Le nouveau Gouvernement investi ! | 3 grands signaux, 2 grandes inquiétudes et petits tapages en vue

Quelles premières appréciations concernant le Gouvernement Akhannouch? Non pas sur ce qu’il a fait –pour cela, il faudra au moins attendre que passent les 100 jours de grâce» habituellement accordés aux nouveaux Gouvernements- mais sur ce qu’il propose, sur son modus operandi et sur les impressions qui se dégagent d’ores et déjà de ses choix.

Depuis ce mercredi 13 octobre (2021), le nouveau Gouvernement est définitivement investi, le Parlement ayant validé son programme.

Le vote a bien eu lieu à la Chambre des Représentants, le programme ayant été présenté par le chef du Gouvernement «devant les deux Chambres réunies» et «fait l’objet d’un débat devant chacune des deux Chambres», comme le prévoit l’article 88 de la Constitution.

Mais le vote de confiance ne faisait aucun doute, compte tenu de la très confortable majorité dont la coalition gouvernementale dispose.

Le programme a été adopté avec un score de 213 voix pour, 64 contre et 1 abstention.

Au pas de charge…

Le «Trio» gouvernemental (RNI, PAM, Istiqlal) peut donc passer à l’action !

En réalité, il l’a déjà fait, sans perdre une seule journée, dès que le Roi a nommé le Gouvernement.

Et c’est là, le premier grand signal donné par cet exécutif: l’immédiateté du passage à l’action, excluant toute perte de temps ! Ce que l’on n’avait pas vu depuis longtemps, habitués à nous entendre dire que «le temps politique est différent du temps réel», que «le temps politique prend son temps»…

Avec ce Gouvernement riche de profils économistes, à commencer par le chef du Gouvernement Aziz Akhannouch, la perception du temps change et l’on voit bien que pour ces femmes et hommes d’action: «le temps, c’est de l’argent».

Pour preuve… Jeudi 7 octobre (2021), le Gouvernement a été nommé et tous ses membres reçus par SM Mohammed VI. Aussitôt passées les journées du vendredi 8 octobre -ouverture de la 1ère session du Parlement et Discours Royal donnant le coup d’envoi de la rentrée politique- et du samedi/dimanche -consacrées à l’élection des bureaux des deux Chambres du parlement- le Gouvernement a tenu son 1er Conseil dans la matinée du lundi 11 octobre, pour approbation de son programme. Lequel a donc été ficelé en bonne entente, par les 3 composantes de la coalition, les jours précédents. Programme qui, dans l’après-midi, était exposé aux deux Chambres du Parlement réunies !

Un seul jour accordé aux élus et dès mercredi, retour sous le capitole pour le vote de confiance et l’investiture officielle du Gouvernement.

L’impression que donne cette marche au pas de charge du nouveau Gouvernement, est que l’exécutif entend s’atteler le plus vite possible aux immenses chantiers qui l’attendent. Et cela est un signal aussi fort que positif, qui n’a d’égal que l’impatience des citoyens de voir cette nouvelle équipe répondre à leurs attentes.

Ce qui parle aux citoyens

Le 2ème grand signal envoyé par le nouveau Gouvernement, tient dans l’attachement qu’il affiche au double cap économique et social qu’il s’est fixé. Aujourd’hui, c’est cela qui «parle» aux citoyens, désabusés par les slogans et professions de foi. Devenus exigeants, ils veulent du concret palpable dans leur quotidien. Tous ne comprennent peut-être pas ce que veut dire «la transformation économique», dont ils entendent qu’elle est au cœur du programme du nouveau Gouvernement, mais tous retiennent que «la transformation économique» créera de l’emploi et qu’il leur est promis la création de 200.000 emplois par an, soit 1 million d’emplois au bout du mandat de 5 ans.

Tous comprennent également ce que veut dire «soutien aux initiatives individuelles et financement de petits projets», ou bien «allocations familiales de 300 dirhams par mois pour chaque enfant, dans la limite de 3 enfants», ou encore «allocation de naissance, pour les familles nécessiteuses, de 2.000 dirhams à la naissance du premier enfant et de 1.000 dirhams à celle du second»…

Des consultations seront engagées avec les partis pour la formation d’une majorité cohérente et homogène

Sortir de la crise, créer de l’emploi, encourager l’entreprise autant que le consommateur et l’offre autant que la demande (si, si, c’est possible, quoiqu’en disent certains économistes sourcilleux), se soucier du monde rural comme du monde urbain, fixer un objectif précis au secteur de l’Éducation (le Maroc dans le top 60 mondial en 5 ans), à celui de la Santé… Avec son cap sur l’économique et le social, le Gouvernement Akhannouch s’est particulièrement démarqué.

Vérifier, point par point

D’autant que ses promesses sont chiffrées et datées. Ce qui représente un autre signal fort, du nouveau Gouvernement: le 3ème !

Le mérite, force est de le reconnaître, en revient d’abord au parti qui dirige la Majorité gouvernementale: le RNI. Le parti de Aziz Akhannouch s’est en effet fait fort de mener sa campagne sur la base d’un programme dont les propositions ont été déclinées en objectifs chiffrés -5 engagements, 25 mesures- quasiment le même présenté au nom de la Majorité. Le chef du RNI et désormais chef du Gouvernement est un manager pour qui les objectifs précis et l’obligation de résultats sont des règles incontournables.

Appliquer ces règles au niveau national ne peut que dénoter le sérieux de l’engagement et un certain courage, sachant que si les promesses sont chiffrées et datées au début du mandat, la reddition des comptes en sera facilitée à ceux qui la demanderont à la fin du mandat.

