Lorsqu’on parle d’immigration, on en distingue deux types: l’immigration clandestine et l’immigration officielle par la voie légale. Le premier type concerne le passage illégal de personnes de certains pays vers d’autres.
L’immigration clandestine ou illégale, plus active ces deux dernières décennies, soulève un grand nombre de problématiques. Elle est déclarée officiellement par l’Organisation des Nations Unies (ONU) comme problème mondial. Certains pays d’Afrique, d’Asie et d’Amérique latine et aussi d’Europe de l’Est sont réputés être des pays de départ pour les migrants clandestins. Ces derniers empruntent les voies difficiles des déserts pour arriver aux côtes à partir desquelles ils commencent leur aventure avec la mer, dans des chaloupes et embarcations précaires, moyennant des sommes d’argent faramineuses. Parfois, ils voyagent cachés dans des cargaisons. Les pays d’Europe Occidentale et d’Amérique du Nord sont les destinations ciblées. Les pays côtiers, comme l’Italie, la Grèce et l’Espagne, ainsi que les côtes turques servent de passages-transit.
Les clandestins fuient non seulement la pauvreté, mais aussi et surtout leurs conditions pénibles de vie. Ils prennent des risques inimaginables pour arriver à leurs fins. Le phénomène de l’immigration clandestine prend alors de plus en plus d’ampleur, depuis presque deux décennies, sous l’effet de la mondialisation, de la crise économique mondiale, des guerres et des conditions d’instabilité dans certaines parties du monde. Ce phénomène soulève plusieurs problématiques à la fois sociales, politiques, économiques et sécuritaires et suggère plusieurs pistes de recherche afin de comprendre et d’approcher le phénomène.
Un périple mortel
En Italie, «330 personnes seraient mortes englouties, ce jeudi 12 février 2015, par les flots en Méditerranée, sur un total de 420 migrants qui tentaient de rejoindre les côtes italiennes depuis la Libye», selon Flavio Di Giacomo, le porte-parole de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) en Italie. «Quatre embarcations surchargées de migrants avaient quitté les côtes libyennes à destination de l’Italie. Trois d’entre elles ont fait naufrage, alors qu’un quatrième pneumatique a été secouru avec à bord une centaine de migrants, dont 29 décédés à cause du froid», détaille la même source. Hormis les témoignages de certains rescapés de cet énième drame de l’immigration, évacués à Lampedusa, aucun chiffre exact sur le nombre des victimes, ni sur celui des occupants des embarcations (quatre pneumatiques selon les uns, trois selon d’autres) n’a été fourni jusqu’à présent. «Les survivants sont tous des jeunes, âgés de 25 ans environ, en provenance de pays subsahariens. Pour certains d’entre eux, la Libye n’est qu’un point de transit, alors que pour d’autres, c’est le pays où ils travaillaient depuis longtemps», d’après le porte-parole de l’OIM. «Ces personnes voyageaient au milieu d’une mer houleuse avec des vague monstres de 8 mètres. Les trafiquants les avaient condamnés à la mort», ajoute Flavio. Selon des statistiques du ministère italien de l’Intérieur, 3.528 migrants sont arrivés en janvier. Le record a été battu l’année dernière avec plus de 170.000 personnes ayant débarqué sur les côtes de la péninsule.
En Espagne par exemple, les autorités locales ont procédé à l’expulsion d’un total de 9.410 immigrés arrivés de manière illégale sur le territoire espagnol entre janvier 2010 et octobre 2014, selon des données du ministère espagnol de l’Intérieur. «9.410 immigrés clandestins ont été expulsés vers leur pays d’origine via 257 vols internationaux organisés en collaboration avec l’Agence européenne pour la gestion de la coopération aux frontières extérieures des Etats membres de l’Union européenne , précise le ministère espagnol. Rien qu’en 2014, 1.167 immigrés clandestins ont été concernés par cette opération d’expulsion qui a nécessité 38 vols internationaux à destination de pays subsahariens et latino-américains, ajoute la même source. Pour la seule période de janvier-juillet derniers, 700 immigrés illégaux ont été rapatriés vers leurs pays d’origine à travers 24 vols. Le chiffre le plus élevé de migrants clandestins expulsés d’Espagne a été enregistré en 2011, avec 2.539 personnes. Par nationalités, les ressortissants des pays subsahariens, comme le Mali, le Nigeria, le Sénégal et le Cameroun, ainsi que d’autres de pays comme la Colombie, l’Equateur, la République dominicaine, le Pakistan ou l’Albanie, ont été les plus touchés par les opérations d’expulsion de l’Espagne entre 2010 et 2014, selon les mêmes sources.
