Le ministre des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, Nasser Bourita, a indiqué jeudi, que la reprise des relations entre le Maroc et Israël est un facteur pour renforcer la dynamique de paix au Proche-Orient.
“Le rétablissement des relations diplomatiques est une réponse à un double appel: un appel de la communauté juive marocaine, désireuse d’approfondir sa relation avec le Maroc, mais aussi un appel à la paix et au développement de la dynamique originelle, propice à une paix durable au Proche-Orient”, a indiqué M. Bourita à l’occasion d’une interview accordée à la chaîne de télévision de l’American Israel Public Affairs Committee (AIPAC), en marge de sa rencontre annuelle.
Il a ajouté que pour le Maroc, un “pionnier dans l’action pour la paix au Moyen-Orient depuis Feu le Roi Hassan II”, il s’agit d’une “étape normale, un pas de conviction, mais aussi un investissement dans la paix et un moyen d’approfondir la relation forte entre le Maroc et la communauté juive”.
“Sa Majesté le Roi Mohammed VI a déclaré que la décision prise par le Maroc en décembre n’était pas une décision opportuniste. C’est une décision de conviction et une décision naturelle en raison de ses liens avec sa communauté juive et de l’implication historique du Maroc dans la paix”, a rappelé le ministre.
Et d’ajouter que “la dynamique régionale est très importante. La stabilité régionale est très importante, pour promouvoir la paix entre Israël et la Palestine. Le Maroc a joué un rôle de pionnier dans le processus de paix au Moyen-Orient et il est aujourd’hui également prêt à y contribuer”.
“Nous espérons que tous les efforts seront faits de toutes parts, y compris de la part d’Israël pour promouvoir une paix véritable, une paix, qui préservera la sécurité d’Israël, la sécurité et la stabilité de son peuple, mais qui permet aussi aux Palestiniens de faire valoir leurs droits”, a-t-il dit.
Revenant sur les relations exceptionnelles entre le Maroc et les membres de sa communauté juive, M. Bourita a indiqué que “pour comprendre la relation avec Israël, vous devriez la lier à la relation avec la communauté juive”.
“La relation est très ancienne et le lien entre le Maroc et la communauté juive est très profondément enraciné. Et je me demande si nous pouvons parler du Maroc et de la communauté juive en tant qu’entités séparées parce qu’ils forment une seule communauté”, a indiqué le ministre, rappelant que “la population juive vit au Maroc depuis des siècles. Elle fait partie de la population marocaine. Elle a enrichi l’identité marocaine. Et c’est pourquoi notre constitution est peut-être la seule du monde arabe et islamique, qui mentionne la composante juive parmi les composantes importantes de l’identité marocaine”.
Et de poursuivre qu’il s’agit aussi d’une “relation entre la communauté juive et les Rois du Maroc, une très longue histoire remontant au 15ème siècle lorsque la communauté juive a été expulsée d’Andalousie, pour être accueillie au Maroc. Feu le Roi Mohammed V a rejeté les lois antisémites du régime de Vichy et a refusé de remettre la communauté marocaine au régime nazi”.
Evoquant les efforts importants consentis pour la préservation de l’identité et du patrimoine juif marocain, M. Bourita a indiqué que “Sa Majesté le Roi Mohammed VI œuvre pour préserver cet héritage. La constitution marocaine fait référence à l’affluent juif. Sa Majesté a également ordonné la rénovation de près de 170 cimetières et lieux saints au Maroc, et plus de 20 synagogues ont été restaurées”.
“Aujourd’hui, dans notre programme scolaire, la référence aux composantes juives de l’histoire marocaine est là, ce qui est un fait unique dans le monde arabe et islamique. Et le Maroc est le seul pays arabe et islamique où une communauté juive vit encore avec ses synagogues, son tribunal et avec toutes ses structures comme une composante normale de l’identité marocaine et du peuple marocain”, a indiqué M. Bourita.
Cette relation est très forte, a-t-il enchaîné, et le million d’Israéliens marocains vivant en Israël ou les centaines de milliers de juifs marocains vivant en Amérique du Nord et en Amérique du Sud, ou en Europe, ont gardé des liens étroits avec leur pays et avec leurs Rois pendant des siècles.
