La deuxième édition du Business Dialogue sur l’eau a été marquée par la tenue de débats autour de la sécurité hydrique au Maroc.
Le premier panel qui a duré une heure, a eu pour thème, la «Sécurité hydrique, territoires et spécificités régionales, quels acteurs impliquer?». Intervenant lors de ce débat, Hanane Baghdad, Directrice Centrale à la Direction Générale de l’Hydraulique au ministère de l’Equipement et de l’Eau, a commencé par faire un topo de la situation hydrique au Maroc.
Le droit à l’eau gravement menacé
«Cette année (2022), le Maroc a été impacté par un grave épisode de sécheresse. Cette situation a fait que le taux de remplissage des barrages a enregistré des niveaux inférieurs en comparaison avec les années précédentes», a affirmé H. Baghdad. De septembre 2021 à mai 2022, le volume de stockage au niveau des différents barrages du Royaume, ne dépassait pas 1 milliard, 580 millions de mètres cubes, soit un déficit de 83% par rapport à la moyenne, a-t-elle indiqué, ajoutant que les volumes d’eau stockés au niveau des barrages ne dépassaient pas 34% à la date du 11 mai 2022 (5 milliards, 500 millions de mètres cubes), soit un pourcentage de 34% contre 51% à la même date de l’année précédente (2021).
Le temps de l’action a sonné
De son côté, Asma El Kasmi, Directrice de la Coopération et de la Communication à l’Office National de l’Electricité et de l’Eau Potable (ONEE), Branche Eau, a fait savoir que l’ONEE fait face à de multiples défis en matière d’approvisionnement des citoyens en eau potable, surtout dans le contexte actuel marqué par un déficit pluviométrique important au niveau national. «Dans ce contexte, l’ONEE a mis en place des systèmes de potabilisation à travers des ressources superficielles mobilisées notamment au niveau des barrages. L’Office a aussi lancé des systèmes de dessalement de l’eau de mer, surtout au niveau des littoraux dépourvus en eaux dites conventionnelles», a indiqué la Directrice de la Coopération et de la Communication à l’ONEE. La production hydrique obtenue grâce au dessalement de l’eau de mer, est de 200.000 mètres cubes par jour (9 stations de dessalement). Cette capacité est appelé à être triplée à l’horizon 2030 en utilisant des énergies renouvelables. Grâce à ces efforts, le Maroc enregistre aujourd’hui des taux de raccordement très avancées en matière de généralisation de l’accès à l’eau potable, comparés à d’autres pays de la région. Asma El Kasmi a, néanmoins, attiré l’attention sur le fait que la production de l’eau potable au Maroc est faite à 98% à partir de ressources conventionnelles, ce qui constitue une contrainte majeure au vu des changements climatiques qui menacent le Maroc et le monde.
Pour sortir de cette situation contraignante, la responsable au sein de l’ONEE a souligné que le Royaume a opté, depuis un bon moment déjà, pour le dessalement de l’eau de mer, en tant que solution qui permet de ne plus dépendre uniquement de la pluviométrie pour assurer la sécurisation en eau dans les milieux urbain et rural. L’ensemble des intervenants au 1er Panel organisé dans le cadre du Business Dialogue sur l’eau (13 mai 2022) dont les travaux se sont tenus au Musée de l’Eau de Marrakech, parmi lesquels Mustapha El Habti, Gouverneur Directeur des Réseaux Publics Locaux au ministère de l’Intérieur, Ali Benryane, Coordinateur du Projet Partnership for Action on Green Economy (PAGE) au Maroc et Abdelouahed El Ansari, Président du Conseil de la Région Fès Meknès, ont appelé à une gouvernance intégrée de l’eau. L’objectif étant d’harmoniser les politiques publiques et les initiatives du secteur privé pour un seul et unique objectif, celui d’arriver à une gestion encore plus efficace des ressources hydriques au niveau national, conformément aux Hautes orientations de SM le Roi Mohammed VI qui accorde un intérêt majeur à la sécurité hydrique du Maroc.
