Algérie : L’art de faire du neuf avec du vieux

Algérie : L’art de faire du neuf avec du vieux

À y regarder de plus près, on s’aperçoit que les cinq candidats retenus pour l’élection présidentielle du 12 décembre imposée par le régime, incarnent la continuité, alors que le mouvement de contestation qui secoue le pays depuis plus de 10 mois, exige un changement radical du système.

Aucun des candidats retenus pour la course à la présidentielle algérienne programmée pour le 12 décembre 2019, n’incarne le changement tel qu’exigé par les manifestants. Pour le 41ème vendredi consécutif (29 novembre 2019), ils ont été nombreux à réitérer leurs revendications qui se résument au changement radical du régime, outre le départ de ses symboles restants et à leur tête, le chef d’état-major de l’armée Ahmed Gaïd Salah. Toutefois, les profils des candidats retenus pour le scrutin présidentiel en Algérie, confirment de manière flagrante, que la rupture entre le peuple algérien et ses dirigeants est définitive. Tous ont été à un moment où un autre, liés au cercle présidentiel.

Changement! Vous avez dit changement?

Le plus connu d’entre eux est Ali Benflis. Agé de 75 ans, ce magistrat de formation s’est déjà présenté à deux reprises contre Abdelaziz Bouteflika en 2003 puis en 2014, arrivant à chaque fois en deuxième position. Benflis a beau marteler qu’il incarne l’opposition, cela ne convainc pas les manifestants. En 2014, lors de la précédente campagne présidentielle algérienne, il déclarait pourtant: «J’incarne une autre forme de protestation contre un système corrompu et vieillissant». Ces mots sonnent comme ceux que l’on entend dans les grandes villes algériennes, depuis le début des manifestations contre le régime en février 2019. Les  manifestants ne sont pas prêts d’oublier qu’Ali Benflis a été premier ministre de 2000 à 2003 sous Abdelaziz Bouteflika et qu’il a lui-même dirigé sa campagne électorale. Cette année-là, Bouteflika avait entamé son premier mandat sur les cendres d’une Algérie meurtrie par une décennie de guerre civile (décennie noire) qui a fait plus d’un million de morts.

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En face de Ali Benflis, un autre ancien premier ministre algérien a déposé sa candidature pour la présidentielle du 12 décembre 2019. Il s’agit de Abdelmajid Tebboune. Tebboune se présente comme indépendant, quoique à 73 ans, il a plusieurs fois été préfet, entre autres fonctions officielles. En 1999, il est nommé ministre de la Communication. Tout au long de la décennie 2000, Tebboune fera des allers retours au gouvernement, sans pour autant s’éloigner de Abdelaziz Bouteflika qu’il représentera à plusieurs reprises dans les missions à l’étranger. En mai 2017, Abdelmajid Tebboune est nommé du gouvernement. Il restera trois mois à ce poste avant d’être limogé sur fond de lutte des clans au sommet de l’Etat.  

Azeddine Mihoubi, Abdelkader Bengrina et Abdelaziz Belaïd, sont trois autres anciens proches de Abdelaziz Bouteflika, candidats à la présidentielle algérienne. Mihoubi, 60 ans, dirige depuis quelques mois le Rassemblement National Démocratique (RND), pilier de la coalition ayant soutenu Bouteflika au cours de sa présidence. Il a été, jusqu’en mars 2019, le dernier ministre de la Culture du président déchu.  Bengrina est, depuis quelques semaines, la risée des réseaux sociaux, en raison de son acharnement à vouloir se présenter comme le candidat du Hirak. Abdelkader Bengrina se présente pour sa part sous les couleurs d’El Binaa Al Watani, un parti membre d’une coalition islamiste dont est issu l’actuel président de l’Assemblée nationale, Slimane Chenine. Entre 1997 et 1999, sous la présidence de Liamine Zéroual, Abdelkader Bengrina a été ministre du tourisme. Son parti a ensuite soutenu Abdelaziz Bouteflika. Les meetings de Bengrina sont presque systématiquement perturbés par des manifestants du Hirak quand ils ne sont pas purement et simplement empêchés comme ça a été le cas, vendredi 29 novembre 2019 en Kabylie. Enfin, le cinquième candidat à la présidentielle, n’est autre que Abdelaziz Belaïd. Ancien cadre du Front de Libération Nationale (FLN) au pouvoir depuis l’indépendance du pays en 1962, Belaïd a depuis fondé son parti le Front El Moustakbal (FM), également proche du pouvoir. Par le passé, il a appartenu à des associations de jeunes qui soutenaient le président algérien déchu, Abdelaziz Bouteflika.  

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ML

Diviser pour mieux régner

Face à la ténacité du mouvement de protestation qui secoue l’Algérie depuis février 2019, le régime incarné par Gaïd Salah tente de semer la division au sein de la société. Après la mobilisation de vendredi 29 novembre 2019 contre la présidentielle du 12 décembre, une contre-manifestation a eu lieu samedi 1er décembre, en soutien au prochain scrutin. Cette manifestation a eu lieu, dans la capitale Alger, à l’appel de l’UGTA, un syndicat des travailleurs, traditionnellement proche du pouvoir. Dans la rue, plusieurs centaines de personnes essentiellement des hommes, en rangs dispersés, ont appelé les Algériens à participer massivement au vote. Contrairement aux marches de protestation anti-régime, celle pro-pouvoir a été retransmise en direct sur plusieurs médias proches du régime et par la télévision nationale. Une couverture exceptionnelle au regard du nombre réduit de manifestants.

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