Le drame survenu, dimanche 19 novembre 2017 à Sidi Boulaalam, dans la région d’Essaouira, qui a coûté la vie à 15 femmes et faits plus de 6 blessées, a interpellé un grand nombre d’acteurs de la société civile au sujet de l’encadrement des campagnes caritatives. Qui est donc responsable du drame de Sidi Boulaalam qui a endeuillé des familles entières?
L’émotion était à son comble, lundi 19 novembre 2017, chez les familles des victimes et, avec elles, les habitants de la localité de Sidi Boulaalam, située à quelques kilomètres de la ville d’Essaouira. En effet, une foule immense a accompagné les dépouilles des 15 femmes jusqu’à leur dernière demeure.
Qui est responsable du drame d’Essaouira?
Les habitants de Sidi Boulaalam et d’Essaouira, qui ont fait partie du cortège funèbre, ont souligné que le premier responsable du drame qui s’est produit dimanche 19 novembre 2017, c’est la pauvreté et la précarité qui ont poussé des femmes à faire le déplacement depuis leur lieu de résidence. Ces dernières ont ainsi effectué, sans le savoir, leur dernier voyage.
Plusieurs témoins oculaires ont expliqué que le drame s’est produit en une fraction de seconde. «Tout se déroulait le plus normalement du monde. Des centaines de femmes ont fait le déplacement jusqu’à Sidi Boulaalam, pour recevoir une aide alimentaire. Tout à coup, une panique générale s’empara de la foule, ce qui fut l’une des premières causes de ce drame». C’est en ces termes qu’un des habitants de cette localité proche d’Essaouira s’est exprimé dans une vidéo partagée en masse sur internet. Pour ce qui est de la responsabilité des autorités locales dans ce drame, de nombreux témoignages ont fait état d’une absence totale des autorités. «Personne n’est venu à notre aide, ça a été un moment terrible que je n’oublierai jamais», a expliqué pour sa part l’une des personnes rescapées.
Si certains témoins ont imputé la responsabilité du drame d’Essaouira à un mouvement de masse devenu incontrôlable, d’autres ont affirmé que l’opération de distribution de l’aide alimentaire dans la commune de Sidi Boulaalam n’a pas été suffisamment encadrée: «La distribution de produits alimentaires à Sidi Boulaalam était supervisée par 4 gendarmes seulement», ont-ils expliqué, tout en appelant les autorités à encadrer davantage les opérations caritatives.
Trop d’organisation tue l’organisation
La distribution de denrées alimentaires, qui a tourné au drame à Sidi Boulaalam, a été précédée d’une campagne de communication d’envergure au niveau de la région d’Essaouira. Pendant les 3 jours qui ont précédé le lancement de cette opération, des panneaux publicitaires ont été installés par endroits, dans le but de faire diffuser l’information. Cette opération d’information a, selon plusieurs habitants et familles des victimes, joué un grand rôle dans l’affluence en masse de plusieurs femmes, venues de la localité de Sidi Boulaalam et ses régions, pour recevoir l’aide alimentaire. Cette dernière se composait, selon des femmes rescapées, de 25 kg de farine, 2 paquets de thé de 200 grammes chacun, 5 kg de sucre et 1 litre d’huile de table, par famille. Un autre facteur a contribué à faire venir les citoyens en masse: le transport clandestin qui, selon des sources sur place, a été fortement mobilisé. Des témoins estiment que la présence de ce moyen de transport, illégal et à la portée des petites bourses, a facilité le déplacement pour un grand nombre de personnes, même ceux qui n’étaient pas ciblées par cette opération de distribution d’aide alimentaire.
Les victimes, que des femmes
La bousculade de Sidi Boulaalam a fait plusieurs victimes, toutes des femmes. Pourquoi? Selon des témoignages, le responsable de l’association organisatrice de l’opération d’aide aux démunis dans la région d’Essaouira a toujours exigé la présence physique des femmes et que ces dernières récupèrent en personne leur part. Les mêmes sources ont expliqué que les vidéos réalisées par l’association sur le déroulement de l’opération, depuis la campagne d’information et jusqu’à la distribution de l’aide aux bénéficiaires, sont envoyées aux donateurs étrangers.
Ce n’est pas la première fois que l’association dirigée par Abdelkbir El Hadidi est mise en cause dans l’organisation d’une opération de distribution de denrées alimentaires. En 2016, El Hadidi a été inquiété par les autorités pour avoir organisé une opération semblable à celle du 19 novembre dernier et qui s’était soldée par la mort d’une femme. A l’époque, la non-concertation avec les autorités locales lui a été clairement reprochée. Et ça s’est arrêté là….
Mohcine Lourhzal
Colonne
Liste des victimes de la bousculade d’Essaouira
Femmes mariées
– B. Messaouda: 79 ans, 7 enfants
– B. Zahra: 63 ans, 6 enfants
– K. Habiba: 57 ans, sans enfants
– B. Khadouj: 54 ans, 8 enfants
– F. Kabira: 53 ans, 4 enfants
– M. Rabiaa: 43 ans, 3 enfants
– B. Rabiaa: 39 ans, 3 enfants
– K. Saadia: 32 ans, 4 enfants
Femmes veuves
– S. Lakbira: 80 ans
– T. Batoule: 69 ans
– L. Khadija: 60 ans
– K. Khadija: 57 ans
Femmes divorcées
– Ch. Habiba: 68 ans, sans enfants
Victime célibataire
– M. Bahija: 35 ans
Situation familiale non connue
– N. Zahra: 52 ans