Alep est en train de tomber. Pour le régime Syrien, la ville est libérée. L’armée syrienne et les Russes, malgré la «communauté internationale» qui manifeste son indignation et parle de crime de guerre, sinon de génocide, vont gagner.
Ils ont gagné également la bataille diplomatique de l’ONU.
L’impuissance de l’ONU, aujourd’hui, rejoint celle des USA.
L’armée syrienne a pris le contrôle de tous les quartiers de la vieille ville d’Alep qui était aux mains des insurgés, a annoncé, mercredi 7 décembre, l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), organisation sise à Londres et s’appuyant sur un réseau d’informateurs en Syrie. Les combattants rebelles se sont retirés des parties de la vieille ville qu’ils contrôlaient encore après la reconquête par l’armée des quartiers voisins de Bab Al-Hadid et Aqyul. Les événements s’accélèrent.
Les forces gouvernementales, appuyées par l’aviation russe et des milices chiites libanaises, iraniennes et irakiennes, semblent désormais sur le point de s’emparer de l’ensemble des quartiers orientaux de la ville où vivent encore 200.000 personnes, selon les Nations Unies.
Selon les forces russes, l’armée s’est emparée de 35 quartiers depuis le début de sa progression dans la ville, devenue un enjeu majeur de la guerre civile qui ravage le pays depuis près de six ans. Le gouvernement syrien a fait savoir qu’il n’accepterait aucune offre de cessez-le-feu à Alep-Est tant que les mouvements qu’il considère comme des organisations terroristes n’auront pas évacué le secteur.
L’armée syrienne a déclaré qu’elle entendait terminer la reconquête d’Alep avant l’arrivée du nouveau président américain Donald Trump à la Maison Blanche, le 20 janvier. Moscou a fait valoir qu’une cessation des hostilités permettrait aux rebelles de se regrouper. C’était donc, d’un point de vue stratégique, inacceptable. Moscou n’entend pas se faire voler sa victoire.
Aux Nations Unies, la Russie et la Chine ont donc une nouvelle fois mis leur veto à un projet de résolution du Conseil de sécurité exigeant une trêve de sept jours à Alep et l’arrêt des combats dans l’ensemble de la Syrie. L’ONU ne peut rien faire, sauf se lamenter.
La partie-est de la grande ville syrienne d’Alep risque de devenir un gigantesque cimetière, si les combats ne cessent pas et si l’aide humanitaire reste bloquée, avait averti un haut responsable de l’ONU. Stephen O’Brien, patron des opérations humanitaires des Nations Unies, a appelé à l’aide le Conseil de sécurité, réuni en urgence à la demande de la France.
Mais les ambassadeurs des quinze pays ont dressé un constat d’impuissance, les Occidentaux rejetant la faute sur la Russie.
«Il est donc vital que le gouvernement syrien nous permette de déployer du personnel à Alep en toute sécurité et sans restrictions inutiles», a martelé M. O’Brien. Il s’est dit extrêmement inquiet pour les quelque 250.000 habitants pris au piège dans Alep-est. Ces personnes sont assiégées depuis près de 150 jours déjà et n’ont pas les moyens de survivre beaucoup plus longtemps. Il a déploré que «jusqu’à présent, nos appels, nos demandes et même les exigences de ce Conseil aient été largement ignorées» par les belligérants.
En réponse, les représentants américain, français et britannique se sont succédé pour accuser la Russie de bloquer toute solution.
L’ambassadeur français, François Delattre, a dénoncé le cynisme et la brutalité extrêmes qui président à l’offensive en cours du régime syrien à Alep, grande ville du nord de la Syrie. Il a déploré que les tentatives successives du Conseil, pour sauver la population d’Alep, se soient heurtées à la même fin de non-recevoir de la Russie. Le Conseil ne répond pas aux appels à l’aide des civils (d’Alep), parce que la Russie ne le veut pas, a résumé l’ambassadrice américaine, Samantha Power.
Ce Conseil a été totalement incapable d’agir, a reconnu l’ambassadeur britannique Matthew Rycroft. Pourquoi? Parce que la Russie a mis son veto, encore et encore.
L’ambassadeur russe, Vitali Tchourkine, a réaffirmé pour sa part la nécessité de poursuivre l’opération anti-terroriste à Alep. Il a accusé les Etats-Unis de ne pas avoir tenu leur promesse de séparer les militants supposés modérés et les terroristes du Front Al-Nosra. Il a accusé les Occidentaux de vouloir sauver des terroristes et d’utiliser des problèmes humanitaires à des fins politiques.
Alep n’évitera pas, semble-t-il, la chute finale et l’ONU le discrédit total.
Patrice Zehr
Mais comment réinventer une ONU qui soit efficace ?