Actions en faveur de la préservation durable de l’eau
Le deuxième Panel organisé à l’occasion de l’édition 2022 du Business Dialogue sur la gestion des risques aux ressources hydriques s’est intéressé à l’économie circulaire de l’eau. Ayant pour thème: «les accélérateurs de la gestion intégrée de l’eau, économie circulaire et eaux non-conventionnelles: des opérateurs et gestionnaires sur le front», cette table ronde a vu la participation d’experts dans le domaine de l’eau. Parmi ces intervenants figuraient la Directrice Executive Sustainability & Green Industrial Development au sein du Groupe OCP, Hanane Morchid, Jean-Pascal Darriet, DG de la Lydec, Nadia El Hilali, la Directrice générale de la Régie Autonome de Distribution d’Eau et d’Electricité de Marrakech, Ayman Cherkaoui, Directeur du Centre Hassan II de Formation à l’Environnement, à la Fondation Mohammed VI pour la Protection de l’Environnement et Mohamed Chtioui, Directeur de l’Agence du Bassin Hydraulique du Tensift. Présentant ledit Bassin, M. Chtioui a indiqué qu’«il s’agit d’un Bassin versant qui couvre une superficie de 26.000 kilomètres carrés, avec une population de 3,1 millions d’habitants».
Concernant la demande en eau au niveau de la région de Marrakech-Safi dans sa globalité, que les ressources en eau au niveau de ce Bassin avoisinent 1 milliard, 600 millions de mètres cubes, contre une demande qui s’élève à 2 milliards de mètres cube, ce qui constitue un gap de -500 millions de m3 en moyenne. «Pour gérer cette rareté de l’eau, nous procédons à la signature de conventions de partenariats, à l’instar de celle que nous avions conclues en 2005, avec l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse (RMC)», a rappelé le Directeur de l’Agence du Bassin Hydraulique du Tensift. Et de préciser que malgré les contraintes provoquées par les changements climatiques, le Maroc n’a aucun problème en matière d’approvisionnement des citoyens en eau potable, bien que le Royaume ait connu cette année (2022), l’un des pires épisodes de sécheresse de son histoire. «Le Maroc est bien rodé en matière de gestion des ressources hydriques (…)». C’est en ces termes que Mohamed Chtioui a clôturé son intervention au panel 2 qui s’est tenu le 13 mai 2022, à l’occasion de la deuxième édition du Business Dialogue sur l’eau dont les travaux se sont déroulés au Musée de l’Eau de Marrakech. Même son de cloche du côté de la Directrice Générale de la Régie Autonome de Distribution d’Eau et d’Electricité de Marrakech. Nadia El Hilali a mis en avant les efforts fournis par l’ensemble des acteurs concernés par cette question oh combien sensible de la gestion des ressources hydriques, aussi bien au niveau de la région de Marrakech ou dans l’ensemble du territoire national. «La Régie Autonome que je dirige œuvre en concertation avec ses partenaires, notamment l’ONEE, pour assurer une meilleure gestion des ressources en eau au niveau de la région de Marrakech et sa région», a-t-elle indiqué, avant d’affirmer à son tour que le dessalement de l’eau de mer constitue aujourd’hui une solution qui permet d’assurer une grande partie des besoins nationaux en eau.
En tant que membre-fondateur de la Coalition Marocaine pour l’Eau (COALMA), Co-organisatrice du Business Dialogue autour de la gestion des défis liés à la gestion des ressources hydrique (Marrakech-13 mai 2022), Lydec a également apporté sa contribution en participant à cet évènement d’envergure pour partager son expérience en tant qu’opérateur de référence de gestion des services publics qui accompagne le développement et l’urbanisation soutenue de la métropole casablancaise depuis 25 ans. Jean-Pascal Darriet, Directeur général de Lydec, qui intervenait dans le deuxième panel «Des accélérateurs de la gestion intégrée de l’eau, économie circulaire et eaux non-conventionnelles: des opérateurs et gestionnaires sur le front», a axé son intervention sur les actions mises en place par l’entreprise en faveur de la gestion durable de l’eau. Pour rappel, Lydec s’engage à agir en faveur de la gestion durable des ressources naturelles, de la biodiversité, et du climat, dans le cadre de sa Feuille de route Développement Durable 2030 qui s’articule autour de 3 engagements et 12 objectifs au service de la transition durable de la région Casablanca-Settat. «L’année dernière (2021), Lydec a écouté près de 18.000 kilomètres de réseaux lors des opérations d’inspections nocturnes. Nos équipes ont également détecté et réparé près de 16.700 fuites d’eau au niveau des conduites, des branchements et des postes de comptage, économisant ainsi plus de 10 millions de m³ d’eau potable et plus de 74 millions de m³ d’eau par rapport à 1997, ce qui équivaut au volume d’eau annuel nécessaire à plus de 1,2 million d’habitants», a indiqué Jean-Pascal Darriet, rappelant que la situation actuelle (sécheresse), nécessite une consommation responsable de l’or bleu.
