Triste Norouz -le nouvel an célébré par les Kurdes- pour les habitants d’Afrine. Cette grande ville clé du Rojava, l’entité kurde autonome autoproclamée au nord de la Syrie, est désormais entièrement sous le contrôle de l’armée turque.
Et de leurs supplétifs, les rebelles de l’Armée syrienne libre, composée aujourd’hui, majoritairement, de djihadistes. En réalité, l’autoritaire président de la Turquie, Recep Tayyip Erdogan, ne veut à aucun prix laisser s’installer le long de sa frontière un Kurdistan indépendant. «Il y a une perméabilité évidente entre ces milices kurdes et le PKK (NDLR: le parti kurde d’opposition en Turquie, considéré comme organisation terroriste). La preuve, on a retrouvé chez nous des armes américaines fournies aux Kurdes de Syrie».
De fait, Erdogan, dans l’euphorie de sa victoire d’Afrine, a annoncé son intention de poursuivre l’offensive en direction de Manbij, une ville située à environ 100 km à l’est, où sont regroupées les forces kurdes, mais aussi… un contingent de 200 marines américains. Avec la chute d’Afrine, ces forces se sentent abandonnées et même trahies par leurs alliés occidentaux. Elles qui étaient en première ligne, face à Daech, pour reprendre Kobané et Raqqa, espéraient au moins que Paris et Washington imposeraient une zone d’interdiction de survol pour empêcher les raids de l’aviation turque. Maintenant que Daech est presque vaincu, les pions kurdes ne servent plus. Au total, une faute morale et un mauvais calcul. «Si l’offensive turque s’amplifie, ce sera la guerre dans tout le nord de la Syrie et tout le monde y perdra», se désole un médecin humanitaire syrien cité par Le Parisien.
Patrice Zehr