A l’approche de l’Aïd Al Adha, l’offre en matière d’effectifs du cheptel ovin et caprin destinés à l’abattage s’élève, selon le ministère de l’Agriculture et de la Pêche maritime, à 7,7 millions de têtes. Une annonce tout aussi rassurante qu’embarrassante.
La demande en la matière, estimée à 5,3 millions de têtes, sera ainsi largement couverte. Cette assurance du ministère reste pourtant inquiétante, puisqu’elle ne prend pas en considération certaines fluctuations du marché.
La version rue…
Ainsi, alors qu’on n’est qu’à un peu plus d’une semaine du jour «J», le marché, d’habitude animé et très convoité par la clientèle, est encore désert. Il est même inexistant depuis qu’on a décidé de ne plus dédier des espaces à cette activité. Beaucoup de «souks» ont été rasés ou n’existent plus.
Les marchands recourent ainsi aux dépôts et garages qu’ils louent d’habitude entre 7.000 et 15.000 DH, un prix qui peut aller jusqu’à 20.000 ou 25.000 DH selon la situation du local et les prévisions de vente faites par le propriétaire qui décide du prix.
Sur le volet prix, ce qui se pratique aujourd’hui chez les rares vendeurs en place laisse déjà entrevoir une hausse qui fait peur. On parle de prix de départ variant entre 3.500 et 4.500 DH la pièce et ça peut aller chercher dans les 6.000 à 6.500 DH en fonction du poids, de l’âge et de la race. Le «Sardi» est d’ailleurs toujours en tête, mais encore faut-il avoir les moyens pour s’en procurer un bon!
Les gens qui se rabattaient sur la vente au kilo n’ont pas été non plus épargnés. On parle déjà d’une augmentation entre 3 et 5 dirhams par kilo, vendu jusque-là entre 48 et 50 DH. De plus, sur ce marché-là, le choix n’est pas très grand, vu la taille des bêtes qui y sont mises en vente…
Tout cela promet déjà un «Aïd» pas très «gai», surtout qu’il «tombe mal» et intervient juste après les vacances qui ont été précédées par le Ramadan et sont suivies par la rentrée scolaire… C’est pour dire que cette succession d’«heureux évènements» a bien ses effets sur les bourses. Surtout chez des citoyens dont le pouvoir d’achat est à plat, sinon inexistant. Si de surcroît il n’est même pas épargné par les circonstances, comment penser à l’«Aïd» et à quoi servira-t-il d’annoncer une offre nettement supérieure à la demande quand cette dernière risque d’être absente?
… Et la version officielle
Pour ceux qui ne se seraient pas essoufflés et qui aurait encore envie de faire la fête, c’est tout de même réconfortant de savoir, et de source officielle, notamment le long communiqué du ministère, que notre cheptel se porte à merveille et que pour cette année, les disponibilités en ovins et caprins destinés à l’abattage à l’occasion de l’Aïd Al Adha s’élèvent à 7,7 millions de têtes, dont 4,6 millions d’ovins mâles et 3,1 millions d’agnelles et de caprins» et que la demande est estimée à 5,3 millions de têtes, dont 4,2 millions d’ovins mâles et 1,12 million d’agnelles et de caprins.
L’approvisionnement du marché a pu se dérouler dans de «bonnes conditions» grâce aux efforts conjugués des acteurs de la filière et de l’Etat, notamment à travers l’opération sauvegarde du cheptel.
En dépit du déficit hydrique enregistré durant la campagne agricole 2013-2014, les prix des matières premières entrant dans l’alimentation animale sur le marché national ont connu une légère baisse, selon le ministère qui a noté que la campagne agricole 2013-2014 a connu un report de stock important des disponibilités fourragères du cheptel provenant de la campagne agricole précédente qui a été caractérisée par une bonne production agricole.
L’état sanitaire des animaux est «bon» dans l’ensemble des régions du Royaume, grâce aux programmes de surveillance continue, au renforcement des encadrements sanitaires, aux campagnes prophylactiques et aux traitements contre les maladies réputées contagieuses à incidences économiques, menés par les services vétérinaires relevant de l’Office national de la sécurité sanitaire et alimentaire (ONSSA).
Les transactions commerciales des animaux d’abattage à l’occasion de l’Aïd permettront de réaliser un chiffre d’affaires dépassant les 8,5 milliards de dirhams, dont la grande partie sera transférée au milieu rural, permettant ainsi aux agriculteurs de faire face aux dépenses des autres activités agricoles, en particulier durant cette période de lancement de la campagne agricole 2014-2015.
Ces ressources financières contribueront à dynamiser les activités économiques globales dans le monde rural, a poursuivi le ministère, notant que l’opération de l’Aïd Al Adha constitue une opportunité pour améliorer la trésorerie des agriculteurs pour lesquels l’élevage de petits ruminants représente la principale source de revenus, notamment dans les vastes zones de parcours qui couvrent environ 70% de la superficie du pays.
Des éléments ont été pris en considération pour l’évaluation de l’offre et de la demande à l’occasion de la fête du sacrifice, à savoir les données statistiques réalisées par le ministère sur les effectifs du cheptel ovin et caprin, les données sur les abattages à l’occasion de l’Aïd Al Adha de l’année précédente et les abattages d’ovins (mâles et femelles) enregistrés au niveau des abattoirs contrôlés, ainsi que les normes zootechniques (taux d’agnelage, taux de mortalité) observées sur le cheptel ovin et caprin dans les différentes régions du royaume. Le ministère assurera un suivi rapproché de l’approvisionnement des différents marchés pour observer de près les cours des animaux commercialisés, notamment au niveau des grandes surfaces, des souks ruraux et des principaux points de vente au niveau des villes, ainsi que de l’état sanitaire des animaux par les services vétérinaires relevant de l’ONSSA.
Hamid Dades