«Outre les technologies smart que nous utilisons pour la préservation de la ressource en eau, nous œuvrons pour mettre à disposition des ressources en eau alternatives, notamment à travers la réutilisation des eaux usées traitées», a souligné le DG de Lydec. Pour sa part, la Directrice Executive Sustainability & Green Industrial Development au sein du Groupe OCP, Hanane Morchid, n’a pas manqué de rappeler l’importance de la tenue d’un tel événement (Business Dialogue sur l’Eau). Elle a ensuite indiqué que l’OCP a toujours accordé une importance majeure à la rationalisation de l’eau en privilégiant l’utilisation de l’eau non-conventionnelle, grâce notamment à la station de dessalement de Jorf Lasfar qui est alimentée par de l’énergie propre. «A l’OCP, 30% des besoins en eau sont assurés par des ressources non-conventionnelles», a-t-elle indiqué. H. Morchid a rappelé, en outre, que l’OCP a investi dans ses STEP (Stations d’Epurations) des eaux usées, dans le cadre d’une politique claire menée par le groupe que dirige Mostafa Terrab, en faveur d’efficacité hydrique et énergétique. Enfin, le Gouverneur Directeur des Réseaux Publics Locaux au ministère de l’Intérieur, Mustapha El Habti a salué l’engagement des départements ministériels ainsi que les administrations au niveau local et territorial, en faveur d’une consommation raisonnable et raisonnée de l’eau.
D’autres panels ont été organisés à l’occasion de la deuxième édition du Business Dialogue sur l’eau dont le Musée de l’Eau de Marrakech, a abrité les travaux, vendredi 13 mai 2022. Les participants à ces panels ont été unanimes pour dire qu’il faut mettre le paquet sur la sensibilisation pour éliminer le gaspillage de l’eau, surtout en ces temps de déficit pluviométrique.
Mohcine Lourhzal
——–
Ils ont déclaré au Reporter
Pour une meilleure gestion des ressources hydriques au Maroc. Tel est l’objectif qui a animé les organisateurs et les participants à la deuxième édition du Business Dialogue sur l’eau dont les travaux se sont tenus le 13 mai 2022 au Musée Mohammed VI de la civilisation de l’Eau, également connu sous le nom de Musée Aman ou Musée de l’Eau.
En marge de cet événement, le Président de la CGEM, la Présidente de la COLMA, le ministre de l’Industrie et le ministre de l’Equipement et l’Eau ont dévoilé, chacun avec ses propres mots, leur vision d’avenir pour la gestion des ressources hydriques au Maroc.
Chakib Alj, Président de la CGEM
«Le Maroc a évité le stress hydrique extrême, grâce à la politique visionnaire des barrages»
«Le Choix du Musée Mohammed VI de la civilisation de l’Eau pour abriter la deuxième édition du Business Dialogue autour des défis auxquels fait le Maroc est confronté, en matière de gestion des ressources hydriques n’est pas anodin. Au sein de la CGEM, nous voulons être une partie prenante dans la gouvernance hydrique. L’Eau constitue un enjeu de société capital. Le Maroc a plus que jamais besoin d’une gestion optimale des ressources hydriques, notamment en privilégiant les Partenariats Publics-Privés (PPP). Les chiffres parlent d’eux-mêmes, la disponibilité en eau par habitant est passée de 3.500 mètres cubes au cours des années soixante à 640 mètres cubes en 2015. Les projections parlent de 540 mètres cubes par habitant et par an, en 2050. C’est dire si la situation est grave, d’où l’urgence d’une action concertée pour faire face aux menaces hydriques qui pèsent sur le Maroc. Je tiens à rappeler que notre pays a évité le stress hydrique extrême, grâce à la politique visionnaire des barrages, lancée par feu SM le Roi Hassan II au lendemain de l’indépendance du pays. Cette politique a été poursuivie et renforcée par SM le Roi Mohammed VI. La deuxième édition du Business Dialogue autour de la question de l’Eau, organisée avec l’accompagnement du Crédit Agricole du Maroc, d’Akwa Group, de CIH Bank, de l’OCP, de Total Energies et des Eaux Minérales d’Oulmès, est une occasion d’approfondir les pistes de solutions pour une meilleure gestion des ressources hydriques qui se sont de plus en plus rares à l’époque actuelle. Le tout, en prenant en considération les préconisations du Nouveau Modèle de Développement, de la Stratégie Nationale pour l’Eau et du Programme National d’Approvisionnement en Eau Potable et l’Irrigation 2020-2027».
