Enseignement/Maroc : Un cas désespéré

Enseignement/Maroc : Un cas désespéré

A l’instar des années précédentes, l’année scolaire 2016/2017 a été  un sujet qui a retenu l’attention de l’opinion publique. Elle a été marquée par plusieurs insuffisances qui ont compromis les conditions normales de la scolarisation.

S’il est un premier élément de dysfonctionnement du système éducatif national à retenir, c’est principalement le manque des effectifs des enseignants. Un élément relevé en premier lieu dans le référé du Premier président de la Cour des comptes sur les conditions de préparation et de gestion de la rentrée scolaire 2016/2017, adressé au ministre de l’Education nationale, de la Formation professionnelle, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique.

L’encombrement, encore et toujours!

En effet, selon ce document,  le ministère chargé de l’Education nationale n’a pas pu combler le déficit en ressources humaines, au début de la rentrée scolaire 2016/2017. Ce qui l’a contraint à engager plusieurs actions pour le recrutement des enseignants contractuels, mais tardivement. Cette situation n’a pas manqué de perturber les conditions de la rentrée scolaire 2016/2017.

Les résultats de l’enquête préliminaire, réalisée par la Cour des comptes, ont montré l’existence d’un ensemble de dysfonctionnements liés à la planification scolaire et à la gestion des déterminants de la rentrée scolaire. Cette dernière s’est  déroulée, cette année, dans des conditions caractérisées par un ensemble d’anomalies, notamment des classes encombrées, d’autres allégées et d’autres encore à cours multiples. En effet, relève la Cour, au titre de l’année scolaire 2016/2017, 2.239.506 élèves, tous cycles confondus, poursuivent leur scolarité dans des classes encombrées. Ce chiffre représente 38% de la population scolarisée qui s’élève à 5.945.551 élèves. Le ministère retient comme seuil d’encombrement un effectif qui dépasse 40 élèves par classe. La Cour considère, pour sa part, que cet effectif dépasse largement la moyenne d’élèves par classe constatée dans les pays de l’OCDE. Cette moyenne s’élève à 21 élèves par classe au cycle primaire et 23 par classe au cycle secondaire.

Cet encombrement, en tenant compte du seuil retenu par le ministère, concerne, au niveau national, 49.696 classes. Le taux d’encombrement est de 49% au niveau du cycle collégial, 29% au niveau du cycle qualifiant et 16% au niveau du cycle primaire. Ces taux varient d’une AREF (Académie) à l’autre.

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Au cycle primaire, les taux d’encombrement les plus élevés en milieu urbain sont enregistrés au niveau des AREFs de Rabat-Salé-Kenitra (49%), Fès-Meknès (49%), Marrakech-Safi (45%) et Tanger-Tétouan-Al Hoceima (44%)

Au niveau du cycle collégial, les AREFs de Fès-Meknès, Rabat-Salé-Kénitra, Tanger-Tétouan-Al Hoceima, Marrakech-Safi et Casablanca-Settat affichent des taux d’encombrement des classes variant entre 49% et 72%. A l’AREF de Casablanca-Settat, les directions provinciales de Aïn-Chok et de Sidi-Bernoussi enregistrent respectivement des taux élevés de l’ordre de 87% et de 96%.

Au cycle qualifiant, les classes les plus encombrées se situent au niveau des AREFs de Casablanca-Settat et de Marrakech-Safi qui affichent des taux d’encombrement respectifs de 45% et 38%.

Parallèlement aux classes encombrées, le système éducatif compte 81.581 classes allégées, dont l’effectif est inférieur à 24 élèves par classe. La majorité de ces classes sont concentrées en milieu rural, notamment au cycle primaire avec 78.916 classes. Quant au cycle qualifiant, il compte 2.363 classes allégées.

En plus des classes encombrées et des classes allégées, l’année scolaire 2016/2017 a enregistré un nombre de 27.227 classes à cours multiples, dont 6.381 classes avec trois à six niveaux, soit près de 24% du total des classes à cours multiples. Ce type de classes constitue une caractéristique du cycle primaire en milieu rural. A cela s’ajoute la coexistence d’un déficit et d’un excédent en enseignants, ainsi que l’exploitation non optimisée des établissements scolaires et l’exploitation des établissements scolaires ne disposant pas de conditions élémentaires de scolarisation.  

L’appui social est constitué de cinq composantes: les internats, les cantines, le programme «Tayssir», le programme «Un million de cartables» et le transport scolaire. Cet appui vise l’encouragement de l’accès à la scolarité et la lutte contre l’abandon scolaire pour les élèves issus des familles défavorisées.

Absence de maîtrise de plusieurs paramètres

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Cependant, malgré les efforts investis en matière d’appui social, les taux de décrochage et d’abandon scolaires demeurent élevés. En effet, selon les données de MASSAR, 218.141 élèves ont quitté l’école au cours de l’année scolaire 2016/2017, soit 4% de l’effectif global des élèves.

Selon les investigations de l’enquête préliminaire, ces insuffisances sont dues principalement à la non-maîtrise du processus de planification et de gestion des déterminants de la rentrée scolaire, à savoir les élèves, les enseignants, les infrastructures et l’appui social.

Les observations relevées à cet égard sont l’absence d’un système d’information intégré et fiable et la défaillance de la planification scolaire. La comparaison entre les structures pédagogiques arrêtées par la carte scolaire 2016/2017 et celles issues du recensement fait apparaître des écarts significatifs concernant l’effectif des élèves, le nombre des classes et les nouveaux inscrits. Ces écarts remettent en cause les paramètres retenus en matière de planification scolaire. A cela s’ajoutent la gestion centralisée des ressources humaines, l’absence d’un statut propre du personnel des AREFs et un système d’évaluation des besoins en enseignants incomplet et qui n’est pas toujours maîtrisé par les services du ministère. En effet, le recoupement entre les différentes requêtes adressées au chef de gouvernement au sujet des besoins en ressources humaines a révélé des écarts significatifs.

Ainsi, pour l’année scolaire 2016/2017, les besoins en enseignants du cycle collégial sont passés de 1.231 enseignants, selon l’estimation de 2006, à 5.011 enseignants, selon l’estimation de 2013. L’écart constaté est de l’ordre de 3.780 enseignants, soit une augmentation de 307%.

Certes, plusieurs efforts sont déployés pour aller de l’avant et sauver ce qui peut encore l’être dans le système éducatif national. Cependant, face à tous les dysfonctionnements précédemment relevés, l’on est bien en mesure de se demander sur ce qu’on peut bien encore espérer d’un système aussi  défaillant. Les conditions dans lesquelles s’est déroulée la dernière session du baccalauréat n’étaient-elles pas, à elles seules, suffisantes pour montrer que «rien ne va plus» pour l’enseignement au Maroc? 

HD

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