qu’effectue Sa Majesté le Roi à quatre pays africains, qui commence par le Mali, est une nouvelle preuve de l’implication et de l’engagement du Souverain dans le développement des relations Maroc-Afrique.
La visite revêt plusieurs aspects en fonction des Etats visités. Sur le plan Religieux, par exemple, la visite d’Amir Al Mouminine en Guinée est très attendue. Les relations religieuses séculaires entre le Royaume et une partie du continent sont mises à profit pour affirmer la présence du Maroc. La popularité du monarque se concrétise ainsi par une coopération économique qui sert la cause marocaine dans le dossier du Sahara.
Royale diplomatie
Sa Majesté le Roi Mohammed VI évolue dans un contexte hérité de son père. Feu Hassan II comptait sur trois sphères en Afrique: l’Afrique musulmane, l’Afrique francophone et l’Afrique pro-occidentale. La diplomatie du Souverain vient parfois combler un vide laissé par une diplomatie gouvernementale en léthargie, instinctive et sans planification. Elle a favorisé l’arrivée de champions marocains sur la terre africaine. Certaines entreprises se transforment même en entreprises panafricaines à l’image de la RAM et des opérateurs marocains comme les banques et les promoteurs immobiliers qui tissent leur toile sur le continent africain. Les retombées de la diplomatie royale en Afrique sont de taille sur les plans politique et économique.
Positionnement stratégique
Le Maroc ne veut prendre la place de personne. Il conteste juste la théorie algérienne de l’Etat-pivot qui se traduit par une volonté de mise sous tutelle de toute la région sahélienne. Loin de laisser miroiter une menace armée ou économique, le Maroc s’appuie, de manière de plus en plus assumée, sur la carte religieuse. La décision de ces pays de se tourner vers le Maroc représente, avant tout, un témoignage de l’aura spirituelle d’Amir Al Mouminine et de son engagement constant aux côtés des causes du continent. Un tel positionnement stratégique place tout naturellement le Royaume au cœur des efforts internationaux visant à barrer la route aux groupes extrémistes et terroristes qui cherchent à s’implanter dans le septentrion sahélien. Le Maroc a ainsi un rôle stratégique en tant que défenseur de la stabilité politique des pays africains.
Par ailleurs, cette visite de Sa Majesté au Mali, quelques mois après sa première visite à l’occasion de la cérémonie d’investiture d’Ibrahim Boubacar Keïta, est un signal fort de l’amitié qui lie les deux pays. Elle témoigne également de l’implication du Maroc dans le processus de paix et de démocratisation de ce pays. C’est donc un peu comme un grand frère bienveillant que le Roi Mohammed VI se rend au Mali, première étape de cette nouvelle tournée africaine. Un voyage hautement symbolique, mais qui le sera tout autant en matière de collaboration entre les deux pays.
Les enjeux de la visite royale
Les enjeux de cette visite sont nombreux et très différents. Ils sont d’abord économiques: services aériens, élevage, hôpitaux, électrification, aménagements hydrauliques… Au moins neuf conventions et protocoles d’accord seront signés pendant ce séjour. Ils permettront de renforcer les échanges et la coopération entre le Maroc et le Mali.
Mohamed VI n’arrive donc pas à Bamako les mains vides. Il s’y rend d’ailleurs très entouré, avec une délégation d’une centaine de personnes, dont des ministres et des chefs d’entreprise. Le Maroc compte se positionner sur le marché de la reconstruction du Mali, pour laquelle les bailleurs ont promis plus de trois milliards d’euros.
Les enjeux sont également diplomatiques, avec un objectif très clair: supplanter l’Algérie en devenant le nouveau partenaire privilégié du Mali au Maghreb. Pour cela, Mohammed VI entend jouer sur la fibre religieuse en mettant en avant l’islam malékite partagé par les deux alliés et qui se veut particulièrement tolérant. En novembre dernier, un accord avait d’ailleurs été signé pour la formation de 500 imams maliens au Maroc.
Enfin, le Mali, qui soutenait la RASD (République arabe sahraouie démocratique), s’est aujourd’hui rangé du côté du processus de l’ONU en faveur d’une solution consensuelle concernant l’avenir du Sahara.
De plus, alors que le processus de paix dans le nord du Mali vient d’être relancé, le Roi Mohammed VI pourrait tenter de jouer un rôle nouveau, celui de médiateur entre l’Etat malien et les groupes rebelles.
On sait que le Souverain entretient d’excellents rapports avec le président malien IBK et qu’il a par ailleurs déjà pris langue avec les rebelles touaregs du MNLA. Le rôle du Maroc dans les discussions sur le nord du Mali pourrait donc être amené à prendre de l’importance, même si cet objectif n’est évidemment pas mentionné dans le programme officiel.
L’agenda royal au Mali
Le Roi aura un agenda très chargé lors de sa première étape du périple africain. Au Mali, il s’adressera pour la première fois aux Maliens du haut de leur Parlement pour véhiculer un message de paix et de soutien. Il exprimera ainsi son appui au dialogue entre le gouvernement malien et le mouvement indépendantiste d’Azawad pour une paix durable. Il évoquera aussi la prédisposition du Maroc à accompagner l’économie malienne pour amorcer sa relance et l’étayera par plusieurs conventions de partenariats qui seront signés devant les deux leaders du Maroc et du Mali. Une visite historique en perspective.
