L’Algérie a enterré mercredi, lors de funérailles dignes d’un chef de l’Etat, le puissant général Ahmed Gaïd Salah, homme fort de fait du pays ces derniers mois, qui s’était imposé au “pouvoir” face à un mouvement populaire massif de contestation.
Exposée toute la matinée au Palais du peuple, bâtiment d’apparat du centre de la capitale, sa dépouille, devant laquelle hauts dignitaires et citoyens se sont recueillis, a pris à la mi-journée le chemin du cimetière d’El Alia.
La dépouille de Gaïd Salah était transportée sur un affût de canon tiré par un véhicule de transport de troupes blindé.
Une foule impressionnante, rarement vue pour des funérailles officielles, attendait massée aux portes du cimetière. La cérémonie était retransmise en direct par la télévision nationale, dont le coin de l’écran, barré de noir, affichait une photo martiale du défunt et un logo en arabe.
Le général Gaïd Salah est décédé lundi quatre jours à peine après l’entrée en fonctions du président Abdelmadjid Tebboune, dont il était réputé proche, élu le 12 décembre lors d’un scrutin massivement boudé par les électeurs et rejeté par le “Hirak”.
Le cercueil a ensuite été mis en terre, devant un parterre de hauts responsables politiques et militaires, dont Abdelmadjid Tebboune, Abdelkader Bensalah, qui a assuré l’intérim après la démission de Bouteflika, le général Saïd Chengriha, qui assure l’intérim du chef d’état-major ou le général Benali Benali, commandant de la Garde républicaine.
Toute la matinée, le cercueil recouvert du drapeau national et entouré de quatre officiers de différents corps d’armée, avait été exposé au Palais du Peuple, ancienne résidence des gouverneurs ottomans bâtie au 18e siècle, devenue lieu de manifestations et cérémonies officielles de l’Etat algérien.
Y reposait sur un coussin le collier de “Sadr” dans l’Ordre national du Mérite, une dignité réservée habituellement aux chefs de l’Etat, à laquelle l’avait élevé Tebboune, lors de son investiture le 19 décembre, dernière apparition publique de Gaïd Salah.
Chef d’état-major de l’armée durant 15 ans (un record), promu en outre vice-ministre de la Défense depuis 2013, Gaïd Salah était apparu ces derniers mois comme le gardien du système au pouvoir face au “Hirak”.
Durant plus de huit mois, il s’est affiché comme le maître du pays, donnant ses instructions à un pouvoir civil éteint depuis la démission d’Abdelaziz Bouteflika, et fut le visage public du haut commandement militaire, plus habitué à exercer son pouvoir en coulisses, derrière une façade civile.
Nommé à ses postes par le président Bouteflika, le Gaïd Salah fut jusqu’en avril d’une loyauté sans faille envers celui qui l’avait fait roi, avant de le sacrifier brutalement.
Son nom était conspué ces derniers mois dans les manifestations, tant pour la répression contre le Hirak que pour son acharnement à organiser “une présidentielle vue par les contestataires comme un artifice permettant la survie du système” dont ils exigent toujours le démantèlement.
Avec AFP