Voilà, de nouveau, le conflit israélo-palestinien dans toute sa tragédie.
Voilà la haine, la peur, le sang, la mort qui frappe aveuglément, les édifices qui s’écroulent partiellement ou totalement réduits en gravats, les survivants qui quittent leur «chez eux» devenu champ de ruines, laissant toute leur vie derrière eux, enfouie sous les décombres…
Deux questions alors.
Qui est responsable de ce nouveau désastre ?
Qui peut y mettre fin ?
La responsabilité est clairement établie.
C’est celle de la partie israélienne.
Le dire n’est pas prendre parti pour un camp contre un autre. C’est juste dire la vérité.
Il n’est que de voir comment se sont déroulés les faits.
Il y a d’abord eu, dès la mi-avril, les provocations des activistes d’extrême droite, radicalement anti-Palestiniens qui, en organisant une marche sous la protection d’une police leur étant entièrement acquise, ont constitué le départ périlleux de ce regain de tension.
Puis il y a eu les menaces d’expulsions de familles palestiniennes au profit de colons israéliens dans le quartier Sheikh Jarrah de Jérusalem-Est.
Il y a eu ensuite la répression de ceux qui ont voulu manifester en soutien aux habitants menacés d’expulsion et contre la politique de colonisation du Gouvernement israélien, qui permet l’annexion des territoires palestiniens de Cisjordanie, petit bout par petit bout, au moyen d’expulsions arbitraires des Palestiniens de leurs quartiers de résidence et d’implantations de colonies juives en lieu et place (les colons, qui étaient au nombre de 100.000, en 1993, à la signature des accords d’Oslo, sont aujourd’hui 400.000).
Enfin, il y a eu l’intervention des forces de l’ordre israéliennes sur l’esplanade des Mosquées, le vendredi 7 mai, en pleine prière du soir et en plein Ramadan.
Faut-il le préciser ? En parallèle de tous ces faits, les blessés parmi les Palestiniens se comptaient par centaines.
Ce n’est que le 10 mai que les tirs de roquettes ont commencé à fuser de Gaza.
A partir de là, ce fût l’escalade ! Aux tirs de roquettes du Hamas à partir de la Bande de Gaza, répondaient les bombardements israéliens sur cette Bande.
Des bombardements, présentés comme «chirurgicaux», ne visant que les tunnels souterrains, les lieux de partance des roquettes et ceux abritant le Hamas, ses activités et les résidences de ses dirigeants… Mais qui ont fait des dizaines de morts parmi les civils (plus de 230, au 20 mai), dont la plupart des femmes et des enfants, se trouvant dans leur domicile lorsque leur immeuble, réduit en miettes par les bombes, les a ensevelis.
Dix morts également dans les rangs israéliens et des immeubles traversés par les roquettes, où des civils juifs qui vivaient tranquilles, se retrouvent payant le prix des agissements irresponsables de leurs concitoyens extrémistes, mais aussi le prix des calculs politiciens de leurs dirigeants !
Car, tous les analystes l’ont relevé, il est difficile de ne pas voir de lien entre cette réactivation de l’affrontement entre Israéliens et Palestiniens et les calculs politico-politiciens du chef de l’actuel Gouvernement israélien, Benyamin Netanyahu.
En effet, ce dernier n’ayant pas réussi à former une nouvelle majorité, devait passer la main à son rival, le chef de l’opposition Yaïr Lapid. Ce qui aurait mis fin à sa carrière politique. D’autant que Yaïr Lapid allait réussir là où lui avait échoué. Il était sur le point de constituer une «coalition du changement» réunissant des partis allant de la droite à l’extrême gauche. Coalition, qui aurait conduit à la formation d’un gouvernement d’union nationale, avec –un vrai cauchemar pour Netanyahu- une éventuelle entrée au Gouvernement d’un parti arabe islamiste modéré «Ram» !
