Afghanistan : Les talibans vont-ils gagner ?

Afghanistan : Les talibans vont-ils gagner ?

Les talibans ont été chassés du pouvoir. Ils n’ont pas été éradiqués d’Afghanistan. Avec patience, ils regagnent au fil des mois et des années le terrain perdu. On en est, dans la perspective d’un retrait américain, à se demander s’ils ne peuvent pas revenir. Pour certains, leur retour est même inévitable.

Dans la situation actuelle, comme en Syrie, la stratégie de retrait de Trump paraît donc à haut risque et elle est condamnée par de nombreux spécialistes.

La situation actuelle en Afghanistan «ne permet pas» un retrait des forces de la coalition de ce pays, a déclaré le général Joseph Votel, chef des forces américaines au Moyen-Orient, citant notamment le faible degré de préparation des forces armées afghanes. «Les forces afghanes dépendent du soutien de la coalition», a-t-il ajouté, alors qu’on lui demandait si l’armée afghane était capable d’assurer la sécurité du pays.  

«Mon avis est que toute décision de réduire les forces en Afghanistan devrait être prise après une pleine consultation de nos partenaires de la coalition et, bien sûr, du gouvernement afghan», a ajouté le chef du commandement central américain.  

Le général Votel, qui doit prendre sa retraite à l’été prochain, a ainsi paru critiquer la décision unilatérale de M. Trump de retirer les troupes américaines de Syrie, sans consultation des alliés, qui a provoqué la démission du ministre de la Défense, Jim Mattis.  

Selon un plan du Pentagone, révélé la semaine dernière par le New York Times, l’ensemble des 14.000 soldats américains déployés dans le pays pourraient être rentrés à l’horizon 2021-2023. C’est du moins un scénario à l’étude.

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Dans cette situation, les pourparlers de paix avec les talibans semblent plus que délicats. Le département d’Etat a indiqué que les pourparlers avaient permis de nouveaux «progrès», ajoutant que beaucoup reste à faire et refusant de fixer une date-butoir. Lors d’un échange avec des lycéens, dans l’Etat américain de l’Iowa, le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo, a dit espérer que son émissaire à Doha fasse des «progrès».

«J’espère qu’il fera suffisamment de progrès pour que je puisse aller là-bas dans quelques semaines et contribuer moi-même à faire un peu avancer les discussions», a-t-il affirmé. Interrogé mardi 5 mars, son porte-parole n’a pas voulu évoquer un éventuel voyage du secrétaire d’Etat à Doha ou en Afghanistan.

Les talibans veulent, bien sûr, obtenir le retrait total des troupes étrangères et ils se sentent en situation de force. «Dans leur hâte d’obtenir un accord de paix, la délégation américaine pourrait faire plus de concessions qu’elle ne l’aurait fait idéalement», résume Michael Kugelman, vice-directeur du pôle Asie du Wilson Center, un groupe de recherche américain. «En d’autres termes: les talibans sont clairement en position de force et pourraient s’arroger en toute légalité du pouvoir politique dans l’Afghanistan post-guerre».

Et pendant les pourparlers, la guerre continue.

Au moins vingt-trois membres des forces de sécurité afghanes ont été tués, vendredi 1er mars, dans une attaque revendiquée par les talibans contre la base militaire de Shorab, la seconde plus vaste en Afghanistan, où un nombre indéterminé de soldats américains sont stationnés.

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Les envoyés spéciaux à Kaboul notent que la population se prépare au retour des talibans et jugent même ce dernier inévitable. Un pouvoir qu’ils devraient partager, mais certains n’y croient pas. Si cette perspective effraie de nombreux observateurs et membres de la société civile, d’autres, déçus par la  fausse démocratie afghane, s’en réjouissent.

De 1996 à 2001, les talibans ont fait régner la terreur au nom de la loi islamique. Mutilations, lapidations et autres sévices réprimaient ceux qui osaient contrevenir à leurs règles strictes. Plusieurs organisations des droits humains ont manifesté leurs craintes par rapport à un éventuel retour des talibans. La semaine dernière, quelque 700 femmes se sont rassemblées à Kaboul, sous un immense chapiteau, pour réclamer que, quoi qu’il advienne, leurs droits soient garantis. Parmi les Afghans qui s’inscrivent en faveur d’un retour au pouvoir des talibans, beaucoup sont persuadés que le groupe a changé. Hassibullah, 20 ans, entraîne une équipe de foot de quartier. Il sait qu’à l’époque, la musique, la télévision et le sport étaient interdits… Mais si les talibans devaient reprendre le pouvoir, ils auraient d’autres priorités que de l’empêcher de chausser ses crampons, assure-t-il. «Leur plan, c’est seulement de reconstruire le pays, en mettant fin à ce gouvernement qui ne fait rien pour nous».

Le retour des talibans, c’est l’échec militaire de la coalition, mais aussi l’échec politique du pouvoir actuel Afghan et de ses prédécesseurs.

Patrice Zehr

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