Ils pourront en effet, vérifier -point par point- l’exécution ou non des promesses. Par exemple, si le taux de croissance a bien atteint les 4% ; s’il y a réellement eu création d’1 million d’emplois et du nombre d’emplois annoncé pour chaque secteur ; si le cadre réglementaire et fiscal a bien accompagné l’entreprise, petite et grande, celle en activité et celle à créer ; si les allocations familiales, primes de naissance, ou indemnités pour perte d’emploi, ont bien été conformes à ce qui a été avancé par le programme du Gouvernement, etc.

Le défi est grand pour ce Gouvernement qui donne de si bons gages !

Mais il y a des craintes…

Pour autant, deux grandes inquiétudes mettent un bémol à l’enthousiasme que suscite le Gouvernement Akhannouch. Toutes deux largement exprimées et commentées par l’opinion publique.

La 1ère concerne les moyens de financement des objectifs très ambitieux et très nombreux que s’est fixé l’exécutif.

La seconde porte sur le cumul des fonctions de maire et de ministre.

En ce qui concerne le financement, considérant les moyens limités des caisses de l’Etat et la crise sanitaire qui handicape l’économie depuis deux ans, la crainte est que le nouveau Gouvernement recoure aux deux solutions les plus redoutées (et néfastes): le creusement du déficit et l’endettement.

Devant le Parlement, lors des débats sur le programme gouvernemental précédant son approbation, le chef du Gouvernement Aziz Akhannouch a rassuré sur la «faisabilité» de ce programme, rappelant cependant que cela nécessitait la contribution de tous et y appelant.

L’Etat, bien sûr, a sa part à remplir en actionnant tous les leviers et mécanismes pouvant porter et maintenir la croissance à 4%, année après année. Mais la création d’emploi, de richesse nationale et de valeur ajoutée, dépend aussi des initiatives non-étatiques. Notamment, celles du secteur privé, de la Société civile, voire du simple citoyen (par le biais de l’auto-emploi, par exemple). C’est ce que le Nouveau Modèle de Développement a appelé «le Pacte national pour le développement».

PAM : L’avenir est dans les plantes

L’autre mission et la problématique cumul

Car ce Gouvernement n’aura pas qu’une mission de bonne gestion de l’économie et de sa relance post-Covid. Il aura en plus –et surtout- la mission de mettre le Maroc sur les bons rails du Nouveau Modèle de Développement. Cela a été rappelé par le Souverain dans son Discours du 8 octobre (2021) devant le Parlement. Cette mission-là, transcendante, est rien moins que l’une des 3 grandes orientations stratégiques du Maroc, définies par le Roi dans ce Discours d’ouverture du Parlement.

D’où la grande concentration d’efforts qu’exigera, de chaque membre du Gouvernement, sa fonction. Or, la question aujourd’hui sur toutes les lèvres est de savoir si les ministres qui sont aussi maires pourront concrètement concentrer leurs efforts sur leurs deux fonctions, où les attentes des citoyens sont aussi fortes concernant l’une que concernant l’autre.

Les inquiétudes ont le plus souvent porté sur le cumul de ces fonctions par les ministres femmes (même si les grandes responsabilités qui leur ont été confiées, ont été fortement saluées). Mais aux deux femmes concernées –la maire de Casablanca, Nabila Rmili et celle de Marrakech, Fatema Zohra Mansouri- s’ajoutent 3 membres masculins du Gouvernement: Le chef du Gouvernement lui-même, maire d’Agadir ; le ministre de la Justice Abdellatif Ouahbi, maire de Taroudant ; et le ministre de l’équipement Nizar Baraka, maire de Larache…

La loi n’interdit pas le cumul, mais il sera facile de voir, dès les 1ers mois, si les deux fonctions sont remplies comme attendu des citoyens.

Dernière minute: Alors que nous nous apprêtions à publier ce numéro, nous apprenions que SM le Roi a déchargé Nabila Rmili de sa fonction de ministre de la Santé pour en charger à nouveau le ministre sortant, Khalid Aït Taleb.

Nabila Rmili se consacrera à la Gestion de la ville de Casablanca. Ce qui n’est pas peu !

«Petits tapages» dans le pipe

Le Gouvernement sera, comme le veut la pratique, jugé sur les 100 premiers jours. Il sera même jugé bien avant, dès que le projet de Loi de Finances 2022 sera ficelé.

Les Lois de Finances informent toujours sur les intentions, choix et procédés des Gouvernements, qu’ils soient nouveaux venus ou en place.

Les répartitions budgétaires pour l’année, la fiscalité, le taux du déficit, le budget alloué aux investissements, etc. Chaque chiffre lève un bout de voile sur les réelles orientations du Gouvernement.

Le Gouvernement Akhannouch sera particulièrement attendu sur le PLF 2022, qui sera inévitablement passé au crible, tous les observateurs s’impatientant de voir si la Loi de Finances va dans le même sens que ce programme du Gouvernement tant prometteur.

Il y a néanmoins des revendications qui n’attendront pas la Loi de Finances.

Certains secteurs, fortement impactés par la crise, ou mécontents de leur situation et exprimant des revendications depuis longtemps, sont sur les Starting Blocks de la contestation, bouillonnant d’impatience.

Des manifestations et des grèves sont envisagées, voire en cours (Cf la suite du dossier du Reporter de cette semaine).

Il a été décidé que quelques jours de répit seraient donnés au nouveau Gouvernement. Mais c’est un passif que l’équipe Akhannouch aura à gérer et qui peut constituer un tout premier test…

Aucune cause, aussi petite soit-elle, n’est à négliger par un Gouvernement qui, en s’engageant à mettre le social au cœur de son action, conformément aux insistantes Directives Royales, a ouvert les vannes de l’espoir.

Bahia Amrani

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