Tous les verrous protocolaires auraient apparemment sauté lors du voyage que Sa Majesté le Roi Mohammed VI a effectué en Tunisie en ce début juin. La visite privée du Souverain et les échos qu’elle a eus, laissent bien comprendre qu’elle avait pour titre «la détente». Une attitude qui s’est répercutée bien avant sur les travaux et les rencontres tenus lors de la visite officielle marquée par la signature d’importantes conventions de coopération et surtout par le discours de Sa Majesté devant l’Assemblée nationale constituante (ANC) de Tunisie.
Les relations maroco-tunisiennes sont au beau fixe et la volonté commune de les consolider et de les développer davantage a été manifestée à plusieurs niveaux, ce qui n’a pas été sans déplaire à certains qui prétendaient le contraire et qui voulaient, à tout prix, n’y voir qu’une terne tentative du Maroc de se mettre au-devant de la scène du Maghreb! Retour sur les différentes étapes de ce voyage et sur tous les points qui ont fait mal ailleurs…
Entre le 30 mai et le premier juin, Sa Majesté le Roi Mohammed VI a effectué une visite officielle en Tunisie. Visite que le Souverain a prolongée, à titre privé. Cette visite, qui entrait dans le cadre de la consolidation et du raffermissement des relations bilatérales entre la Tunisie et le Maroc, avait pour but essentiel d’insuffler une nouvelle dynamique au rapprochement des deux Etats et de capitaliser sur des acquis historiques qui ont toujours marqué les relations entre les deux pays.
La relance économique de la Tunisie, fortement soutenue par le Maroc, était aussi au menu de cette visite que le Souverain a entamée avec l’idée de redonner sens et vie au concept «Maghreb» et à l’UMA en particulier.
Voilà pour le pourquoi…
Au sens du Maroc et de son Souverain, cette visite se veut une marque de soutien du Royaume à la transition démocratique en Tunisie qui va asseoir les bases d’un partenariat politique et économique privilégié entre les deux pays. Ce déplacement royal en Tunisie vient ainsi donner une forte impulsion aux relations de coopération économique entre les deux pays. D’ailleurs, à la faveur de cette visite royale, les échanges économiques et commerciaux bilatéraux vont connaître une nouvelle dynamique avec la conclusion de plus de 20 accords de coopération touchant à des domaines très diversifiés. Il appartient désormais aux opérateurs économiques marocains et tunisiens de créer les synergies nécessaires, le but étant de hisser les relations économiques au niveau des liens politiques exemplaires entre les deux pays, pour que le partenariat maroco-tunisien soit en mesure d’influencer de manière positive le processus d’intégration dans la région maghrébine.
Ce n’est donc pas pour contrer les efforts d’autres Etats, ni pour réagir à un «isolement» -que certains sont seuls à voir- que le Roi du Maroc s’est déplacé en Tunisie. C’est plutôt pour continuer sur des efforts que le Souverain n’a cessé de déployer en faveur d’une solide coopération Sud-Sud. Un atout fort dont dispose aujourd’hui l’Afrique et qu’il faut exploiter à la faveur des intérêts communs.
Le Maroc n’a rien à démontrer quant à la place prépondérante et au rôle primordial qui ont toujours été les siens au «Maghreb». Avec ce pas vers la Tunisie, il entame l’édification d’un Maghreb solidaire. C’est dans ce sens que le Souverain a plaidé pour plus de complémentarité et d’action maghrébine commune et moins d’immobilisme et de blocage, deux aspects d’une situation tant délétère pour l’avenir de la région et l’aspiration de ses peuples à un ensemble régional fort et uni. Une ambition qui ne saurait être, dans la conception royale, l’apanage d’un seul Etat, tant les cinq pays membres de l’Union maghrébine ont grandement besoin de relations bilatérales solides et de projets inclusifs susceptibles de renforcer la position et l’évolution de leur Union, pour qu’elle puisse faire face aux défis politique, économique, social et sécuritaire.
