Du Canada à l’Australie, en passant par l’Europe, l’EIIL mène une guerre mondiale grâce au concours de fanatiques convertis. Des musulmans de la dernière heure, récemment radicalisés et souvent d’ethnies européennes.
Ces convertis sont un véritable casse-tête pour les pays occidentaux, notamment membres de la coalition contre Daesh. Des loups solitaires peut-être, mais qui se réfèrent tout de même à une meute sur internet.
Au canada, la semaine dernière (22 octobre), un militaire, Nathan Cirillo est mort sous les balles d’un tireur. Ce dernier a ensuite été abattu à son tour dans le parlement par un policier. Pendant plusieurs heures, le centre-ville de la capitale canadienne a été complètement bouclé. Des coups de feu ont notamment été tirés près d’un Monument aux morts où le militaire a été tué et à l’intérieur du Parlement.
L’homme abattu s’appelait Michael Zehaf-Bibeau. Il était âgé de 32 ans. Converti à l’islam, il se serait récemment radicalisé. Comme Martin Rouleau-Couture, un individu qui a tué avec sa voiture un militaire, lundi 20 octobre dans la banlieue de Montréal, le suspect tué faisait partie d’une liste de 90 Canadiens soupçonnés de vouloir organiser des attentats dans le pays. Il était considéré par les services de renseignement comme un «voyageur à risque». Par conséquent, il s’était récemment fait retirer son passeport pour «radicalisation islamiste».
Ray Boisvert, ancien directeur général responsable du contre-terrorisme au SCRS, parle d’«un événement très important» qui ne sera pas sans conséquence sur les scènes nationale et internationale. «Quand on a un attentat de ce genre sur le parlement, la place la plus importante pour une démocratie et dans une société qui était encore très ouverte relativement à d’autres pays au monde, souvent ces pays-là ont changé à la suite d’un événement pareil», dit-il.
Aux antipodes, la même inquiétude est palpable en Australie. Surtout depuis la diffusion sur le net du Djihadiste roux.
En juin, Abdullah Elmir annonce à sa mère qu’il part pêcher. Quatre mois plus tard, l’Australien de 17 ans n’est plus à Bankstown, dans la banlieue de Sydney, mais au centre de la quatrième vidéo de l’Etat islamique. Publié mardi 21 octobre, le clip montre l’adolescent au teint pâle entouré de soldats mats et barbus.
Pourtant, malgré son accoutrement guerrier et son keffieh, son visage montre bien qu’il n’a que 17 ans. Cet Australien a fugué depuis Sydney en juin dernier, pour aller combattre aux côtés de Daesh, rapporte ABC News. «Aux dirigeants, à Obama, à Tony Abbott, je dis ceci: les armes que nous avons, ces soldats, nous n’arrêterons pas de combattre, nous ne déposerons pas les armes tant que nous n’aurons pas atteint vos terres, jusqu’à ce que nous ayons arraché la tête de tous les tyrans, jusqu’à ce que le drapeau noir flotte sur toutes les terres», martèle l’adolescent dans une vidéo de propagande diffusée sur YouTube. Il est présenté comme étant «Abou Khaled d’Australie». Le grand mufti d’Australie, le Dr Ibrahim Abou Mohammad, a critiqué les propos tenus par l’adolescent, assurant qu’il était «complètement déplorable que des extrémistes violents utilisent l’islam pour couvrir leurs crimes et atrocités». Il a été rejoint dans ses critiques par de nombreuses associations de musulmans australiens.
La vidéo de propagande mettant en scène le jeune Australien intervient moins d’un mois après la mort d’un de ses compatriotes de 18 ans, Numan Haider, abattu par la police alors qu’il venait de poignarder deux policiers dans un commissariat de la banlieue de Melbourne. «La personne en question était un terroriste présumé sous surveillance qui intéressait la justice et les agences de renseignement», avait expliqué le ministre de la Justice, Michael Keenan. L’homme avait agi au lendemain de la diffusion d’une vidéo des terroristes de Daesh demandant de tuer «de n’importe quelle manière» des citoyens, civils ou militaires, des pays participant aux frappes aériennes sur les positions des djihadistes en Irak et en Syrie.
La fascination de Daesh est un vrai problème, surtout que cela concerne maintenant la populeuse Asie du Sud-Est. L’Etat islamique, basé au Moyen-Orient, menace aujourd’hui l’Asie du Sud-Est, écrit vendredi le quotidien Kommersant.
Au moins 10% des soldats de l’EI présents en Irak et en Syrie sont originaires de cette région. Les groupes extrémistes basés en Indonésie, en Thaïlande, en Malaisie et aux Philippines ne cachent pas leur sympathie pour l’idée d’un jihad mondial et créent leurs propres réseaux terroristes.
L’écho de la guerre menée par l’État islamique en Irak et en Syrie est arrivé jusqu’en Asie du Sud-Est, avec l’enlèvement de deux touristes allemands aux Philippines.
Cependant, la culture de la région, son développement économique peuvent permettre aux Etats menacés de contrer les djihadistes dont la cause reste moins populaire auprès de populations peu proches des arabes que ceux des moudjahidins afghans.
Mais le danger est de toute évidence aujourd’hui mondial.
Patrice Zehr