ONU-Sahara : Pourquoi le Roi a réagi

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Samedi 12 avril, un communiqué du Cabinet Royal indiquait que SM Mohammed VI venait d’avoir un entretien téléphonique avec le Secrétaire Général de l’ONU, Ban Ki-Moon.
Pour les observateurs qui suivent le dossier du Sahara, à partir du Maroc, l’information en elle-même est un voyant rouge qui s’allume.
La teneur du communiqué, qui rapporte les grandes lignes de l’entretien, confirme le voyant rouge. Il y est indiqué que «Sa Majesté le Roi a attiré l’attention du Secrétaire Général sur l’impératif de préserver les paramètres de la négociation tels qu’ils sont définis par le Conseil de Sécurité, de sauvegarder le cadre et les modalités actuels de l’implication de l’ONU et d’éviter les approches partiales et les options périlleuses» ; et que «Tout écart de cette voie serait fatal pour le processus en cours et porteur de danger pour toute l’implication de l’ONU dans le dossier». Les mots -et le ton qui s’en dégage- ne laissent aucun doute. Il y a un problème… Et assez grand pour que le Roi tire personnellement la sonnette d’alarme.
Que se passait-il donc ? Qu’est ce qui avait fait réagir le Roi, d’une façon aussi directe et en même temps solennelle ?

Quelque 48 heures auparavant, jeudi 10 avril, le Secrétaire Général de l’Organisation des Nations Unies, Ban Ki-Moon, adressait son rapport annuel sur le Sahara aux 15 membres du Conseil de sécurité. Rapport dont la présentation au Conseil et la discussion à huis clos étaient prévues pour ce 17 avril, avant que le Conseil ne se réunisse à nouveau, le 23 avril pour voter sa résolution pour l’année 2014.
Or, que dit ce rapport?

La question des droits de l’homme

Le Secrétaire Général de l’ONU y était d’abord attendu sur la question des droits de l’homme. Le Polisario et l’Algérie se mobilisent, depuis quelques années pour élargir le mandat de la MINURSO à la surveillance des droits de l’homme au Sahara. L’année dernière, ils avaient même réussi à obtenir l’appui de l’ambassadrice des Etats Unis auprès de l’ONU. Il avait fallu que le Roi Mohammed VI intervienne auprès du Président Obama pour que l’ambassadrice se rétracte. Le Conseil de Sécurité avait alors appelé le Maroc à garantir les droits de l’homme, notamment au Sahara. Ce à quoi le Maroc a répondu en prenant plusieurs mesures et décisions, tout au long de l’année. Il attendait donc de voir ce qu’en dirait Ban Ki-Moon dans son rapport 2014.
Mais, dans le document distribué cette semaine aux membres du Conseil de Sécurité, Ban Ki-Moon commence par noter «avec satisfaction» les «avancées» réalisées par le Maroc, certes. Il loue les efforts déployés pour consolider le Conseil National des Droits de l’Homme (CNDH) et ses antennes à Laâyoune et Dakhla. Il salue la réforme de la justice militaire qui met fin aux poursuites contre des civils devant des tribunaux militaires. Il se félicite de «la coopération du Royaume avec les procédures spéciales du Conseil des Droits de l’Homme» des Nations Unies, précisant que les autorités marocaines ont «continué de coopérer avec les procédures spéciales du Conseil des Droits de l’Homme et de leur faciliter l’accès» (notamment en matière de traite des personnes et de détentions arbitraires)…
Néanmoins, à la fin, tous ces satisfécits sont balayés d’un revers de main par Ban Ki-Moon qui conclut que l’objectif final reste «une surveillance durable, indépendante et impartiale des droits de l’homme». Ce qui équivaut à un appel à la création d’un mécanisme de surveillance des droits de l’homme. Il est vrai que le Secrétaire Général précise que cette «surveillance durable, indépendante et impartiale des droits de l’homme» devra s’appliquer aussi bien au Sahara qu’aux camps de Tindouf. Mais cela n’atténue en rien l’injustice que ressent le Maroc où, après le Roi, de nombreuses voix se sont élevées pour exprimer la consternation générale.

