Ces derniers temps, le Président algérien, Abdelmagid Tebboune, est prolixe.
Il multiplie les sorties médiatiques, mais chaque fois qu’il se lâche, on a le choix entre s’inquiéter pour lui ou s’inquiéter pour l’Algérie.
De ses propos se dégagent en effet, de plus en plus, certains signes troublants.
Pas plus tard qu’il y a quelques jours –le 12 juin (2021)- alors qu’il participait aux élections législatives qu’il a avancées d’un an, il faisait, à propos du taux de participation à ces élections, cette déclaration qui laisse pantois. «Pour moi, le taux de participation n’a pas d’importance. Ce qui m’importe, c’est que ceux pour lesquels le peuple vote aient une légitimité suffisante», a dit le Président.
Pensée profonde sans doute ! A une contradiction près: n’en déplaise au Président, c’est à travers le taux de participation que l’on sait si la légitimité des élus est «suffisante» ou pas.
Par exemple, aux législatives de cette semaine, avec un taux de participation de 23% et des poussières –et donc avec un Peuple qui s’est abstenu à quelque 77%- le Président Tebboune estime-t-il que les nouveaux représentants de ce Peuple ont une «légitimité suffisante» ? A ses yeux peut-être, en référence à sa propre élection qui a connu une abstention de plus de 60%… Mais certainement pas aux yeux des millions d’Algériens qui ont boycotté ce scrutin, qualifié de «mascarade électorale».
Autre pensée profonde, exprimée à propos du Hirak et de l’ère Bouteflika.
Le Président Tebboune nous apprend aujourd’hui que le «Hirak béni» a sauvé l’Algérie de la «Îssaba» (le gang) qui dirigeait le pays sous l’ère Bouteflika (les mots entre guillemets sont les propres termes du Président). On en tombe sur le c… (sur le carreau, bien sûr).
Outre son hypocrite tentative de s’approprier le Hirak –qui est «béni» dans la Constitution et dans sa bouche, mais interdit dans la rue et ses membres emprisonnés- le Président semble frappé d’amnésie. Ne faisait-il pas lui-même partie de cette «Îssaba», des années durant (ce qui a même conduit son fils derrière les barreaux pour trafic de cocaïne)? Et n’en fait-il pas toujours partie, aujourd’hui, ainsi que les galonnés qui continuent d’avoir la haute main sur le Pouvoir et les richesses de l’Algérie, confisquées au Peuple ?
Illogiques, les déclarations du Président Tebboune sont aussi parfois inquiétantes. Tel est l’avis de tous ceux qui l’ont entendu parler de la Libye. C’était lors de son entretien accordé à la télévision quatarie «Al Jazira».
Monsieur le Président a fait une révélation qui vaut son pesant d’or. Il a déclaré qu’il était prêt à intervenir… Militairement (!) en Libye. La raison de cette éventuelle croisade en pays voisin ? «Tripoli est une ligne rouge», il n’aurait pas permis qu’elle «tombe entre les mains de mercenaires» et son message est arrivé aux «destinataires concernés», a fanfaronné l’auto-proclamé justicier du Maghreb, qui a dû faire trembler lesdits destinataires (non seulement le Maréchal Haftar, mais surtout ses soutiens: le Caire, les Emirats Arabes Unis, la Russie, les Etats Unis, la France !!).
Le Président Tebboune, enhardi par sa nouvelle Constitution qui permet désormais à l’armée algérienne de guerroyer hors d’Algérie, se voit en terreur du Maghreb, à l’image d’un Erdogan au Proche Orient. Sauf que le Président algérien n’a rien du Président turc. Ni l’envergure, ni la réussite économique du pays, ni ne présente un véritable intérêt géopolitique aux yeux des grandes puissances. En engageant son pays dans une guerre, dans la région –si tant est que ces puissances le laissent faire- il ne fera qu’aggraver la situation du Peuple algérien qui ne s’identifie à aucune des sombres ambitions du Régime, aspirant à la prospérité et non à un aventurisme destructeur.
Quant aux «pensées profondes» que le Président algérien a exposées au sujet du Sahara, notamment à l’hebdomadaire français «Le Point», elles ont reçu au Maroc l’accueil qu’elles méritaient, inspirant tantôt un irrépressible fou rire, tantôt une profonde compassion pour le Peuple algérien, dont les gouvernants sont une insulte à son intelligence.
Comment le Président Tebboune peut-il parler d’offrir un territoire et sa population (il parle du Sahara) au Roi du Maroc, juste pour lui faire plaisir ?
Eh, Mr le Président, debout ! Il est temps de se réveiller. D’abord, le Sahara n’est pas un jouet réclamé par caprice. Le Maroc, à qui il appartient, se bat pour le récupérer, dans le cadre du parachèvement de son intégrité territoriale, depuis les années 50 ! Avant même que l’Algérie n’existe en tant que telle et encore moins les mercenaires du Polisario ! Combien de fois faut-il vous le répéter ? Ensuite, il n’y a rien à offrir à qui que ce soit. Le Sahara est dans son Maroc et le Maroc est dans son Sahara. Il y lance des projets que vous n’arrivez même pas à initier dans votre grand pays. Vous pouvez continuer d’abriter, financer, armer et vous mobiliser diplomatiquement pour les mercenaires que vous soutenez, vous perdez votre temps et votre argent (l’argent du Peuple algérien).
Vous, vous voulez embraser la région et la tirer vers le bas, comme vous avez tiré vers le bas cette Algérie pourtant connue pour être le pays le plus riche du Maghreb.
Le Maroc, lui, a engagé, au Sahara, une stratégie de développement local, régional et continental, pour la prospérité de tout l’environnement, voire d’une bonne partie du continent. Des infrastructures routières, maritimes, des pôles industriels, des projets de développement humain, des parcs éoliens, des stations de dessalement, un méga-port (le port Atlantique-Dakhla)… Tout cela est en chantier ! Et vous, au lieu de vous joindre à cette dynamique, dans l’intérêt de tous les Peuples de la région, continuez d’incarner l’obstacle, l’entrave, la nuisance… Et de croire qu’une guerre médiatique cassera ce formidable et tant utile élan !
Bahia Amrani