La clémence du ciel était bien au rendez-vous en ce début d’année. Après plusieurs mois d’attente, le Maroc a connu des pluies abondantes du 5 au 8 janvier 2021. Ces précipitations salvatrices pour le secteur agricole, ont toutefois mis à nu la vulnérabilité des infrastructures de base.
Quartiers inondés, réseau routier impraticable, transport en commun hors service et, plus grave encore, habitations effondrées. Tel est le bilan provisoire de quelques jours de précipitations à Casablanca. Si les pluies étaient généralisées à l’ensemble du territoire national, c’est dans la métropole économique du Royaume qu’elles ont causé le plus de dégâts et humains, outre les désagréments qu’elles ont causés aux habitants.
La «Smart city» n’est pas si «smart» que ça
Smart City, ville intelligente… Les dénominatifs qui servent à désigner ce monstre urbain qu’est Casablanca ne manquent pas. Si le centre névralgique de l’économie nationale dispose, en théorie, de tous les atouts qui devraient lui permettre de jouer pleinement son rôle de locomotive de développement au niveau national et même continental, force est de constater qu’en pratique, la capitale économique du Royaume manque cruellement d’infrastructures de base à même de lui éviter de se noyer, à chaque épisode pluvieux, dans des trombes d’eau. Dans plusieurs quartiers de la ville, même les plus huppés et luxueux d’entre eux, les canalisations qui servent pour évacuer les eaux pluviales, n’ont pas pu résorber les fortes précipitations qui se sont abattues sur la métropole pendant la semaine du 4 janvier 2021. Les habitants sinistrés, n’ont pas manqué de déplorer ce scénario-catastrophe qui se répète quasiment chaque année, en dépit des travaux d’assainissement et des grands projets menés et censés protéger Casablanca des inondations.
La colère des Casablancais est compréhensible. Il faut dire que les récentes intempéries qui ont frappé la ville leur ont causé moult désagréments. Si un grand nombre de salariés n’ont pas pu rejoindre leurs lieux de travail, d’autres étaient dans l’impossibilité d’accompagner leurs enfants à l’école. Plusieurs directions d’établissements ont décidé de fermer temporairement leurs portes en raison des fortes inondations qu’a connues la métropole Casablancaise. En outre, la majorité des Chefs d’entreprises ont invité leurs employés à travailler à distance, depuis leurs domiciles. Il faut dire que beaucoup de salariés n’ont pas pu rejoindre leurs lieux de travail en raison de la non-disponibilité des moyens de transport (bus, petits et grands taxis, tramway).
Les Casablancais en colère contre leurs élus
Sur les réseaux sociaux, les Casablancais ont publié des photos et des vidéos documentant ce qu’ils ont qualifié de catastrophe. Et pour exprimer leur désarroi et faire entendre leurs voix, une pétition a été adressée aux responsables et membres du Conseil de la ville. La commune de Casablanca, elle, a déjà reçu un grand nombre de plaintes de citoyens qui ont subi des dommages considérables dans leurs biens et qui ont été bloqués dans la circulation dense suite aux inondations qu’a connue la ville.
Tandis que la majeure partie de la population casablancaise a subi des dégâts matériels importants suite aux dernières pluies, d’autres ont payé de leur vie la passivité et la défaillance des élus et responsables locaux. A l’heure où ces lignes sont écrites, on dénombre 4 morts dans l’effondrement de maisons menaçant ruine dans le quartier Derb Moulay Cherif. Dans un communiqué, les autorités locales d’Aïn Sebaâ Hay Mohammadi, préfecture où le drame s’est produit, ont expliqué que les maisons en question avaint été classées menaçant ruine et évacuées de ses habitants. Le même communiqué a ajouté que les habitations qui se sont effondrées, le 8 janvier 2021, étaient occupées de manière illégale. Ce qui s’est passé à Derb Moulay Cherif pousse à s’interroger sur le suivi du programme de réhabilitation des logements menaçant ruine à Casablanca. En effet, comment des logements ayant été évacués de leurs occupants par les pouvoirs publics peuvent-ils être réoccupés en toute illégalité au vu et au su de tous?
