Le terrorisme change. Une nouvelle forme de terrorisme se manifeste de plus en plus. Il sera encore plus dur à combattre. Un terrorisme presque individuel qui se rapproche des crimes de haine.
C’est une définition liée au racisme qui nous vient des USA. On parle de crime de haine ou de crime haineux quand la victime en est la cible en raison de son appartenance, réelle ou supposée, à un certain groupe social, le plus souvent défini par la race, la religion, l’orientation sexuelle, le handicap, l’ethnie, la nationalité, l’âge, le sexe, l’identité sexuelle ou le parti politique . Le crime de haine est donc un crime dont la motivation politique ou religieuse n’est qu’une justification pour celui qui le commet. L’attentat contre le marathon de Boston y ressemble, tout comme les crimes de Merha à Toulouse en France. Un phénomène nouveau que les spécialistes de la lutte anti-terroriste tentent de prendre en compte.
Le drame horrible de Londres rend indispensable une adaptation de la protection des citoyens partout dans le monde. Les crimes de haine doivent être séparés d’un terrorisme de masse et il faut surtout éviter tout amalgame.
Présidant (jeudi 24 mai) une réunion du COBR (Cabinet Office Briefing Room A), le comité gouvernemental qui gère les urgences sécuritaires, le Premier ministre britannique, David Cameron, a été très clair. «Ce n’était pas seulement une attaque contre la Grande-Bretagne et le mode de vie britannique. C’était aussi une trahison de l’islam et des communautés musulmanes qui apportent tant à notre pays. Rien dans l’islam ne justifie un tel acte épouvantable». Cela va sans dire, mais c’est mieux en le disant.
La presse britannique sous le choc est moins prudente. Pour le Daily Mirror, cette attaque «bestiale» est «choquante» mais «pas surprenante». Si, comme le note Kim Sengupta dans The Independent, c’est la première fois que «la décapitation est utilisée comme instrument de terreur en Occident» et qu’un soldat britannique est tué, des tentatives d’attaques similaires ont été déjouées par le passé.
S’il faut se méfier des amalgames, il ne faut pas se cacher la réalité. Un rapport publié en 2012 par un think tank du Royal United Services Institute (RUSI) avait ainsi mis en lumière la difficulté d’identifier les suspects potentiels. «Le risque a évolué: d’attaques organisées par des cellules organisées, avec une structure de commandement, à des attaques menées par des loups solitaires radicalisés par le biais d’Internet», pointait le rapport.
«Des terroristes plus expérimentés, loups solitaires, pourraient revenir en Grande-Bretagne dans les prochaines années, non pas des camps d’entraînement au Pakistan et par les aéroports de Karachi et Dubaï, mais depuis les guerres de Somalie, du Yémen et du Nigeria, depuis l’Irak et de destinations et de routes qu’il deviendra plus difficile pour les services de sécurité de surveiller», note le directeur du RUSI, Michael Clarke.
Un autre élément doit être pris en compte: cette haine est souvent provoquée par la crise en Europe et la dégradation de la situation de certaines populations immigrées déjà précaires. Le volet misère sociale et désespoir doit être traité. C’est le terreau des crimes de haine – nouveau terrorisme. Si l’on en voulait une preuve supplémentaire, on pourrait se référer aux derniers événements en Suède.
Des scènes de voitures incendiées dans les banlieues de Stockholm ont envoyé une «onde de choc en Suède en mettant en cause l’image de tolérance et de souci d’égalité» de ce pays. Les émeutes qui ébranlent depuis quatre nuits la Suède posent une difficile question: «La Suède fait-elle face aux mêmes questions qui se posent en France ou au Royaume-Uni sur l’intégration des immigrés?», souligne le «Financial Times». La plupart des émeutiers sont en effet des jeunes issus de l’immigration d’Afrique et du Moyen-Orient. Ce qui, en Suède qui a accepté 44.000 demandeurs d’asile en 2012, inquiète. Car ce pays a maintenu un généreux système social et pratique, une politique très libérale en matière d’immigration. «La Suède, écrit le journal britannique, se targue de bien traiter les immigrés en leur offrant des allocations et des logements sociaux, ainsi que des cours gratuits pour apprendre le suédois». Reste que le niveau de chômage, particulièrement chez les jeunes immigrés -surtout ceux arrivant d’Irak, d’Afghanistan et de Syrie- est élevé: environ 25%, soit trois fois le niveau national. Une nouvelle immigration issue des désordres internationaux qui, de la déception, va vers la rancœur, puis la haine et justifie, par un combat mondial fantasmé, des actions criminelles très personnelles. Comment y faire face? Personne pour le moment n’a trouvé la solution de ce nouveau cauchemar qui menace tout le monde et partout.