Un impact sûr
Plusieurs accords économiques seront conclus dans le cadre de cette tournée royale. Une forte délégation d’opérateurs économiques accompagne le Souverain. La liste a été établie en coordination avec Salaheddine Mezouar, ministre des Affaires étrangères et Miriem Bensalah, présidente de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) qui font partie de la délégation. La liste comprend en effet Othman Benjelloun, président du GPBM, Hassan Bouhemou, président SNI, Anas Houir Alami, directeur général de la CDG, Mohamed Bensalah, PDG de Holmarcom, Said Alj, PDG de Sanam, Abdessalam Ahizoune, président de Maroc Telecom, Driss Benhima, PDG de la RAM, Mohamed El Kettani, PDG d’Attijariwafa bank, Mohamed Benchaaboun, PDG de la Banque populaire, Anas Sefriou, PDG d’Addoha, Mohamed Alami Lazraq, PDG d’Alliances, Ahmed Kabbaj, président de la SGTM, Omar Tazi, président de Sothema, Larbi Bencheikh, DG de l’OFPPT, Mohamed Abdeljalil, directeur de Marsa Maroc, Omar El Yazghi, président du directoire de MEDZ, Abderrafie Zouiten, directeur de l’ONMT, Mostafa Terrab, PDG de l’OCP, Ali Fassi Fihri, DG de l’ONEE, Amina Benkhadra, DG de l’ONHYM, Mustapha Bakkoury, président du directoire de MASEN et Said Ibrahimi, DG de CFC.
Hamid Dades
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Leurs avis, recuillis par Bouchra El Khadir
Si Allal, enseignant retraité
Œuvrer pour la stabilité des pays frères
«Voir un pays frère en train de retrouver sa stabilité, c’est déjà quelque chose qui réchauffe le cœur. Le Maroc, à travers son Roi et son peuple, a la conviction que la stabilité peut contribuer à consolider les institutions, pour un Etat de droit… Car la stabilité reste, comme l’unité territoriale de tout pays, un des piliers d’un avenir meilleur».
Haj Abdelmoughit, commerçant
Renforcer les liens d’amitié et de coopération
«La participation d’une communauté des affaires dans la délégation officielle est très significative. Les enjeux économiques à travers cette tournée font partie de cette visite officielle du Souverain. Surtout qu’il y a déjà des entreprises marocaines qui sont installées dans les différents pays africains visés par cette visite. Mais il n’ya pas que le volet économique qui est intéressant. Depuis des siècles, des relations assez particulières lient le Maroc aux autres pays africains. C’est pour cela, depuis son accession au Trône, que SM le Roi, qui est en même temps Amir Al Mouminine, œuvre pour le renforcement de ces liens d’amitié et de coopération avec les pays africains. C’est pour cela aussi que le Maroc a été sollicité pour former des imams; une formation conforme au rite malékite modéré. Sans oublier l’attachement fort des Africains à la «tariqa» tijania et à celle qadiria.
Driss, universitaire
Le Maroc solidaire
«Sans prétention aucune, je crois que le Maroc est le pays le plus africain des pays arabes, tout en restant lié à l’Europe. Ce qui ne peut être que bénéfique pour l’Afrique. D’ailleurs, malgré un contexte marqué par une conjoncture difficile que connaît l’Afrique, cette visite royale prouve la volonté du Maroc de renforcer sa solidarité avec ces pays frères et partenaires du continent. Comme le dit le proverbe, «c’est dans les moments difficile qu’on connaît les amis»… C’est aussi l’occasion de faire des consultations au sujet de questions d’intérêt commun à un moment où la bande sahélo-saharienne fait face à des défis nouveaux, l’instabilité et le terrorisme notamment »
Rachida, cadre d’entreprise
Tous pour un même avenir
«Tant mieux pour nous si le Maroc peut jouer le rôle de médiateur pour la réconciliation de toutes les composantes de cette grande nation, le Mali. Nous sommes un pays africain et donc beaucoup de choses nous rassemblent avec les autres pays: la proximité, de nombreuses coutumes, la religion, la francophonie… Nous regardons ensemble l’avenir. Un avenir qui est en train de se consolider avec les visites du Souverain, pour une vision à long terme au profit de nos pays respectifs. C’est une révolution sage et mature pour la paix, la stabilité, la dignité et sans exhibition de force; un partenariat Sud-Sud qui est en même temps win-win».
Ahmed, employé dans une agence de voyage
Plus qu’un pays d’accueil
«La décision prise par SM le Roi Mohammed VI en avril 2000, d’ouvrir le marché marocain aux pays africains les moins avancés, dont le nombre s’élève à 34, avec annulation de leurs dettes envers le Royaume, est un geste de confiance et de respect à l’égard de ces Etats. Si on peut faire bénéficier les pays africains du savoir-faire marocain dans certains secteurs, comme l’agriculture, la gestion de l’eau, la pêche, le tourisme, la formation professionnelle, ce sera une bonne chose. Sans oublier l’aide apportée à travers l’accroissement continu du nombre des étudiants africains admis dans les écoles et les instituts supérieurs au Maroc. Ceci est très significatif, surtout quand on sait que le Royaume accueille plus de 8.000 étudiants dans ses établissements supérieurs, dont 6.500 boursiers issus de 42 pays africains».