Et voici la réponse du Maroc
Un Maghreb fort, économiquement intégré et en mesure de faire ses choix sur les plans régional et international doit sans conteste reposer sur des rapports bilatéraux tout aussi solides. C’est dans cette perspective que le Souverain place la dynamique des relations maroco-tunisiennes: un puissant levier d’une complémentarité maghrébine «concrète, pratique et réaliste». D’autant que l’émergence d’un ordre maghrébin nouveau, auquel s’en tient fermement Sa Majesté le Roi, n’est plus un luxe ou un choix facultatif pour les pays membres, mais elle est devenue aujourd’hui à la fois «une revendication populaire pressante et une exigence stratégique incontournable».
Le nécessaire déblocage…
Pour diminuer l’importance de la visite officielle de Sa Majesté Mohammed VI en Tunisie, beaucoup de questions ont été soulevées à côté, notamment ce pseudo-malentendu qualifié de «gravissime» et défiant les règles et les us diplomatiques, qui aurait eu lieu entre le Souverain et le président tunisien, ou encore ces rumeurs que le Maroc veut s’imposer sur la scène du Maghreb en «offrant», voire en vendant des «rêves» à la Tunisie, dont le rapprochement avec d’autres Etats de la région gênerait ses intérêts!
Mais, dans son discours prononcé devant l’Assemblée nationale constituante (ANC) de Tunisie, Sa Majesté le Roi n’a pas manqué de rappeler l’engagement pris dans le cadre du traité fondateur de Marrakech, resté hélas lettre morte eu égard aux velléités persistantes de blocage et de fermeture des frontières, à contre-courant de l’Histoire et au grand dam des peuples qui aspirent à l’unité.
Il est donc temps, au sens du Souverain, de passer outre ces blocages qui nuisent plutôt à l’ensemble de la Région et d’œuvrer à surmonter les «écueils artificiels» qui se dressent devant le projet fédérateur des peuples du Maghreb, dont l’émergence nécessite, selon Sa Majesté le Roi, une volonté sincère, un climat de confiance, de dialogue, de bon voisinage et de respect mutuel des spécificités nationales. Le Souverain a appelé à faire du projet de zone maghrébine de libre-échange et de réseaux de connexion intermaghrébins une réalité concrète, dès lors qu’il s’agit de préalables à la création de richesses et d’opportunités d’emploi dont les peuples ont plus que jamais besoin.
En tout, l’appel de SM le Roi en faveur d’un système maghrébin dynamique et intégré puise sa substance dans Sa ferme conviction de la vocation même de l’Union maghrébine au service des justes causes arabes et islamiques, en tête desquelles la cause palestinienne.
C’est dire toute l’urgence pour les pays maghrébins de se rendre à l’évidence et de s’inscrire dans l’air du temps pour que le Maghreb, loin d’être un vœu pieux des peuples de la région, puisse assumer son rôle d’acteur fiable au sein de la Oumma islamique, de l’Afrique et de son environnement euro-méditerranéen.
Avec un tel élan unificateur et une vision constructive qui met en avant l’intérêt commun, toute supposition de visées individualistes ou égoïstes, émanant d’une quelconque crainte d’«isolement», semble bien inappropriée!
Il est clair que, dans sa relation avec la Tunisie, le Maroc, qui n’a plus à faire ses preuves, opte plutôt pour la politique de «la caravane passe…» et qu’il reste convaincu de la légitimité de ses actes et de la teneur bienfaitrice de sa politique régionale montrant qu’avec la Tunisie, ils jettent aujourd’hui, contre vents et marrées, les jalons d’un Maghreb uni, tel qu’il doit être politiquement et historiquement… signifiant aux opposants de ce rapprochement qu’il n’y a pire aveugle que celui qui ne veut pas voir.
Hamid Dades
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UMA : Ce qu’en disent le Maroc et la Tunisie
Le communiqué conjoint maroco-tunisien, rendu public au terme de la visite officielle de SM le Roi Mohammed VI en Tunisie, souligne que les chefs d’Etat des deux pays ont réitéré, lors des entretiens qu’ils ont eus lors de cette visite, leur «détermination à œuvrer avec les autres pays maghrébins frères» afin de tenir le sommet maghrébin, en Tunisie, avant la fin de l’année 2014, conformément aux décisions de la 32ème session du Conseil des ministres des Affaires étrangères de l’Union, tenue le 9 mai 2014 à Rabat.
