Mohamed, 45 ans, ingénieur, est marié et a deux enfants. La femme de cet homme a abusé de sa confiance. Voici son récit.
«Cela fait 12 ans que je suis marié. Mon épouse et moi étions déjà ensemble depuis le collège, avant que les adouls ne scellent nos destins pour la vie. La présence continue de ma deuxième moitié m’était indispensable. Elle était réellement irremplaçable. En plus, il n’y avait jamais eu le moindre empêchement à ce que cela soit possible. Je me souviens que mes beaux-parents, à cette époque déjà, autorisaient leur fille à me fréquenter.
Aujourd’hui, au vu de ce qu’ils ont comploté dans mon dos et la tournure des nouveaux événements, je m’efforce de ne pas croire qu’ils avaient tout planifié depuis le début. Et puis, après tout, pourquoi ces gens, dont je découvre à peine le vrai visage, pouvaient-ils avoir été aussi laxistes pour rien? Ils savaient que mes parents étaient aisés et que j’étais le seul héritier masculin, donc un excellent parti pour leur fille et pas seulement!
Quoi qu’il en soit, je ne peux pas nier non plus que, sans ma femme et sa mère, je n’aurais jamais fourni autant d’efforts pour réussir mes études supérieures. Mon épouse était également une brillante élève. Elle me devançait de beaucoup et elle m’a largement soutenue. Je peux avouer aussi, sans complexe, que c’est grâce à elle que l’entreprise familiale a continué d’exister. Même si maintenant, il y a de fortes chances qu’elle ait changé de mains. Le décès de notre père nous avait complètement déphasés pour qu’on puisse s’en occuper. Mon épouse, malgré sa jeunesse, avait su prendre les rênes en ne lâchant rien, tout en s’attaquant avec puissance et professionnalisme à la féroce concurrence. Il se trouve seulement un peu, malgré moi, que je lui avais accordé progressivement les pleins pouvoirs… Hélas, sans prendre garde aux avertissements de mes sœurs, ainsi que ceux de ma mère.
Le temps a fini par leur donner raison lorsque des mouchards nous ont rapporté que ma belle-mère et mon épouse se seraient offert deux imposantes résidences secondaires qu’elles ont somptueusement aménagées dans une station balnéaire d’un coin très huppé. Connaissant la somme exacte de la petite retraite de mes beaux-parents, il était impossible qu’ils aient pu s’offrir un pareil joyau. Quant à ma femme, cela ne pouvait être possible sans qu’elle ait pioché dans nos caisses. Il fallait donc que j’en aie le cœur net.
Malheureusement, jouer à l’espion en épluchant la comptabilité n’avait rien donné. Ce n’est que par hasard que j’allais découvrir la terrifiante vérité.
Un matin, pour me rendre à un rendez-vous très important, au lieu de prendre mon automobile qui était garée la première dans le garage, j’ai emprunté celle de mon épouse. Par la suite, vu son état, je l’ai mise au lavage. Avant, j’avais pris soin, comme d’habitude, d’en sortir les dossiers et plusieurs pochettes qui s’y trouvaient. En attendant que l’on me restitue une voiture propre, je me suis attablé à un café. Nonchalamment, pour passer le temps, je fourrais mon nez dans toutes ces liasses de paperasses. Enfin, j’avais sous les yeux le bien-fondé des rumeurs. Il y avait des titres fonciers, des attestations de crédits au nom de mon épouse, des relevés bancaires et toutes sortes de factures d’un mobilier que je n’ai jamais vu chez nous. Ma femme avait effectivement acheté ces fameuses bâtisses. Je tombais des nues. Comment avait-elle pu? La confiance que je lui témoignais n’avait jamais eu de limites.
Il s’en est suivi un énorme scandale entre nous. Mon épouse, pour ne plus subir mes attaques, fit ses valises, me laissant sur les bras travail, maison et enfants. Je sus plus tard que madame avait pris des vacances en s’accordant un long voyage organisé. Ma colère fut telle que je voulais me séparer d’elle immédiatement. D’autant plus que je croyais que je pouvais le faire sans problème. Il me semblait que son départ du domicile conjugal était un délit suffisamment grave pour que la justice plaide sans délai en ma faveur. Je me trompais lourdement, cela était impossible. Mon épouse avait le droit de voyager sans que je l’y autorise. Pour divorcer, il fallait engager une autre procédure. Mais, selon mon avocat, la menace d’être dépouillé était tout à fait envisageable. Vraisemblablement, ma femme avait déjà pris soin de ne laisser aucune preuve à ce sujet. Terrifié et excédé, je me suis tourné vers mes beaux-parents. Au lieu de faire profil bas, pour arranger une situation qui ne pouvait que s’aggraver, je me suis vu les accuser de vol. Ce jour-là, je compris que j’avais affaire à une bande de violents escrocs. Ils me jetèrent hors de chez eux avec des coups et des insultes. Selon eux, leur fille était exagérément exploitée par moi et ma famille. Qu’ils ne s’étaient tout de même pas saignés durant des années, pour son éducation et ses études, afin que des vauriens de mon espèce en profitent. Et qu’en plus, elle avait tous les droits de leur offrir ce qu’ils désiraient avec son salaire.
Il a fallu que j’attende le retour de mon épouse pour tenter de sauver les meubles. Mais rien ne va plus entre nous, la haine s’incruste pour de bon. Nous en sommes à nous disputer régulièrement sans prendre de décisions. Le pire est que je n’ose pas avouer à ma famille que je ne sais même pas si je suis encore en mesure d’obliger ma femme à démissionner. En attendant que j’accède à ce qui est transcrit au registre de commerce et à mes statuts, c’est elle le patron aujourd’hui».
Mariem Bennani