Celui qu’on qualifiait pendant trente-cinq ans d’historien ou de «mémoire du Parlement» vient encore une fois de faire parler de lui. C’est un autodidacte émérite qui a à son palmarès (après avoir été à ses débuts «chaouch» au Parlement)
une douzaine de livres dans lesquels il retrace l’histoire de l’institution parlementaire marocaine. Pour n’en citer que celui-ci et non des moindres: «Parlement et gouvernement, mémoire et histoire».
Abdelhaï Bennis, que ceux qui ne supportaient pas ou supportaient mal de le voir, lui, un «chaouch», faire le travail qu’ils n’ont pas réussi à réaliser et le qualifiaient de balayeur -parce qu’il balayait tous documents sur son passage-, vient de mettre au monde un nouveau-né: «Mémoire de »chaouch » au Parlement».
Au risque d’en choquer plus d’un, il ne fait rien pour maquiller sa situation sociale et administrative, sûr qu’on n’a pas toujours besoin de diplômes pour se faire une place dans le concert des écrivains ou même des historiens. Car -n’en déplaise à ceux qui lui ont dénigré ses titres pendant plus de trois décennies, ne comprenant pas comment un petit fonctionnaire ait pu se hisser au rang d’historien d’une aussi prestigieuse institution que le Parlement- il persiste et signe. Dans ses mémoires, il dit avoir rassemblé tout ce que ceux à qu’il pense -ses détracteurs jaloux de son don- dédaignaient, pour le servir à ceux assoiffés de connaissances, comme lui.
Bennis est passé de chaouch, venu directement de l’atelier de cordonnerie de son paternel Ba Driss Ben Mustapha Bennis, à historien du Parlement. Passage qui lui a ainsi valu d’être la cible de ceux qui ne savaient faire autre chose que conspirer contre les humbles qui pourtant clignotaient pour dépasser, par respect du code de la vie. En regardant dans le rétroviseur, l’historien du Parlement voit défiler des scènes où il était longtemps dédaigné, sa dignité bafouée et son honneur piétiné. Mais, d’un revers de main, Abdelhaï Bennis balaye tout, fier d’avoir résisté, par la seule plume et la mémoire. Sa revanche est de faire voir ses livres et son nom en bonne place dans les librairies, les bibliothèques, les universités renommées, comme celles d’Oxford et de Harvard, la bibliothèque du Congrès…
Pas du tout rancunier, Bennis sait pardonner et dit avoir pardonné, mais ne désarme pas pour autant. Car, même à la retraite, il continue d’écrire pour les générations à venir, auxquelles ses mémoires du Parlement témoigneront qu’un homme simple et honnête, appelé Abdelhaï Bennis, est passé par là et y a laissé ses empreintes, mais pas ses plumes…
Ce n’est donc que rendre justice à cet homme, en lui attribuant un Prix des meilleurs écrits sur le Parlement. Lui qui a beaucoup donné à cette institution… Sans en avoir rien reçu.
Mohammed Nafaa