La théorie des territoires non autonomes

Autre motif du sentiment d’injustice que ressentent les Marocains, Ban Ki-Moon note bien que le Maroc a consenti des investissements considérables «en matière d’infrastructures et dans les secteurs social et culturel», mais cela ne l’empêche pas de pencher du côté des séparatistes et de leurs supporters qui accusent le Maroc d’exploitation illégale des ressources naturelles du Sahara. Et de consigner dans son rapport qu’il est «opportun de faire appel à tous les acteurs concernés pour reconnaître le principe en vertu duquel les intérêts des populations des territoires non autonomes sont primordiaux» (en vertu du chapitre XI de la Charte des Nations Unies, article 73).
Pire encore, cette notion de territoires autonomes est, pour la première fois, mise en avant avec force, par Ban Ki-Moon. Le chapitre XI de la charte des Nations Unies auquel il fait référence est intitulé «déclaration relative aux territoires non autonomes». Et ce n’est pas la seule fois qu’il y fait référence. De façon encore plus précise, Ban Ki-Moon écrit: «Compte tenu de l’inscription du Sahara occidental sur la liste des territoires non autonomes depuis 1963, les efforts de l’Onu, à travers le travail de mon envoyé personnel (Christopher Ross), de mon représentant spécial (Wolfgang Weisbrod-Webe) et de la Minurso, restent d’une forte importance jusqu’à ce que le statut final du Sahara occidental soit défini».
Pour tous les Marocains qui suivent de près ce dossier, il y a là un glissement évident vers une théorie juridique erronée que veulent imposer les séparatistes.
En effet, soutenus par l’Algérie, ils n’ont eu de cesse d’affirmer que le Sahara est un territoire non décolonisé, désignant le Maroc comme «force d’occupation». Or, pour le Maroc (qui a, il est vrai, quelque peu négligé la bataille juridique, ces dernières années, pour se concentrer sur la bataille diplomatique), c’est le gouvernement marocain qui a inscrit le Sahara sur la liste des territoires non autonomes en 1963, alors que ce territoire était colonisé par l’Espagne (et que le Polisario n’existait même pas) ; et la décolonisation a commencé avec le traité de Madrid (1975) et le transfert des territoires. Le processus de décolonisation n’est pas allé jusqu’à la reconnaissance internationale, parce que le pouvoir algérien a instrumentalisé le Polisario qui est venu revendiquer, à la fois, une existence autonome et le territoire qui va avec, bousculant les revendications de décolonisation marocaines qui datent, elles, des années 50 (et sont inscrites dans les archives de l’ONU).
C’est bien pour cela que le Sahara n’a jamais été considéré comme un véritable territoire autonome. Et c’est ce que les séparatistes et leurs supporters tentent depuis plusieurs années de rectifier. Toute leur bataille a consisté en cela. Aujourd’hui, ce qu’il apparaît au Maroc, c’est qu’ils ont rallié à leurs thèses les diplomates onusiens. Christopher Ross, d’abord et depuis longtemps, mais aussi le chef de la MINURSO et, cette année, Ban Ki-Moon…

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La solution politique

C’est pourquoi, lorsque dans son rapport, le Secrétaire Général de l’ONU appelle les parties «à reconnaître la nécessité de faire des progrès urgents et à s’engager sérieusement sur les deux questions fondamentales définies par les orientations du Conseil de sécurité», précisant que ces deux questions fondamentales sont «le contenu d’une solution politique et la forme de l’autodétermination»… Lorsque, en même temps, Ban Ki-Moon pose des ultimatums, annonçant une réunion du Conseil de Sécurité qui devra procéder à l’évaluation des dernières démarches de Christopher Ross, en octobre 2014, pour savoir si ces démarches, basées sur les consultations bilatérales et sur les navettes diplomatiques, ont été «fructueuses» ; puis, si aucun progrès n’est réalisé avant avril 2015, son intention d’«engager les membres du Conseil de sécurité à procéder à une révision totale du cadre du processus des négociations qu’il avait fourni en avril 2007»… SM Mohammed VI s’adresse directement au Secrétaire Général, pour clarifier les positions du Maroc, face à tous ces changements…

Réponse royale

Le Roi répond en premier lieu à la question politique, réaffirmant «l’engagement constant et la coopération constructive du Royaume pour parvenir à une solution politique définitive à ce différend régional, dans le cadre de la souveraineté marocaine». Puis il choisit la clarté du propos pour rappeler au chef de l’ONU «l’impératif de préserver les paramètres de la négociation tels qu’ils sont définis par le Conseil de Sécurité, de sauvegarder le cadre et les modalités actuels de l’implication de l’ONU et d’éviter les approches partiales et les options périlleuses», ajoutant que «Tout écart de cette voie serait fatal pour le processus en cours et porteur de danger pour toute l’implication de l’ONU dans le dossier».
Le Maroc pourrait-il se retirer du processus onusien si des «approches partiales» et «des options périlleuses» venaient à le menacer ? La médiation onusienne dans le dossier du Sahara avait déjà connu une suspension de 3 ans entre 2004 et 2007.
De plus, le dossier du Sahara est géré par l’ONU, certes, mais dans le cadre d’un consensus des parties, ce dossier relevant du chapitre VI de la charte des Nations Unies relatif au «règlement pacifique des différends» et non du chapitre VII qui permet des mesures coercitives.
Le rapport sera-t-il amendé pour donner lieu à une résolution consensuelle le 23 avril ? Selon Reuters, deux moutures circulent déjà dans les coulisses de l’ONU, dont une sans «les mécanismes d’observation des droits de l’Homme».
Il faut attendre la réunion du Conseil de Sécurité pour en savoir plus. Un Conseil où le Maroc ne siège plus, son mandat de membre non permanent ayant expiré le 31 décembre dernier ; et qui est présidé par un pays qui compte parmi les plus fervents supporters du Polisario: le Nigéria…
Mais d’autres membres soutiennent le Maroc. Et eux, contrairement au Nigéria, sont permanents et ont un droit de véto.
Le Maroc, pour sa part, est prêt à toutes les éventualités. Le Roi vient de nommer un nouvel ambassadeur représentant permanent du Maroc auprès de l’ONU, Omar Hilale. Nouveau, mais parfait connaisseur des travées onusiennes.