————————
Houria Tazi Sadeq, Présidente de la COALMA
«L’eau, une condition sine-qua-non au développement»
«A la Coalition Marocaine pour l’Eau (COALMA), nous avons été heureux de co-organiser avec la Confédération Générale des Entreprises du Maroc, la deuxième édition du Business Dialogue sur l’Eau, à Marrakech et plus précisément au Musée Mohammed VI pour la civilisation de l’eau. Le message que nous souhaitons faire passer, c’est que la gouvernance dans le domaine hydrique nécessite une vision et une stratégie commune. Le fait d’avoir réussi à réunir l’ensemble des parties prenantes à la question de l’eau est une réussite en soi. L’urbanisme, la migration, l’agriculture, la géostratégie entre autres, sont autant de dossiers directement liés à l’eau. Le Maroc a toujours eu à faire face à des épisodes de sécheresse. Cette année (2022), le Maroc a été impacté par deux phénomènes, à savoir le retard et la faiblesse des précipitations. Cette situation a fortement impacté les agriculteurs. Dans le cadre des Hautes orientations de SM le Roi Mohammed VI, le Royaume a entrepris une série de mesures pour atténuer les impacts multiformes du manque de pluie observé au titre de la campagne agricole 2021-2022. Aujourd’hui, il faut gérer les risques liés aux changements climatiques qui donnent lieu à une raréfaction des ressources hydriques. Le Maroc a bien compris qu’il faut absolument mettre en place des Partenariats Publics Privés (PPP) en tant que solution parmi d’autres qui permettrait de mieux gérer les ressources en eau et en optimiser l’usage. Pour résumer, je dirai que l’eau est une condition sine-qua-non au développement auquel aspire notre pays sous la conduite de SM le Roi».
Nizar Baraka, ministre de l’Equipement et de l’Eau
«Une vingtaine de nouveaux barrages et de stations de dessalement à l’horizon 2030».
«La gestion des risques hydriques au service du développement local est un sujet d’actualité qui revêt une importance majeure. En application des Hautes Orientations de SM le Roi Mohammed VI, le gouvernement s’est mobilisé pour faire face à la situation exceptionnelle qu’a connue le Royaume cette année, suite au déficit important de pluviométrie. Le Maroc poursuit également sa politique de construction de barrages. Ainsi, il est prévu de construire une vingtaine de barrages à l’horizon 2030, avec une capacité supplémentaire de stockage de 5,4 milliards de mètres cubes. Ce chantier mobilisera une enveloppe budgétaire de 22 milliards de dirhams. Notre pays dispose de 135 petits barrages. Néanmoins, ils ne répondent pas aux besoins croissants en eau aussi bien en milieu urbain que rural. C’est la raison pour laquelle le Maroc a lancé la construction de 129 barrages collinaires pour répondre, notamment aux besoins des agriculteurs tout en jouant un rôle de bouclier protecteur contre les inondations. Le Royaume dispose également de nombreux projets de dessalement d’eau de mer, fruits de Partenariats Publics-Privés (PPP). L’objectif est d’arriver à une vingtaine de stations de dessalement d’eau de mer à l’horizon 2030. Face aux défis liés à la raréfaction des ressources en eau, l’actuel gouvernement s’est engagé à mettre en œuvre les moyens nécessaires afin de prémunir le Royaume contre tous les risques actuels et futurs résultant des changements climatiques de plus en plus rudes. Aujourd’hui, notre engagement est celui de travailler ensemble pour réaliser tous ces objectifs et bien plus encore».
————————
Ryad Mezzour, ministre de l’Industrie et du Commerce
«Equiper les zones industrielles de stations de traitement des eaux»
«L’industrie est le secteur qui est le plus décrié pour la simple et unique raison que la plupart des industriels sont accusés de polluer les eaux.
Dire que cela n’est pas vrai, serait se voiler la face.
Néanmoins, aujourd’hui, de plus en plus de professionnels du secteur prennent conscience de la nécessité de préserver l’environnement, notamment la qualité et les ressources hydriques.
A mon sens, le nœud du problème est surtout lié au prix de l’eau. Le secteur textile a divisé par quatre, son empreinte en eau. Nous œuvrons pour équiper toutes les zones industrielles de stations de traitement des eaux. Nous pouvons le faire et ensemble, nous allons le faire!».