Ils ont insisté sur la nécessité d’une bonne préparation de ce sommet afin qu’il soit une étape décisive pour donner un nouvel élan à la marche de l’intégration maghrébine vers davantage de complémentarité et de solidarité entre les pays de la région, à travers la réforme du système de l’Union, de manière à permettre l’établissement d’un groupement régional solidaire, fort et agissant dans son environnement arabe, africain, méditerranéen et international, au service des aspirations des peuples du Maghreb à la sécurité, la prospérité et à une vie digne.
Les deux Chefs d’Etat ont de même relevé l’importance qu’ils accordent à la poursuite du renforcement et du raffermissement des liens de fraternité et de solidarité entre les pays maghrébins et à la consécration de la tradition de coordination et de concertation constructive intermaghrébine, à même de consolider les fondements de l’UMA et lui permettre de surmonter les obstacles qui entravent sa redynamisation.
Le communiqué ajoute, d’autre part, que SM le Roi et le Président tunisien, conscients de l’ampleur des défis sécuritaires actuels et des diverses menaces qui guettent la région, à la lumière de l’aggravation du phénomène du terrorisme, du crime organisé transfrontaliers et de l’immigration illégale, ont souligné l’importance d’intensifier la coopération, la coordination et l’échange d’expériences et d’informations entre les organismes compétents des deux pays et de poursuivre les efforts déployés, tant au niveau bilatéral, maghrébin que régional, afin de contenir les répercussions de ces phénomènes dangereux et d’agir en vue de réunir les conditions nécessaires pour assurer la sécurité et la stabilité dans la région.
«Conscients de l’importance du voisinage africain des pays de l’Union du Maghreb Arabe, particulièrement la région du Sahel et du Sahara, et au regard de l’ampleur des défis sécuritaires auxquels les pays des deux régions sont confrontées, les deux Chefs d’Etat ont souligné l’importance de contribuer à la mise en place des fondements du développement durable dans la région du Sahel et du Sahara pour y garantir la sécurité et la stabilité», a ajouté le communiqué. Dans ce sens, ils ont appelé à davantage de coordination pour circonscrire les activités des groupes terroristes et des réseaux du crime organisé.
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Accords : Asseoir les bases d’un partenariat économique solide
Les accords signés entre le Maroc et la Tunisie ouvrent des perspectives prometteuses pour asseoir les bases d’un partenariat économique solide entre les deux pays. Ces accords vont faire avancer la coopération bilatérale de façon à mieux servir les intérêts communs des deux pays. La cérémonie de signature de plusieurs accords de coopération a été présidée, au palais présidentiel de Carthage, par SM le Roi Mohammed VI, accompagné de SAR le Prince héritier Moulay El Hassan et de SAR le Prince Moulay Rachid, et le Président tunisien, Mohamed Moncef Marzouki.
La conclusion de ces accords vient à point nommé pour rehausser le niveau des échanges économiques et commerciaux, qui demeurent en deçà des relations politiques privilégiées entre les deux pays, afin de renforcer le caractère stratégique de la visite royale.
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Marchés de capitaux : BMCE Bank signe une alliance tripartite en Tunisie
Le Groupe BMCE Bank a exprimé sa détermination à développer, conjointement avec la Banque Nationale Agricole tunisienne (BNA) et la Banque de Tunisie, les métiers de marchés de capitaux et de conseil financier, dont l’intermédiation boursière, la gestion d’actifs et le Trading en valeurs du Trésor. Lors du Forum économique Maroc-Tunisie, tenu les 27 et 29 mai à Tunis, le Groupe BMCE Bank a assuré qu’il compte élargir significativement sa présence en Tunisie, au-delà de l’activité qu’il exerce présentement au sein de sa filiale de Banque d’Affaires, Axis Capital. Dans ce sens, un accord de partenariat a été signé à Tunis, portant sur la coopération tripartite, par le PDG de BMCE Bank, Othmane Benjelloun, le DG de la Banque de Tunisie, Habib Ben Saad et le PDG de la BNA, Jaafar Khattech.
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Bourse : Casablanca et Tunis s’allient
En marge de la visite du Roi Mohammed VI en Tunisie, la Bourse de Tunis et celle de Casablanca ont signé un protocole d’accord en vertu duquel les 2 établissements se sont engagées à renforcer les liens de coopération autour de 4 principaux axes. Il s’agit de l’échange d’informations et d’expériences, de la formation et l’assistance technique, de la promotion de la culture boursière et du développement des doubles cotations.
