Rentrée : Monarchie, PJD, Sahara…

Ceux qui s’en sont allés, pour quelques jours au mois d’août, se dorer au soleil entre sable fin et eau bleu azur, ou tester de nouvelles saveurs -culinaires ou autre- sous d’autres cieux, ont repris leurs quartiers sur un brutal retour à la réalité…

Trois événements, en particulier, ont suscité des remous dont les cercles concentriques se démultiplient encore en cette rentrée. L’affaire de l’allégeance au Roi. Celle du forum des jeunes du PJD à Tanger. Et celle du rapport de la Fondation Kennedy sur le Sahara après la visite à Laayoune d’une délégation conduite par la présidente de cette Fondation.

1 – L’allégeance au Roi. En lui-même, cet événement n’est pas exceptionnel. C’est une cérémonie traditionnelle qui a lieu chaque année, à l’occasion de la commémoration de l’accession du Roi au Trône (Fête du Trône). Il y est observé un rituel dont le fondement est politique. Il consiste en ce que toutes les régions du Maroc, par le biais des autorités décentralisées qui y sont en poste, renouvellent leur allégeance au Roi en s’inclinant devant lui, alors qu’il est à dos de cheval, en habit traditionnel. Ce rituel remonte au temps où le Roi, dont le Trône était sur son cheval, allait au-devant des différentes tribus du Royaume, négocier avec elles sécurité, administration, protection, en échange d’un impôt. Chaque année, les chefs des tribus de ces régions ainsi passées de Blad Siba (territoire d’anarchie) à Blad Al Makhzen (territoire administré) faisaient le déplacement vers la capitale pour confirmer le pacte. Ce cérémonial a redoublé d’importance depuis que l’affaire du Sahara a été portée devant la CIJ (Cour internationale de Justice). Pour prouver que le Sahara n’était pas terra nullius au moment de sa colonisation, mais qu’il appartenait bien au Maroc, les juristes ont fait état de ces liens d’allégeance (Al Beïa) qui existaient entre les tribus sahraouies et la monarchie. Que les opposants nés du Printemps arabe, ou ceux de toujours (dont certains ont manifesté à Rabat, devant le Parlement, fin août, ou sur l’esplanade du Trocadéro, à Paris, ce 1er septembre), veuillent voir disparaître cette cérémonie d’allégeance, relève de l’ignorance de ces données. Eux, sous l’influence des vents du Printemps arabe, n’y voient qu’un cérémonial désuet à supprimer. Le reste des Marocains y voit un acte hautement politique symbolisant l’unité nationale et l’intégrité territoriale.

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2 – Le forum des jeunes du PJD à Tanger. Dans cette affaire (sur laquelle Le Reporter revient par ailleurs, pages 10 à 13), deux observations s’imposent.

D’abord, le grand cafouillage des autorités. Les jeunes du PJD ont voulu organiser leur forum pour la 8ème année consécutive. Ils n’ont pas arrêté la date en fonction des élections partielles (qui doivent avoir lieu aussi à Tanger, lieu du forum, où leur parti s’est vu invalider 3 sièges qu’il compte bien récupérer), mais sans doute ont-ils vu plus grand quand l’aubaine s’est présentée. Fallait-il que la décision des autorités locales -d’empêcher que le forum se tienne sur une place publique- prenne cette tournure ? Fallait-il que le ministère de l’Intérieur s’en mêle officiellement ? Les choses ne pouvaient-elles être réglées avec le chef de gouvernement qui est le chef du parti organisateur ? Et ce méli-mélo dans les arguments justifiant l’interdiction… Tantôt des raisons de sécurité, tantôt des considérations électorales ? Tout cela fait tâche et aurait pu être évité.

Mais une deuxième observation porte, elle, sur le comportement de certains responsables du PJD. Pourquoi, à la moindre anicroche, incriminer le Roi et/ou son entourage, comme l’a fait Raïssouni, faucon de ce parti islamiste, qui a aussitôt vu dans l’interdiction une mesure de représailles que lui auraient valu ses positions contre la cérémonie d’allégeance ? Etait-ce la 1ère fois que Raïssouni exprimait ses opinions ? En mai déjà, il critiquait le baisemain au Roi… Pourquoi tout de suite proférer des menaces (qui ne font peur à personne, du reste), comme l’a fait le député PJD Aftati sur les antennes d’Al Jazeera, agitant l’éventualité de «manifs» dans la rue ? Pourquoi ce cri guerrier d’un responsable de la jeunesse du PJD qui a lancé: «nous sommes arrivés au gouvernement, mais pas au pouvoir !». Pourquoi tous ces membres du PJD qui n’ont de cesse de réclamer que le Roi partage ses pouvoirs, ont-ils tant de mal à voir leur pouvoir à eux menacé de partage ? …Car l’interdiction vient bien du ministère de l’Intérieur qui est dirigé par un autre parti de la majorité, le Mouvement Populaire, dont on peut comprendre qu’il ne veuille pas laisser le PJD triompher (c’est de bonne guerre)… Est-il si difficile pour tous ces responsables du PJD de comprendre que leur parti n’est plus un parti d’opposition, mais un parti d’Etat ?

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3 – Le rapport de la Fondation Kennedy sur le Sahara. Ainsi donc, Mme Kerry Kennedy, fille du sénateur Robert Kennedy (assassiné en 1968) et présidente du RFK Center for Justice and Human Rights, a effectué, à la tête d’une délégation, une visite de 3 jours au Sahara (du 28 au 31 août) et de quelques heures dans les camps du Polisario. Puis, deux jours plus tard, elle a publié un rapport qu’elle entend remettre à l’ONU, à l’Union européenne et à l’Union africaine. Un rapport –sans surprise- fustigeant le Maroc sur la question des droits de l’homme au Sahara et reprenant l’antienne des séparatistes consistant à demander l’institution d’un mécanisme de contrôle des droits de l’homme. La presse algérienne en a fait ses choux gras, bien sûr. Mais le plus surprenant, c’est qu’on s’en émeuve côté marocain. Les positions pro-Polisario de Mme Kennedy sont connues de tous. Or, là où il y a parti-pris, il n’y a pas crédibilité. Ce qu’il faudrait, c’est un mémorandum du Maroc qui réponde point par point à Mme Kennedy et lui réexplique toute la genèse de ce conflit artificiel. Mémorandum qui lui serait remis à elle, ainsi qu’à tous ceux qui auront reçu son rapport, sans exception.

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