Pire encore, n’ayant plus d’immunité, Netanyahu accusé de corruption et autres bricoles aurait fini devant la Justice… Voire, derrière les barreaux.
L’escalade ayant tourné en guerre, roquettes et bombardements, il n’est plus question de négociations pour la formation d’un nouveau Gouvernement. Et la question n’étant plus à l’ordre du jour, Netanyahu reste au pouvoir jusqu’à nouvel ordre… Un répit de quelques mois.
En attendant, Gaza est à feu et à sang. Des civils innocents perdent la vie et les survivants perdent tout. Dans le Sud d’Israël, des familles juives paisibles vivent dans la panique de recevoir des roquettes, comme ce fût le cas à Ashkelon ou à Ashdod. En Cisjordanie, pour la 1ère fois, les Arabes d’Israël laissent exploser leur colère. La cohabitation en bonne entente entre Juifs et Arabes qui prévalait dans les villes mixtes, comme Lod ou Bat Yam, se voit compromise par les émeutes et les lynchages dans les deux communautés. Etc. Etc. Tous ces malheurs auxquels personne n’arrive à mettre fin !
Les médiations, pourtant, se multiplient.
Les plus proches ont commencé… Sans succès (l’Egypte).
Les autres essaient… Jusqu’à présent, sans résultat (La France).
Certains, se rendent même sur place. (L’Allemagne… Devenue très active en politique étrangère !).
Il y a aussi les appels directs… (Le Président Biden a eu 4 entretiens téléphoniques avec B. Netanyahu, depuis le début du conflit, le dernier pour exhorter à un cessez-le feu).
Il y a les grandes réunions des organisations internationales (ONU, Ligue Arabe, etc)… Rien n’a pu faire taire les armes. Bombes et roquettes continuent de se donner le change.
Le monde occidental est toujours face au même embarras. Il est empêtré dans ses tiraillements entre sa mauvaise conscience à l’égard du peuple juif (du fait de la tragédie de la Shoah) ; ses valeurs de droits humains et de respect de la légalité dont le peuple palestinien ne bénéficie pas ; et enfin, ses positionnements politiques et géostratégiques (l’Iran et son croissant chiite déterminant tout positionnement dans la région).
Le monde arabe n’est plus ce qu’il était. Ses composantes ont connu des évolutions plus ou moins heureuses… Il suffit d’un œil sur l’Irak, la Syrie, le Yemen, la libye, le Liban…
Dans le Golf, «l’équation Iran» pèse de tout son poids.
Au Maghreb, cette guerre qui ne dit pas son nom que mène l’Algérie au Maroc depuis près d’un demi-siècle autour du dossier du Sahara, condamne à la désunion générale.
En Palestine-même, les désaccords entre le Hamas et la Fatah et le soutien qu’apporte l’Iran au Hamas empêchent toute action commune…
Le conflit du Proche Orient s’enlise depuis trop longtemps. Cela, le monde entier en convient. Mais le monde n’y trouve pas de solution.
Les pressions finiront par agir pour que cessent les affrontements actuels. La tension semble d’ailleurs retomber ce 20 mai (2021).
Mais la solution définitive semble encore loin…
Le salut viendra peut-être des médiations discrètes de pays qui entretiennent des relations avec les deux parties. Les Etats Unis (quoique l’on dise) comme l’a déclaré cette semaine le chef de la Diplomatie américaine, Antony Blinken ; le Maroc, qui compte 1 million d’Israéliens d’origine marocaine (ce qui est une bonne base pour négocier la paix) et qui joue franc jeu en continuant de soutenir la solution équitable des deux Etats avec Jérusalem-Est pour capitale de l’Etat palestinien ; les autres pays arabes aussi qui ont signé des accords de paix avec Israël (l’Egypte, la Jordanie, les Emirats…). On n’est jamais de trop pour faire la paix !
Une chose est sûre, rien ne sera résolu par la force.
Bahia Amrani