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BA
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Omar Hilale, nommé Représentant permanent du Maroc auprès de l’ONU


SM Mohammed VI a reçu, lundi 14 avril, à Tétouan, Omar Hilale, jusque-là ambassadeur représentant permanent du Maroc auprès de l’Office des Nations Unies à Genève ; et l’a nommé ambassadeur, représentant permanent du Maroc auprès de l’ONU (à New York).
Selon un communiqué du Cabinet Royal, «La nomination de M. Omar Hilal qui intervient sur proposition du Chef du Gouvernement, et à l’initiative du ministre des Affaires étrangères et de la coopération, sera formalisée lors d’un prochain Conseil des Ministres, conformément aux dispositions de l’article 49 de la Constitution».
Omar Hilale est né le 1er janvier 1951 à Agadir.
Depuis novembre 2008, O. Hilale occupe le poste d’ambassadeur, représentant permanent du Maroc auprès de l’ONU à Genève, même poste qu’il a occupé entre décembre 2001 et mai 2005.
Omar Hilale a été aussi Secrétaire général du Ministère des Affaires étrangères et de la coopération entre mai 2005 et novembre 2008.
Titulaire d’une licence en sciences politiques en 1974 à Rabat, M. Hilale a occupé plusieurs postes avant d’assurer entre 1985 et 1991, les fonctions de conseiller, vice-ambassadeur à la mission permanente du Maroc auprès des Nations Unies à Genève.
De 1991 à 1993, O. Hilale a été chef du service de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité à la Direction des organisations internationales du Ministère des Affaires étrangères et de la coopération.
Il a été membre du Cabinet du Secrétaire d’Etat aux Affaires Etrangères et à la Coopération de 1993 à 1996 avant d’être nommé Ambassadeur du Maroc en Indonésie, Singapour, Australie et Nouvelle-Zélande de 1996 à 2001.
O. Hilale a été également en 1993 membre du Comité international des experts légaux chargé de l’application de la Convention interdisant l’usage des armes chimiques, comme il a participé en tant que membre de la délégation marocaine à plusieurs séminaires et réunions régionales et internationales.
Il a été aussi Coordonnateur du groupe africain l’OMPI (2004-2005), Coordonnateur du groupe africain à l’OMC (2003), Président de la Conférence du Désarmement (2004) et préside, depuis 2004, le Conseil d’administration de l’Institut des Nations Unies pour la Formation et la Recherche (UNITAR).

 

Entretien SM Mohammed VI/Ban Ki-Moon


Texte intégral du communiqué du Cabinet Royal

«Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu l’assiste, a eu aujourd’hui un entretien téléphonique avec M. Ban Ki-Moon, Secrétaire Général de l’Organisation des Nations Unies.
L’entretien a porté sur les derniers développements et des échéances en cours, relatifs à la question du Sahara marocain.
A cette occasion, Sa Majesté le Roi a réitéré l’engagement constant et la coopération constructive du Royaume pour parvenir à une solution politique définitive à ce différend régional, dans le cadre de la souveraineté marocaine.
Dans ce contexte, Sa Majesté le Roi a attiré l’attention du Secrétaire Général sur l’impératif de préserver les paramètres de la négociation tels qu’ils sont définis par le Conseil de Sécurité, de sauvegarder le cadre et les modalités actuels de l’implication de l’ONU et d’éviter les approches partiales, et les options périlleuses.
Tout écart de cette voie serait fatal pour le processus en cours et porteur de danger pour toute l’implication de l’ONU dans le dossier.
L’entretien a également porté sur les actions soutenues et les initiatives louables de Sa Majesté le Roi en faveur de la stabilité et du développement du continent africain».

 

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