Des affrontements ont éclaté, dimanche soir à Ouargla (600 KM au sud d’Alger), entre la police et des manifestants, descendus dans la rue pour exprimer leur colère et leur indignation suite de la condamnation d’une figue du hirak à 7 ans de prison ferme.
Ce verdict contre Ameur Guerrache, un activiste connu et bénéficiant d’une importante audience dans cette wilaya du sud du pays, riche en hydrocarbures mais qui connaît l’un des taux les plus élevés de chômage dans le pays, a suscité de fortes tensions qui ont dégénéré, en fin de journée, en émeutes violents entre des dizaines de jeunes manifestants et les forces de l’ordre.
Les policiers ont recouru à des balles en caoutchouc pour disperser des jeunes manifestants qui ont fini par déclencher des émeutes dans plusieurs quartiers de la ville d’Ouargla.
Des pneus ont été brûlés et des routes coupées, alors que les affrontements se sont poursuivis jusqu’à une heure tardive dans la nuit du dimanche au lundi.
Une vidéo circulant sur les réseaux sociaux montrait des jeunes lancer des pierres en direction de policiers, au milieu de gaz lacrymogène.
Selon le Comité national pour la libération des détenus (CNLD), Ameur Guerrache a été condamné pour “apologie du terrorisme”, “incitation aux actes terroristes”, “atteinte au président de la République” et “incitation à attroupement”.
Le parquet avait requis 10 ans de prison ferme.
Ameur Guerrache, qui a été arrêté le 1er juillet 2020 à 4 h du matin, est considéré comme l’un des plus grands animateurs d’un mouvement citoyen favorable à la défense des droits sociaux et civiques des chômeurs de la région d’Ouargla et du grand sud algérien.
Poète et militant engagé respecté par la population locale à Ouargla, il a été placé sous mandat de dépôt le 2 juillet 2020 par le Procureur près le tribunal de la ville d’Ouargla tout en le soumettant à une minutieuse enquête sécuritaire qui finira par lui valoir l’accusation de “porter atteinte à l’unité nationale, offense à la personne du Président de la République et de participer à un mouvement politique séparatiste visant à inculquer des idées radicales et extrémistes aux jeunes de cette wilaya”, selon les médias algériens.
D’après les mêmes sources, il s’agit d’”accusations gravissimes” qui reposent sur les diverses vidéos postées sur les réseaux sociaux par Guerrache dans lesquelles ce militant dénonce l’exclusion des wilayas du sud algérien de tous les programmes de développement local.
Au cours des deux derniers jours, plusieurs organisations algériennes et internationales ont exprimé leurs inquiétudes quant à la répression du droit à la liberté d’expression dans ce pays maghrébin.
Dans ce sens, un grand nombre d’eurodéputés ont interpellé le Haut représentant de l’Union européenne pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, Josep Borrell, sur les intimidations et les abus en tous genres que subissent toujours les activistes du Hirak.
Dans une lettre adressée à M. Borell, ces eurodéputés, toutes tendances politiques confondues, affirment que plusieurs rapports d’ONG, internationales et nationales, “font état d’une répression continue des militants pacifiques” du mouvement populaire.
Selon eux, ces rapports ont dévoilé plusieurs cas de “tortures et d’abus contre les détenus d’opinion”.
Les eurodéputés estiment qu’il est “impératif” que ces violences fassent “l’objet d’une enquête indépendante” pour identifier les responsables, rappelant la récente résolution du Parlement européen “sur la détérioration de la situation des droits humains en Algérie” et qui exige le lancement d’investigations sur ces violations répétées du droit à la liberté d’expression en Algérie.
Parmi ces rapports figure celui de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme qui avait fait état de centaines de personnes interpellées dans une vingtaine de wilayas à l’occasion du 2è anniversaire du Hirak.
Amnesty International a dénoncé, quant à elle, “une stratégie délibérée des autorités algériennes visant à écraser la dissidence”.
Il s’agit d’”une stratégie qui vient contredire” les promesses des autorités algériennes en matière de respect des droits humains, a constaté Amnesty International.
De son côté, la Haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’Homme, Michelle Bachelet, a invité le gouvernement à continuer sur la voie du dialogue et à “immédiatement libérer tous ceux détenus pour avoir participé pacifiquement à des manifestations”.
Après un an d’arrêt, Covid-19 oblige, des milliers d’Algériens sont descendus dans la rue, vendredi dernier, marquant un retour spectaculaire des marches hebdomadaires du hirak réclamant notamment le départ du régime et l’instauration d’un Etat de droit.
LR/MAP