Cela faisait quelque temps que l’on n’avait plus parlé de remaniement ministériel au Maroc. Jusqu’à l’an dernier, c’était le jeu favori des Marocains. Les annonceurs de faux scoops faisaient et défaisaient les équipes gouvernementales au gré de leurs fantasmes… Voire de leurs souhaits inavoués.
Mais depuis que, sous la direction de Chabat, l’Istiqlal avait entretenu un suspense de près d’un an sur son retrait ou non de la majorité, ce qui avait nourri, tout ce temps-là, d’interminables supputations sur un nouvel exécutif, tantôt avec des «hommes de Chabat», si l’Istiqlal restait dans la majorité ; tantôt avec de nouveaux ministres du Mouvement Populaire ou d’autres partis de l’opposition, si l’Istiqlal se retirait et que l’un de ces partis acceptait de le remplacer (ce qui s’est finalement produit, le Mouvement Populaire succédant à l’Istiqlal)… Depuis donc la mise en place du gouvernement Benkirane 2, les rumeurs de remaniement, avec leur lot de pronostics farfelus, avaient cessé.
Or, avec le scandale du complexe sportif de Rabat, dont les travaux mal faits ont été découverts lorsque les pluies ont noyé la pelouse, alors que les matches du Mondial des clubs s’y déroulaient, il y a un mois, les rumeurs de remaniement ont repris. Et pour cause…
La responsabilité du ministre de la Jeunesse et des sports, Mohamed Ouzzine, a été unanimement pointée par les Marocains, mortifiés à l’idée de la honte dont ce scandale couvrirait le pays. Puis est intervenu un coup de semonce royal, donnant lieu à une suspension des activités du ministre relatives à ce Mondial des clubs. Des enquêtes ont ensuite été diligentées par les ministères de l’Intérieur et des Finances, ainsi que des investigations supervisées par le Général Housni Benslimane.
Avec tout cela, il devenait impensable que le ministre Ouzzine reste en poste. Même si les enquêtes le disculpaient de toutes les accusations, celle du laxisme persisterait. Car un ministre –quel qu’il soit- est le premier responsable de son département et des activités qui s’y rattachent.
Alors, certes, des rumeurs et quelques titres de presse ont relancé les conjectures au sujet d’un remaniement ministériel, mais cette fois-ci, l’opinion publique aussi est de la partie.
Les caciques du Mouvement Populaire qui accusent la presse d’être seule à s’acharner contre leur ministre, Mohamed Ouzzine, se trompent de diagnostic. Le mal est plus profond. Il dépasse les médias. Les faits du complexe sportif étaient trop choquants. Les arguments du ministre, après les faits, l’étaient encore plus. Ses accusations tapageuses à l’encontre des uns et des autres, au moment où l’opinion publique attendait de lui, si ce n’était sa démission immédiate, du moins un profil bas en attendant que les choses se décantent, ont empiré son cas.
Le départ du ministre des Sports est une attente de l’opinion publique. C’est une attente des citoyens qui ne lui pardonneront jamais l’humiliation subie lors du Mondial des clubs. A moins de les écoeurer, tous, de la politique et de les conforter dans la conviction que leur voix ne sert à rien (à la veille des élections), ce remaniement est inévitable !
Bahia Amrani