Benkirane, Chabat et corrélations

Ceux qui suivent la politique, au Maroc, sont de plus en plus désorientés. En plus d’être affligés par le niveau du débat, ils sont à la fois ahuris et écoeurés par la dévalorisation de la parole publique.
Sous d’autres cieux, ceux qui badinent avec la parole publique en font immédiatement les frais.
Le tout dernier exemple en date nous vient de France. Lundi 4 mai, lors de l’émission «Mots croisés» de France 2, le maire Front national de Béziers, Robert Ménard, expliquait que sa commune comptait près de 65% de musulmans et qu’il s’était fondé sur les prénoms des écoliers pour le savoir. Ce qui n’était possible que s’il avait procédé à un fichage des écoliers. Aussitôt, grand émoi dans les milieux politiques et médiatiques français, le fichage étant interdit par la loi. Dès le lendemain, mardi, la ministre de l’éducation se saisit de l’affaire, une enquête préliminaire est ordonnée, sa mairie subit une perquisition et, mercredi, il se retrouve devant le Service régional de police judiciaire (SRPJ) de Montpellier, pour s’expliquer sur le présumé fichage des écoliers musulmans qu’il aurait mis en place dans sa ville.

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Que retenons-nous de cette affaire du maire FN (dans une autre vie, grand défenseur de droits, en matière de presse, avec le titre de secrétaire général de Reporters sans frontières) ?
Ce qui impressionne et qui fait tellement défaut au Maroc, c’est cette corrélation entre la parole publique, la loi, l’action politique et, bien sûr aussi, les médias.
Une émission de télévision (les médias) enregistre un dérapage oral (parole publique) et la ministre réagit (action politique) pour vérification de conformité avec les lois en vigueur (la loi).
Chez nous, en politique c’est de plus en plus comme à la Bourse de Casablanca. Il y a une dé-corrélation totale ! A la Bourse, les entreprises peuvent faire des bénéfices exceptionnels, annoncer de nouveaux relais de croissance et avoir tous les indicateurs au vert, mais, en même temps, enregistrer une incompréhensible chute de leur action.
Cette absence de corrélation, depuis longtemps décriée par les animateurs de la place financière, est tout autant observée en politique. Voire même davantage…
On le réalise mieux à l’approche des élections. Le ton de certains leaders politiques monte. Et, comme dit le dicton, «quand le ton monte, le niveau baisse». La classe politique donne de plus en plus de coups de canif à la parole publique. S’il y avait une réelle corrélation entre la parole publique et la loi, il y a des leaders qui se verraient obligés de rendre des comptes, devant le juge, pour leurs propos. Le fait que ce ne soit pas le cas dévalorise la parole publique et, plus globalement, la politique. Quand le chef de l’Istiqlal, Hamid Chabat, accuse le chef du PJD et chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane, de collaboration avec Daech, Annosra et le Mossad, c’est extrêmement grave. De deux choses l’une: ou cela est vrai et Benkirane tombe sous le coup de la loi, ou cela est faux et c’est Chabat qui doit en répondre devant la loi. Banaliser de tels propos et faire comme si de rien n’était, ne laisse plus aucune valeur à la parole publique et à la politique en général. Et l’on s’étonne qu’ensuite, n’importe qui dise n’importe quoi et que les électeurs ne croient plus en rien ni en personne !

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