Le Maroc régularise 18.000 clandestins
Le Maroc a recueilli plus de 27.000 demandes de régularisation présentées par des sans-papiers étrangers établis au Maroc entre décembre 2013 et janvier 2014. Sur ce nombre, près de 18.000 demandes ont reçu une suite favorable, a déclaré Cherki Drais, ministre délégué à l’Intérieur. «65% de ces demandes ont reçu un avis favorable. Parmi ces demandes, figurent quelque 16.000 sans-papiers qui ont séjourné sans discontinuer au Maroc durant cinq ans», détaille Drais. Rabat et Casablanca sont les deux villes qui ont présenté le plus grand nombre de demandes de régularisation avec respectivement plus de 8.000 et de 6.000 demandes. Le ministre a indiqué que les 27.000 sans-papiers qui ont sollicité une carte de séjour viennent de 116 pays différents. La plupart proviennent de l’Afrique subsaharienne. Les pays les plus représentés dans ces demandes de régularisation sont le Sénégal, le Niger, le Cameroun, les deux Guinée (Conakry et Bissau), le Congo Brazzaville et la Syrie, souligne Cherki Drais. «Les sans-papiers dont les demandes ont été rejetées ont le droit d’interjeter appel auprès de la commission nationale ad-hoc», a-t-il précisé. L’opération de régularisation avait commencé en 2013, suivant une approche humanitaire, juridique et sociale voulue par le Souverain. Cette stratégie a fait naître «une lueur d’espoir pour les sans-papiers étrangers établis au Maroc», selon la même source.
Il faut dire que le gouvernement marocain s’est engagé à relever les défis du respect des droits de l’homme, des droits sociaux et de la bonne gouvernance. «La politique migratoire marocaine a donné ses fruits. Elle est encourageante et importante», estime M’Barka Bouaida, ministre déléguée aux Affaires étrangères. Pour contrer ce fléau, le Maroc ne ménage aucun effort. Les autorités marocaines ont affirmé avoir démantelé l’an dernier plus d’une centaine de réseaux de trafic d’êtres humains vers le Vieux continent, dans le cadre de leur lutte contre l’immigration clandestine.
Toutefois, plusieurs milliers d’immigrants subsahariens tentent, quotidiennement, d’entrer illégalement à Sebta et Melilla.
Le parcours des migrants clandestins est ainsi divisé entre drames, pour ceux d’entre eux qui y laissent leur vie ; et aubaine pour ceux qui arrivent à régulariser leur situation, d’une manière ou d’une autre.
Ces dernières semaines, les forces de sécurité espagnoles et marocaines ont empêché plusieurs milliers de candidats à l’immigration clandestine. Malgré le renforcement du dispositif anti-franchissement, les irréguliers sont toujours très nombreux à vouloir coûte que coûte entrer en Europe par cette voie. En tout cas, l’Espagne et le Maroc mobilisent d’importants moyens pour lutter contre l’immigration illégale. Selon le gouvernement espagnol, les services de sécurité espagnols et marocains travaillent de «manière conjointe, formant ainsi un canal permanent et fluide d’échange d’informations», fait noter le gouvernement espagnol, rappelant également la création d’une équipe conjointe d’analyse et de recherche en matière d’immigration illégale qui tient des réunions régulières. Des patrouilles maritimes mixtes sont menées également par les deux pays contre l’immigration clandestine, précise la même source, ajoutant que les opérations réalisées par les deux pays se font dans le respect des droits de l’Homme. N’empêche qu’un total de 16 agents de la Garde civile espagnole ont été inculpés par la justice dans le cadre de l’enquête sur la mort par noyade, le 6 février 2014, de 15 migrants d’origine subsaharienne, alors que ces derniers tentaient de gagner Sebta. Les membres de la Garde civile, accusés d’utiliser des balles de caoutchouc et d’envoyer des fumigènes dans l’eau en direction des migrants, devront comparaître devant la justice entre les 3 et 11 mars prochains. Ils sont accusés de «présumé délit d’homicide par imprudence». En réaction à ce drame, diverses organisations non gouvernementales (ONG), dont l’Association européenne pour la défense des droits de l’Homme (AEDH), ont réclamé l’ouverture d’une commission d’enquête par le Parlement européen, afin de déterminer les responsabilités dans la mort de ces migrants subsahariens.
En définitive, pour quel pays que ce soit, résoudre la problématique des migrants clandestins est une tâche souvent ingrate.
Anas Hassy
Après Gourougou… Le vendredi 30 janvier, une embarcation avec à bord 20 clandestins, dont 2 passeurs, a chaviré près du port de Nador. Le drame s’est déroulé tôt dans la matinée, au large de la plage Boukana, à environ 6 kilomètres du port de Nador, expliquent les autorités de la province de Nador. «Six cadavres non encore identifiés ont été rejetés par la mer et 10 personnes ont été secourues», selon la même source. |