“C’est pourquoi cette relation est très particulière, elle est unique dans le monde arabe. Et elle a été sauvegardée par les engagements des Rois du Maroc, mais aussi par la volonté du peuple marocain.”, a noté le ministre.
Interrogé sur les perspectives de relations bilatérales, M. Bourita a indiqué qu’après la déclaration sur la reprise des relations, un accord trilatéral a été signé, quelques jours après, entre le Maroc, Israël et les États-Unis.
“Ces documents sont juridiquement contraignants avec différentes composantes, une reconnaissance par les Etats-Unis de la souveraineté marocaine sur le Sahara, des engagements du Maroc à développer les relations avec Israël et un engagement d’Israël à s’engager également dans une coopération profonde avec le Royaume du Maroc”, a-t-il indiqué.
Depuis, “nous avons pris des mesures concrètes pour traduire dans les faits cette déclaration, les bureaux de liaison ont été ouverts à Rabat et à Tel Aviv, et ils travaillent normalement aujourd’hui avec des diplomates et participent à des événements en Israël et ici au Maroc”.
Deuxièmement, a-t-il dit, au moins huit ministres ont eu des contacts avec leurs homologues israéliens, donnant lieu à la signature d’une série d’accords de coopération dans différents domaines.
“Nous avons également créé huit groupes de travail sur la diplomatie, la sécurité, l’eau, l’agriculture, le tourisme, etc., dans lesquels nous devons approfondir la coopération. Les vols seront ouverts, la contrainte est justement ce contexte COVID, mais nous comptons aussi avoir des vols directs entre le Maroc et Israël pour encourager la coopération interpersonnelle. Nous avons également mis en place des plateformes pour les entreprises. Il y a un conseil d’affaires israélien marocain qui a été créé et une chambre israélienne marocaine du commerce a également été créée il y a quelques semaines”, a énuméré M. Bourita.
“Et comme il s’agit d’une décision de conviction, nous irons le plus loin possible dans le développement de la coopération bilatérale au bénéfice des deux peuples et pour les bénéfices de la région”, a assuré le ministre.
Interrogé, par ailleurs, sur le partenariat solide entre le Maroc et les Etats-Unis, M. Bourita a rappelé que “c’est une relation de très longue date. C’est une relation, qui est même liée à l’histoire des États-Unis, le Maroc étant le premier pays à reconnaître les États-Unis”.
“L’accord Maroc-États-Unis est le plus ancien accord en vigueur signé par les États-Unis. Et aujourd’hui, nous fêterons les 200 ans de la plus ancienne propriété américaine en dehors des États-Unis, qui se trouve à Tanger”, a-t-il rappelé indiquant que cette relation “s’est adaptée à différentes époques”.
“Nous étions alliés pendant la guerre froide, nous étions alliés lorsque l’Est et l’Ouest étaient divisés, nous sommes des alliés pour faire face aux défis émergents, et nous sommes également des alliés pour faire face aux menaces qui pèsent sur notre sécurité et la sécurité de notre peuple”, a-t-il noté, rappelant que “l’important est de garder les fondements de cette relation, qui sont des valeurs, des intérêts, et des engagements communs pour la paix et la stabilité dans le monde”.
Evoquant enfin l’Iran et son rôle déstabilisateur dans la région, M. Bourita a précisé que “les gens en savent plus sur les activités nucléaires de l’Iran, mais l’Iran agit également par le biais de mandataires pour déstabiliser l’Afrique du Nord et l’Afrique de l’Ouest”.
“L’Iran menace l’intégrité territoriale du Maroc et sa sécurité en soutenant le polisario en lui fournissant des armes et entraînant sa milice à attaquer le Maroc”, a-t-il souligné, rappelant que l’Iran élargit sa sphère d’influence également à travers le Hezbollah, “ses activités en Afrique de l’Ouest endommageant l’islam modéré que le Maroc promeut depuis des siècles dans cette région et se connectant avec certains mandataires, y compris certains acteurs non étatiques militants dans cette région”.
Aujourd’hui, “nous sommes toujours vigilants face aux menaces que l’Iran présente à notre sécurité et à la sécurité du peuple marocain”, a dit le ministre soulignant que la question du Sahara est “cruciale pour le Maroc. Son intégrité territoriale est la clé de sa stabilité”.
LR/MAP