Al Hoceima : Que doit faire l’Etat?

Al Hoceima : Que doit faire l’Etat?

Depuis octobre 2016, les manifestations s’enchaînent à Al Hoceïma, exprimant les revendications socio-économiques des habitants du Rif.

Bien avant que la crise n’éclate, provoquée par la mort du poissonnier Fikri, des promesses avaient été faites.

C’était en 2015, lors du lancement d’un programme dédié à la province d’Al Hoceima, baptisé «Al-Hoceima, Manarat Al Moutawassit».

Mais cette province, où le chômage des jeunes est élevé, n’a pas vu son état s’améliorer.

D’où, la défiance à l’égard des décideurs politiques et économiques.

Aujourd’hui, la contestation a enflé et continue de progresser dangereusement.

Que doit faire l’Etat ?

La question se pose pour Al Hoceïma, où la situation est explosive, mais aussi dans d’autres régions du Maroc, où les attentes et l’impatience des habitants ne sont pas moindres.

Comment répondre aux revendications sociales des habitants du Rif? Que doit faire l’Etat pour apaiser la tension dans la région d’Al Hoceima? La question préoccupe en tout cas, au plus haut point, les membres du nouveau gouvernement d’El Othmani.

Après le grand rassemblement, qui s’est déroulé sans incident, jeudi 18 mai (2017) dans la ville d’Al Hoceima, une délégation de haut niveau s’est rendue dans la région, lundi  22 mai, pour apaiser la situation. Composée de plusieurs ministres et directeurs d’institutions publiques concernées par les chantiers de développement de la province d’Al Hoceima, les membres de cette délégation ont tenu une réunion élargie avec les élus locaux, les représentants de la société civile et la population locale, pour la mise en exécution du Programme de développement, prévu pour la région depuis plus de deux ans, notamment en matière d’infrastructures et d’emploi. Une grande mobilisation est ainsi déclenchée au niveau des différents départements gouvernementaux, pour la réalisation des engagements de l’Etat concernant l’accélération de la mise en œuvre des projets contenus dans le Programme de développement spatial de la province d’Al-Hoceima 2015-2019 (programme «Al-Hoceima, Manarat Al Moutawassit » qui avait été lancé en 2015 par le Roi).

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Ainsi, la voie express Taza-Al Hoceima, un projet stratégique destiné à renforcer l’attractivité des investissements et à désenclaver plusieurs communes rurales, sera fin prêt au début de 2019, a annoncé le ministre de l’Equipement, du Transport, de la Logistique et de l’Eau, Abdelkader Amara. Selon lui, l’état d’avancement de ce projet d’envergure est de l’ordre de 70%. En matière d’emploi, il a été annoncé la création immédiate de quelque 200 postes de travail dans la région (Béni Boufrah, Ajdir, Béni Jmil, etc.).

Cette annonce et d’autres viennent ainsi après plus de six mois de manifestations contre  «la Hogra», «le chômage», «la répression», «la marginalisation», «le sous-développement».

Il y a sept mois, rappelons-le, la province d’Al Hoceima avait connu sa plus importante protestation sociale, suite à la mort, fin octobre 2016, d’un poissonnier, Mohcine Fikri, broyé accidentellement par un camion-benne à ordures. La mort de ce dernier a été l’étincelle qui a déclenché la colère d’un mouvement «Hirak» de contestation dans la région du Rif.

Ce mouvement contestataire, qui se poursuit aujourd’hui et rejette les accusations de séparatisme de la majorité gouvernementale, demande un changement de la situation et la mise en œuvre des doléances déjà présentées, pour arrêter les manifestations.

Nacer Zefzafi, l’un des plus connus du mouvement, devenu son chef de file, a exigé, mardi 23 mai, la concrétisation immédiate de toutes les revendications des manifestants. Autrement, dit-il, la mouvance est prête à organiser, le 20 juillet, un grand rassemblement d’un million de personnes. «La venue des membres du gouvernement sous la pression de la rue est certes une grande victoire  pour notre ‘‘Hirak’’. Mais l’expérience a mis en évidence une contradiction entre les paroles des responsables concernant la gestion publique et la réalité sur le terrain», dit-il. Et cet activiste d’ajouter: «Si rien n’est fait pour réellement répondre aux revendications socio-économiques des contestataires, nous allons tenir, le 20 juillet prochain, une grande marche, avec les MRE». Pendant plusieurs mois, insiste-t-il, «les gens n’ont pas été écoutés et aucune solution n’a été apportée à leurs revendications».

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L’Etat, de son côté, met en avant le retard qu’il y avait dans la constitution du gouvernement, lequel a examiné, jeudi 18 août, la situation à Al Hoceima, lors d’un conseil de gouvernement.

La visite de la délégation ministérielle dans la région se fixe pour objectif principal de s’enquérir de près de l’état d’avancement des projets en cours de réalisation et d’examiner les moyens à mettre en œuvre pour surmonter les difficultés que rencontrent d’autres projets dans la province d’Al Hoceima.

Du côté des associatifs locaux, on est pessimiste. Ils soulignent que les militants du Hirak sont las des paroles sans lendemain. «Certes, les revendications des gens avaient besoin de solutions immédiates, que ce soit sur le plan social ou celui économique. Mais si les responsables de la ville avaient tenté de répondre progressivement aux revendications des contestataires, nous n’en serions pas là, aujourd’hui», soulignent les mêmes sources.

A Al Hoceima, déplore-t-on, des projets, prévus dans la région depuis deux ans, n’ont pas encore été lancés. «Ce qui a conduit à cette contestation massive, c’est que plusieurs projets ont été programmés pour la région et ont même été présentés devant le Souverain. Mais à ce jour, ils n’ont pas été mis à exécution». Pour ces associatifs, «la réalité a mis en lumière les fragilités et la mauvaise gestion de ce dossier par les responsables de cette ville où les contestataires n’ont eu d’autre choix que de descendre dans la rue».

Naîma Cherii

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