Ces horaires scolaires me tuent…

Halima, 34 ans, nourrice, est mariée et a 2 enfants. Cette jeune femme souhaite un emploi du temps scolaire mieux adapté à sa condition. Voici son cri.

«Depuis un an, je suis une femme qui prend en charge son foyer. Ce qui me met dans tous mes états, ce n’est pas le fait que mon mari m’ait plaquée. C’est  la sécurité de mes enfants durant mon absence qui m’inquiète et absorbe toutes mes pensées. Et il n’y a vraiment personne pour me prêter main forte.

Il est un peu tard pour comprendre que j’ai été stupide de m’accrocher au premier venu, par crainte de finir vieille fille. Dès les premiers temps de mon mariage, en plus d’être l’épouse d’un homme qui passait son temps dans les jupons de sa belle-sœur, je subissais la dictature d’une belle-famille qui me haïssait. Il n’y a eu que le décès de ma belle-mère pour me délivrer de cet invivable acharnement. Nous avions enfin pu sortir de ce douar, malgré les stratagèmes d’une belle-sœur qui remontait mon mari contre moi.

Nous ne savions pas vers quel destin nous prenions la route. C’est pourquoi  j’avais laissé ma fille aînée vivre auprès de ma sœur qui n’avait pas encore d’enfant. Ma fille allait déjà en classe, je ne voulais surtout pas troubler sa scolarité. Notre deuxième enfant était encore un nourrisson et il n’était pas question de m’en séparer. Nous avons atterri dans une grande ville, chez des amis de la famille. Mon mari avait trouvé un job, mais il avait de fâcheuses habitudes, surtout celle de se coucher tard. Et puis, notre pauvre bébé pleurait souvent. Il n’en fallait pas plus pour irriter toute la maisonnée d’accueil. Nous nous sommes donc installés sans tarder dans notre propre habitation. Située dans une zone malfamée, mais où les locations à prix très modérés prospéraient. Je n’ai jamais su le montant exact du salaire de mon époux. Ce dont j’étais certaine, par contre, c’est qu’une grande partie partait en fumée. Parce que monsieur s’en allait souvent rendre visite non pas à sa fille, mais à son cher frère ou plus exactement à sa bien-aimée belle-sœur. A cette époque,  je n’avais pas le droit de lui poser des questions. Je supportais le tout en silence, essayant d’accommoder au mieux les courses de misère qu’il me rapportait chaque semaine. Il en fut ainsi durant trois années, jusqu’à ce qu’il soit congédié de cette entreprise où il était chauffeur-livreur.

Mon Maroc a bien changé !

Mon mari, au bord de la dépression, ne voulait plus faire aucun effort pour nous sortir de l’impasse. Je fus obligée de faire face à cette situation en cherchant un boulot. Le hasard fit que je fus embauchée comme nourrice dans une famille très généreuse. Ces gens sont même allés jusqu’à engager mon mari en tant qu’homme à tout faire. Enfin, notre condition s’est amplement améliorée. Même ma petite fille qui souffrait désespérément de notre séparation était revenue vivre auprès de nous.

Cependant, notre nouveau bien-être en coûtait à cette mégère de belle-sœur. Ne touchant plus un centime de la part de mon mari, elle usa de son pouvoir pour qu’il retourne dans son hameau auprès des siens. Et elle eut le dernier mot. Mon mari plia bagage sans m’avertir, me laissant seule avec les enfants.

A cette énième humiliation de leur part,  j’ai répondu par de l’indifférence. Avec courage, j’ai continué de travailler chaque jour de la semaine. Je me suis d’ailleurs habituée à ma condition de femme seule, vivant avec ses enfants. Même si je n’ai que les soirs et les week-ends pour m’occuper de ma progéniture et de ma maison.

Mon plus grand tracas actuellement, c’est l’école et la garde de mes enfants durant mon absence. Mes deux gamins ne fréquentent pas le même établissement. Il n’y a personne pour surveiller mon garçon de 6 ans, lorsque sa sœur est à l’école. Son emploi du temps n’est pas du tout adapté au nôtre. Certains jours de la semaine, il rentre à 8 heures pour sortir à 10 heures.  Et à d’autres, il rentre à 10 heures. L’après-midi, c’est pareil. Je suis terrifiée à l’idée qu’il doive s’y rendre seul ou en revenir. Il a la clé de notre domicile, mais qui peut savoir à quel danger s’expose mon enfant chaque jour? Ma pauvre petite fille n’a que 13 ans, même pas une adolescente encore. Je suis obligée de me ruiner en recharge téléphonique, mais au moins je suis rassurée de savoir mes enfants sains et saufs. Or, pour combien de temps encore? Le danger rôde de partout, c’est ça qui me tue. Faudra-t-il que j’envisage de partager le peu que je gagne si durement, pour assurer chez moi la surveillance et l’accompagnement de mes gosses? Je n’ai pas les moyens de m’offrir le luxe de les inscrire dans des écoles privées. Sans parler du fait que ce n’est pas un leurre, les désœuvrés, les drogués, les entremetteuses et les délinquants, ce n’est pas ce qui manque aux alentours. Moi-même, je tremble en prenant les deux bus qui me ramènent chez moi. Les intimidations à l’arme blanche de voyous, pour vol, sont monnaie courante. Maintenant, même la gent féminine s’y met. Je n’en peux plus d’imaginer un drame, ou qu’un de ces jours, mon fils ou ma fille fasse partie d’une bande de racailles qui n’ont aucun autre but dans la vie que celui de dépouiller de pauvres usagers, sous les yeux de tous. Ce n’est pas de cet avenir que je rêve pour mes enfants, ni pour aucun enfant d’ailleurs.

Moi, femme, addict à l’alcool…

En attendant qu’un miracle divin libère mon époux de l’emprise maléfique de cette belle-sœur, si au moins mon plus jeune enfant pouvait avoir un emploi du temps correct. N’y a-t-il pas de mamans dans ma situation qui souffrent de ces horaires de la petite école publique? Ne pouvons-nous pas faire entendre notre voix ?».

Mariem Bennani

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