L’art et la manière, Moulay Hafid Elalamy dispose des deux et il en a fait la preuve face à un auditoire de chefs d’entreprise, à la CFCIM de Casablanca, en expliquant la stratégie d’accélération industrielle 2014-2020…
«Faire du PowerPoint n’est pas mon fort», a-t-il d’emblée souligné, pour insister sur le caractère pratique de la stratégie qu’il mène depuis avril dernier, notant que son objectif est de faire «un forage profond dans l’Industrie du Maroc».
Après avoir parlé de son parcours bien riche et rempli, Moulay Hafid Elalamy, qui n’a pas caché sa nostalgie pour le secteur qu’il a, a-t-il encore dit, dans son ADN, a précisé: «Lors de la dernière décennie, le Maroc a rêvé de devenir un acteur important dans les secteurs de l’aéronautique et de l’automobile. Beaucoup n’y ont pas tellement cru…». Pourtant aujourd’hui, a poursuivi le ministre, «nous avons Bombardier qui est leader et Renault. Je pense que nous avons raison de croire en l’avenir». L’avenir de l’Industrie qui passe bien sûr, selon Moulay Hafid, par cette «stratégie d’accélération industrielle».
Réussir n’est pas impossible, surtout quand on a le «courage» de rectifier, d’ajuster et de prendre exemple sur des modèles de réussite. Là, le ministre a relaté l’exemple chinois et souligné: «Dans le dernier plan quinquennal de la Chine, il est prévu d’augmenter le salaire minimum de 13% par an. Je crois que ce qui se passe en Chine est quelque chose de très grand. Nous devons regarder cela avec acuité. Il serait surtout dommage pour le Maroc de ne pas profiter de cette dynamique».
En effet, la Chine a entamé un revirement stratégique de taille. Ce pays, souhaitant se désengager légèrement de cette posture, a décidé de créer un pouvoir d’achat interne. Le SMIG dans ce pays asiatique étant de 500 dollars (contre 3.000 DH au Maroc), il est appelé à progresser de 13% annuellement pour arriver à 1.000 dollars après cinq ans. Avec une telle décision, les experts estiment que quelque 85 millions d’emplois devraient être créés par la Chine. L’objectif de la stratégie d’accélération industrielle est de capter 1% de ces emplois qui seront portés en grande partie par des industriels chinois, a encore expliqué le ministre.
Outre les défis de l’emploi et du haussement de la part de l’industrie dans le PIB, le ministre a évoqué ceux de la productivité et de l’informel. Sur le premier, Moulay Hafid Elalamy a déclaré que le royaume ne peut plus continuer de se vendre sur la seule base des salaires, mais plutôt de la productivité. Quant à l’informel, le ministre a avoué que combattre ce fléau par la «violence» a donné un résultat médiocre. Aujourd’hui, le choix est d’accompagner ce pan de l’économie. D’après le ministre, «des expériences tests en cours à Rabat pour la formalisation de l’informel, conduites par Mamoun Bouhadhoud, ministre délégué chargé des petites entreprises et de l’intégration du secteur informel», sont menées dans ce sens.
Ecosystèmes et outils de réussite
La rencontre entre le ministre et les investisseurs français n’a dévoilé que quelques chantiers, mais tout laisse à croire que d’autres sont déjà à un stade avancé, notamment en ce qui concerne la création d’écosystèmes, second ingrédient de la stratégie. Il s’agit en effet de réorganiser plusieurs filières de l’industrie en écosystème dans le but de «créer des écosystèmes performants dans différentes filières pour accélérer l’industrie», a souligné Elalamy, après avoir évoqué le lancement d’un premier écosystème destiné au câblage et la prise de conscience des industriels de la nécessité de s’organiser ainsi au profit de tous.
Par ailleurs, afin d’atteindre les objectifs assignés à la stratégie d’accélération, le ministre a souligné que les outils à mettre en place sont tout d’abord liés au financement et au foncier. Pour le premier, le Fonds de développement industriel sera doté chaque année de 3 MMDH, soit au final 21 MMDH, montant que le ministère a arrondi à 20 MMDH, pour toute la période. Quand au second outil, il sera mis à disposition en location et sur les 1.000 ha à mobiliser. Déjà 80 ha sont disponibles entre Berrechid et Settat. Pour Casablanca, où le foncier se fait rare, le ministère des Habous a mis à sa disposition 143 ha sis à Médiouna. Le projet de réhabilitation de cette zone est en cours et le lancement des travaux est prévu en janvier 2015. Pour les autres régions du royaume, le ministère dispose d’ores et déjà d’une cartographie des zones ayant un besoin et de celles qui sont saturées.
Hamid Dades