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Action commune : Aider la Libye à relever les défis de la transition
SM le Roi Mohammed VI et le Président tunisien Mohamed Moncef Merzouki ont réaffirmé la disposition du Maroc et de la Tunisie à fournir toutes les formes d’aide et de soutien à la Libye pour relever les défis qu’impose la phase de transition, préserver l’intégrité territoriale et la souveraineté nationale de ce pays maghrébin et garantir sa sécurité et sa stabilité.
Les deux chefs d’Etat ont également exprimé, dans le communiqué conjoint maroco-tunisien rendu public à l’occasion de la visite officielle de SM le Roi en Tunisie, la disposition des deux pays à mettre leur expertise dans tous les domaines à la disposition de la Libye pour l’aider à l’édification des institutions, à la consolidation des compétences et à la réalisation de la réconciliation nationale et de la justice transitionnelle, jusqu’à ce que le peuple libyen réussisse à réaliser ses aspirations.
SM le Roi et le président tunisien, après avoir fait part de leur vive préoccupation face aux derniers événements et leurs répercussions sur la sécurité et la stabilité de la Libye et des pays du voisinage, ont souligné la nécessité de parvenir à une solution politique à la crise libyenne qui mette un terme à l’effusion du sang des frères libyens. Les deux dirigeants ont en outre exprimé leur soutien à l’instauration d’un dialogue national réunissant les différentes sensibilités politiques libyennes afin de trouver une solution politique consensuelle à la crise en Libye.
Cette entente autour de ce point précis n’a pas non plus été sans susciter de vives réactions ailleurs, notamment qu’elle entraverait des efforts déployés par un autre pays de la région «pour normaliser la situation en Libye, la soustraire aux influences islamistes pour l’intégrer dans un axe plus grand qui implique des pays du Sahel saharien». En sommes, on parle bien d’efforts que seul ce pays voit car, concrètement, rien n’a été fait, surtout qu’il est très difficile à un pays qui nourrit le terrorisme régional de lutter contre son implantation.
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Flashs
Le Roi en Tunisie : Les leçons d’une visite
La visite officielle que Sa Majesté le Roi Mohammed VI a effectuée en Tunisie, en réponse à l’invitation du Président de la République tunisienne Mohamed Moncef Merzouki, était pleine de sens, voire de leçons de diplomatie et de politique de rapprochement, de voisinage et de développement commun.
Un citoyen du Maghreb
Si dans un cadre officiel, la dimension sociale et humaine était cernée par des exigences protocolaires, le volet privé de cette visite a eu, à lui seul, beaucoup à montrer sur Mohammed VI, sa popularité, sa modestie et son humanisme, signifiant qu’au-delà de la diplomatie, le Roi du Maroc était l’invité du peuple tunisien. Peuple à la rencontre duquel le Roi est allé, faisant tomber toutes les règles protocolaires…
Un pays au service de l’économie
Sur le plan économique, la visite est l’expression de l’engagement royal pour le renforcement des relations entre les deux pays et la promotion de l’intégration dans la région maghrébine. C’est une preuve concrète que le Maroc servira de «tête de pont» en Afrique pour les investissements tunisiens.
Relations bilatérales et UMA
La visite constitue aussi une opportunité pour renforcer les liens entre les deux pays. Elle donnera un élan aux relations bilatérales et à l’avenir de l’Union du Maghreb Arabe dont il est nécessaire de parachever la construction. D’autant plus qu’elle sera certainement suivie de pas concrets dans les relations entre les deux pays. Le Maroc et la Tunisie partagent des relations stratégiques qu’il convient de mettre à profit dans l’intérêt commun et de les hisser au niveau d’un partenariat exemplaire.
Répondre à tous les besoins
Lors de cette visite, le Souverain était accompagné de 15 ministres et de plusieurs hommes d’affaires et d’opérateurs économiques représentant différents secteurs d’activité. La visite a aussi été marquée par la signature de plusieurs accords de coopération entre les deux pays, qui vont ouvrir de grandes perspectives dans les domaines commercial, financier, industriel et boursier, ainsi que dans le domaine des affaires religieuses, dont l’accord afférent a été qualifié par le ministre tunisien des Affaires religieuses de premier de son genre entre les deux pays dans ce domaine. Ces accords offrent ainsi un cadre structurant pour plus de profit.