Algérie : Il suffirait pourtant d’un mot !

A observer ce qu’il se passe, aujourd’hui, en Algérie, toute personne sensée ne peut qu’être frappée de consternation !

Voilà un peuple, qui a tout accepté de ses gouvernants depuis l’Indépendance du pays, il y a près de 60 ans, y compris la chape de plomb sous laquelle il a été maintenu politiquement, mais qui aujourd’hui, dans la majorité de ses composantes –hommes et femmes politiques, intellectuels, société civile, jeunes, étudiants- exprime une seule revendication… Une et une seule: qu’on lui épargne la mascarade d’une 5ème candidature, à l’élection présidentielle, d’un homme malade, âgé de 81 ans, cloué dans un fauteuil roulant, ne pouvant ni bouger, ni parler…

Or, face à cette revendication populaire que le monde entier trouve rationnelle et tout à fait normale, le pouvoir en place, lui, joue la carte de la terreur, alternant répression/arrestation des opposants au 5ème mandat du Président Bouteflika et mises en garde du reste des citoyens contre un réédition de la décennie 90.

Il est vrai que la décennie 90 a été une décennie noire qui a traumatisé le peuple algérien. Et pour cause… Cette décennie de guerre civile s’est soldée par quelque 200.000 morts, dont 500 manifestants tombés sous les balles de l’armée, une soixantaine de villageois de Thalit égorgés (1997), 250 habitants de Bentalha (banlieue d’Alger) collectivement massacrés (nuit cauchemardesque de 1997)…

Mais cette décennie a aussi beaucoup servi le pouvoir, lequel en agite le spectre chaque fois que le peuple montre des velléités de révolte ou de simple désaccord…

Aujourd’hui donc, c’est encore la référence à cette macabre décennie que tentent d’utiliser ceux qui mettent en avant la candidature de Bouteflika pour s’agripper au pouvoir… Au point qu’il leur échappe une autre référence, plus récente et plus fraîchement gravée dans la mémoire des jeunes générations algériennes: celle du «Printemps arabe».    

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Or, à partir du 18 février, date à laquelle a été officiellement annoncée la candidature du Président Bouteflika pour un 5ème mandat, les manifestations se sont poursuivies, sans discontinuer, aux quatre coins de l’Algérie, y compris dans la capitale Alger où les manifestations sont interdites depuis 2001.

Des manifestations qui ne s’essoufflent donc pas et sont au contraire, relayées chaque fois par de nouveaux acteurs algériens, au sein du pays comme dans la Diaspora.

Ce «Hirak», au début plus ou moins timide, dont on a dit qu’il a pu avoir été lancé par les Généraux limogés par le clan Bouteflika (les manifestations comme représailles étant la spécialité de l’ex-patron du DRS, le Général Mediène), voit ses rangs grossir peu à peu. Tantôt sous la colère du peuple en général; tantôt sous l’impulsion du Mouvement Mouwatana, qui réunit des partis politiques, des associations, des syndicats, des journalistes et de simples citoyens ; tantôt sous la conduite d’électrons libres, comme Rachid Nekkaz, le riche homme d’affaires algérien qui défie le pouvoir avec un certain succès auprès des jeunes, sur les réseaux sociaux…

En même temps que de prendre de l’ampleur, le mouvement des manifestants durcit le ton. Le message est clair: le peuple ne veut pas du 5ème mandat du Président Bouteflika.

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Tous les slogans rappellent ainsi ceux du «Printemps arabe»…   

Ce qui est consternant, c’est que le pouvoir algérien s’obstine à ne pas voir le ridicule de cette candidature au 5ème mandat et qu’il veuille coûte que coûte la maintenir, l’imposer, en ne réalisant pas le danger que son entêtement fait courir au pays.

Que ce soit sur un ton conciliant, comme l’appel du 1er ministre Ouyahia à s’exprimer dans les urnes, ou sur un ton menaçant, comme les sorties du Général Gaïd Salah, obligeant parfois les autorités à censurer son propos pour ne pas ajouter de l’huile sur le feu (suppression de la vidéo où il a traité les manifestants de «dupes»), le pouvoir tente tout ce qu’il peut pour mettre un terme aux manifestations.

Pourtant, il suffirait d’un mot pour calmer les esprits. Ce mot, ce serait: «D’accord»… D’accord pour la non-présentation de la candidature du Président Bouteflika à un 5ème mandat.

Mais le pouvoir n’est pas près de donner cet accord, pour la simple raison qu’il renoncerait par la même occasion à tout un système garantissant ses propres privilèges. Pour le clan Bouteflika, les hommes qui le servent et les militaires qui l’ont rejoint, laisser tomber le Président, c’est tout laisser tomber. Notamment leurs pouvoirs.

C’est donc le Peuple algérien qui devra plier ? Les prochains jours nous le diront… Peut-être, bien avant le 18 avril 2019, date fixée pour la prochaine élection présidentielle en Algérie.

Bahia Amrani

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