Le Maire de la ville se dédouane de toute responsabilité
Les habitants de Casablanca s’attendaient à un sursaut de conscience de la part du Maire de la ville, en lequel ils ont placé leur confiance pour veiller au développement de la métropole et à la valorisation de son image en tant que capitale économique d’avenir. Au lieu de cela, Abdelaziz El Omari a jeté la responsabilité du drame qu’a connu Casablanca sur la Lydec. Le Maire PJDiste a ainsi expliqué qu’il avait déjà reçu plusieurs plaintes de citoyens au sujet des inondations qui ont touché des quartiers et des rues de Casablanca et que le Conseil de la ville était conscient des dégâts qui en ont découlé. Et le responsable d’affirmer avoir exigé un rapport détaillé au délégataire de la distribution d’eau, d’électricité, de l’assainissement et de l’éclairage public à Casablanca, pour expliquer les raisons des défaillances observées en matière d’infrastructures d’assainissement, ayant été selon lui, à l’origine des inondations enregistrées ces derniers jours à Casablanca. De son côté, Lydec a fait savoir que dès réception du bulletin de la Direction Générale de la Météorologie Nationale, annonçant de fortes pluies sur le territoire du Grand Casablanca, elle s’est mise en situation d’alerte, en renforçant ses équipes et en déployant ses moyens d’intervention sur le terrain.
Selon la Direction Générale de la Météorologie Nationale, la hauteur des pluies a atteint 100 millimètres en 4 jours, par endroits, à Casablanca. Sous d’autres cieux, ce volume de précipitations aurait mis du baume au cœur des citoyens, sans forcément que dégâts matériels, drames humains et colère de la population s’en suivent. Or, la faiblesse des élus et des responsables locaux, fait que le spectre des inondations plane sur la métropole économique du Royaume à chaque épisode pluvieux.
Mohcine Lourhzal
Mieux vaut tard que jamais…
Sur les réseaux sociaux, les autorités locales et élus de la ville ont été fustigés pour leur absence pendant les intempéries. Ont-ils voulu prouver le contraire…?
Réunion d’urgence au siège de la Wilaya de Casablanca
Une réunion d’urgence, a été tenue le 8 janvier 2021 au siège de la Wilaya de la région de Casablanca-Settat, consacrée à l’examen des impacts des fortes pluies qu’a connues la ville et les mesures rapides et futures à prendre pour éviter que leurs effets ne se reproduisent pas à l’avenir. Les participants ont souligné à cette occasion, la nécessité de prendre des mesures pratiques et immédiates en vue de traiter les sites qui connaissent une saturation des eaux de pluie. Il s’agit notamment de la multiplication des opérations techniques et d’entretien des canaux de drainage des eaux, l’intervention pour la réalisation des travaux nécessaires, l’amélioration des conditions de circulation et de transport dans la ville, outre des mesures urgentes concernant les habitants des maisons menaçant ruine et la mobilisation de toutes les ressources financières et moyens matériels et humains à cet effet.
Saïd Ahmidouch en visite de terrain
Le Wali de la région Casablanca-Settat, Saïd Ahmidouch a visité, le 9 janvier 2021, plusieurs quartiers de Casablanca fortement impactés par les pluies importantes ayant touché la métropole. Cette visite de terrain s’est effectuée dans les arrondissements de Casablanca-Anfa, la préfecture des arrondissements de Sidi Bernoussi et la préfecture des arrondissements Moulay Rachid. Au niveau du rond-point Bachkou, le Wali Ahmidouch a suivi les travaux d’assainissement des eaux usées effectuées par l’équipe de Lydec, l’entreprise gestionnaire déléguée, chargée de la distribution d’eau et d’électricité dans la métropole ainsi que de la collecte des eaux usées et pluviales dans la métropole. Saïd Ahmidouch était accompagné, durant cette sortie, du directeur général de Lydec et de plusieurs responsables de son département. La délégation a pris connaissance de la situation des habitations menaçant ruine dans l’ancienne Médina et la région de Lahraouiyine qui ont été fortement impactées par les précipitations, raison pour laquelle plusieurs de leurs habitants ont été relogés provisoirement dans un établissement scolaire. La délégation officielle s’est également enquise de l’état des routes, particulièrement au niveau de Bachkou et de l’autoroute Casablanca-Mohammedia.