L’enfance au Maroc va mal, très mal. Selon une étude du Haut-Commissariat au Plan (HCP) réalisée à l’occasion de la Journée nationale de l’enfant, célébrée jeudi 25 mai 2017, le Royaume compte 1,2 million d’enfants pauvres.
Ce chiffre qui fait froid dans le dos, prouve que le Maroc, malgré les promesses, les plans et les études interminables, ne parvient toujours pas à offrir à ses enfants le minimum d’une vie digne. Selon le HCP, «la pauvreté éprouvée par l’enfance est une reproduction sociale de la pauvreté des adultes et une conséquence des conditions de vie défavorables».
Ce qui fait qu’un enfant devient pauvre
C’est ainsi que le nombre d’enfants dans le ménage détermine notoirement leur bien-être, fait remarquer le HCP, notant que le taux de pauvreté chez les ménages à 6 enfants et plus (28%), est quatre fois plus que celui enregistré chez les ménages à un seul enfant (6%). Selon la même étude, le sexe du chef du ménage impacte différemment la situation des enfants à l’égard de la pauvreté. Le taux de pauvreté est de 11,2% chez les enfants des ménages dirigés par un homme, contre 8,6% chez les enfants des ménages dirigés par une femme. Le niveau d’éducation du chef de ménage a un rôle central dans la détermination du niveau de pauvreté des enfants, note aussi le Haut-Commissariat au Plan d’Ahmed Lahlimi, précisant que l’incidence de la pauvreté des enfants passe de 0,5% pour les ménages dirigés par un chef de niveau scolaire supérieur à 16,4% pour les ménages dont le chef est sans niveau scolaire.
Le HCP relève également que l’effet du niveau scolaire de la mère sur le bien-être des enfants est beaucoup plus prononcé que celui du père. Les chances de se prémunir contre la privation sont deux fois plus élevées pour les enfants dont la mère a un niveau scolaire supérieur (22,5%) que pour ceux dont le père a le même niveau scolaire (10,3%), souligne l’étude. Selon la même source, le risque de la pauvreté multidimensionnelle des enfants est fortement différencié par la catégorie socioprofessionnelle du chef de ménage. L’incidence de la pauvreté des enfants est plus nette parmi les enfants des ménages dirigés par des «exploitants agricoles» (25,4%), «ouvriers et manœuvres agricoles et de la pêche» (24,3%), «manœuvres non agricoles» (11,3%) et «artisans et ouvriers qualifiés» (8,9%).
Disparités, même en pauvreté
En ce qui concerne les régions les plus touchées par la pauvreté des enfants, le HCP, tout en s’insurgeant contre les disparités territoriales qui existent en matière de lutte contre la pauvreté des enfants, indique que les enfants résidant dans le milieu urbain sont moins touchés par ce phénomène que leurs semblables du monde rural. «Les enfants résidant en milieu urbain constituent 12% seulement des enfants pauvres, tandis que 88% des enfants qui souffrent de ce phénomène résident dans le rural», explique le président du HCP, Ahmed Lahlimi. La même source souligne que les efforts de l’Etat pour venir à bout de ce phénomène demeurent, à ce jour, insuffisants et se font à des vitesses différentes d’une région à l’autre. Ainsi, le Haut-Commissariat au Plan rappelle qu’entre 2001 et 2014, la part des enfants pauvres a atteint 16,5% dans la région de Marrakech-Safi, 10% à Tanger-Tétouan-Al Hoceima et 14,6% dans la région de Béni Mellal-Khénifra.
L’étude du HCP sur la pauvreté des enfants au Maroc s’est basée sur les données des enquêtes nationales sur la consommation et les dépenses des ménages de 2001 et 2014 et l’enquête nationale sur les niveaux de vie des ménages de 2007, réalisées par le HCP. Elles ont porté respectivement sur des échantillons respectivement de 14.200, 16.000 et 7.100 ménages, représentatifs de toutes les catégories sociales et les régions du Royaume.
Mohcine Lourhzal