Le chef de gouvernement marocain, Abdelilah Benkirane, a présenté son bilan d’étape devant les 2 Chambres du Parlement. Critiques acerbes de l’opposition. Réplique du chef de gouvernement… Une passe d’armes qui a clôturé la session.
Il y avait la réponse du chef de gouvernement, Abdelilah Benkirane, à l’opposition sur le bilan d’étape de son cabinet, suivie d’une séance législative à la Chambre des représentants et, tout de suite après, la séance de clôture de la session printanière. C’était une journée bien remplie, ce mercredi 23 juillet 2014. On s’attendait à une séance houleuse, au regard des critiques acerbes de l’opposition via ses groupes parlementaires qui ont dénoncé une piètre évaluation du bilan d’étape présenté par le chef de gouvernement. Un bilan jugé fragile, manquant de cohérence et se caractérisant par la lenteur de son rendement. L’opposition a refusé le fait que la majorité mette à son actif la stabilité du pays, au point d’en faire le noyau du bilan gouvernemental. Et de reprocher à Benkirane de mélanger bilan gouvernemental et action royale.
Querelle Chabat-Benkirane
Comme à l’accoutumée, le secrétaire général du Parti de l’Istiqlal, Hamid Chabat, n’a pas laissé passer l’occasion, face à Abdelilah Benkirane, de remettre sur la table leur querelle. Il a posé au chef de gouvernement la question sur sa relation avec le «Daâch» (acronyme en arabe de: Etat Islamique en Irak et au Levant) et le Mossad (services secrets israéliens). La réponse de Benkirane ne s’est pas faite attendre. Il lui a réservé une bonne partie de son intervention musclée, après avoir décortiqué les critiques de l’opposition. Et de lancer ironisant: «L’opposition devrait mettre en œuvre son rôle constitutionnel pour une opposition positive qui participe à l’essor du pays, au lieu de perdre son temps dans des manœuvres sans lendemain, et pour consolider sa démocratie interne».
«Je reconnais, a dit le chef du gouvernement, que je m’attendais à ce que les critiques de l’opposition soient acerbes et sévères. Mais je ne m’attendais nullement à ce que son discours soit aussi creux, au point de n’être même pas apprécié par un fou, à fortiori par quelqu’un en possession de toutes ses facultés (mentales)». Et Benkirane de viser Chabat, sans pour autant le nommer: «Je regrette pour mon pays de voir à la tête d’un parti de valeur quelqu’un qui doute du chef de gouvernement et l’interroge sur sa relation avec les services secrets israéliens». L’opposition, a ajouté Benkirane, a raté un moment constitutionnel exceptionnel et s’être basée sur des informations erronées, au lieu d’enrichir le dialogue. «Normal, elle n’a rien trouvé à dire… Si j’étais à sa place, j’aurais su, moi, quoi dire».
Ils veulent faire tomber le gouvernement
Pendant près de deux heures, Benkirane a rendu la monnaie de sa pièce à l’opposition dans ses différentes composantes, laquelle n’avait d’autre choix que d’encaisser en silence. Le chef de gouvernement a encore lancé à son adresse: «Ils veulent faire tomber le gouvernement et je leur dis: vous n’arriverez à rien de cela. Vous devez cependant admettre que le monde change, évolue et qu’il n’est plus question de palabre, mais d’action». Et de s’exclamer, en français cette fois: «C’est du n’importe quoi!».
Une nouvelle approche
Après avoir rappelé que la majorité a eu raison, concernant la question des fameuses «Ihatas», par la voix autorisée de la Chambre constitutionnelle, le chef de gouvernement a appelé l’opposition à ne plus parler de sa marginalisation, langage qui explique son incapacité à jouer son rôle. Il l’a exhortée à chercher une nouvelle approche. «Nous ne pouvons malheureusement pas l’aider sur ce volet et, pourtant, nous le faisons». Benkirane a cependant reconnu le nécessaire rôle de l’opposition, mais en insistant que celle-ci a raté l’évaluation du bilan du mi-mandat du gouvernement. Et d’enfoncer un peu plus le clou: «La rue ne vous suit pas, car le discours de l’opposition est politicien. Vous avez besoin de faire votre autocritique». Benkirane a encore dit: «L’opposition m’a reproché de ne pas m’être enquis sur place de la situation des victimes de l’effondrement des immeubles de Bourgogne et de leurs familles. Je leur dis que SM le Roi a fait le nécessaire au nom de tous les Marocains. Il est Amir Al Mouminine, »yanoubou 3anna jami3ane » (nous représente tous)». Sentant qu’il venait de marquer un nouveau point, Benkirane a ajouté malicieusement: «Si c’est comme ça, pourquoi est-ce que l’opposition n’a pas rendu visite aux victimes de l’effondrement de Bourgogne. Ne sont-elles pas vos frères et sœurs, vous aussi?».
Ne voulant pas laisser passer les critiques acerbes de l’opposition, qui a dénigré au gouvernement le fait que la stabilité du pays est l’apanage du gouvernement, Benkirane a souligné que le Maroc est l’un des pays les plus stables et que la stabilité n’a pas commencé en 2009, ni d’ailleurs en 2011. Elle est le fruit des réformes du chantier royal. «Ce que le gouvernement actuel a réalisé s’ajoute à cet acquis royal».
Lors d’une déclaration à la presse, à sa sortie de l’Hémicycle, Abdelilah Benkirane a accusé l’opposition de donner des chiffres erronés et de tromper l’opinion nationale. «L’opposition, a-t-il dit, est un échec cuisant. Nous remporterons les prochaines échéances électorales. Nous reconnaissons l’existence de certains dysfonctionnements, mais nous ne disons pas aux Marocains: »Nous ferons venir la mer jusque dans les villes intérieures et nous édifierons la Tour Eiffel et l’Arc de Triomphe »», a conclu Benkirane, histoire de rendre la monnaie de sa pièce à Hamid Chabat. Le mot de la fin a été cependant pour l’opposition qui, dit-il, s’est contentée de chiffres erronés: «On dit que les chiffres sont têtus. Je dis que certains sont plus têtus que les chiffres». L’opposition est un échec, «Al Mouâarada fachila», a-t-il matraqué.
Après avoir flagellé l’opposition, le chef de gouvernement a étalé les chantiers réussis de son cabinet. «L’opposition ne veut pas les reconnaître pour ne pas cautionner notre bilan», a-t-il dit. Il a reproché à ses adversaires de ne pas avoir fait une évaluation objective et juste de l’action du gouvernement.
Mohammed Nafaa