Mohammed Zakaria Aboudahab nous livre sa lecture de la Résolution 2654 sur le Sahara, adoptée le 27 octobre 2022, à l’unanimité des membres du Conseil de sécurité. Selon cet expert en Relations internationales, le Maroc finira par avoir gain de cause. Entretien.
«L’affaire du Sahara finira par se résoudre grâce à la détermination du Maroc et à sa légitimité politico-historique avérée»
Dans quelle mesure la nouvelle Résolution du Conseil de sécurité sur le Sahara conforte-t-elle la position du Maroc?
La Résolution 2654 s’inscrit dans la dynamique impulsée par les précédentes résolutions onusiennes, depuis pratiquement avril 2007 avec la résolution 1754. Le Plan marocain d’autonomie se retrouve au centre de la démarche du Conseil de sécurité compte tenu de son caractère sérieux et crédible. Le processus de négociation devant aboutir à un règlement politique mutuellement acceptable au conflit autour du Sahara est le cœur de l’approche onusienne. Dans cette optique, le Conseil de sécurité invite les protagonistes, dont principalement l’Algérie, à s’impliquer positivement dans ce processus. Quant aux milices polisariennes, elles doivent s’abstenir d’entraver les activités menées pas la Minurso. Ces mêmes milices ont été pointées du doigt compte tenu de leur détournement des aides humanitaires acheminées vers les camps de Tindouf. Or, des craintes sont exprimées quant à une utilisation de ces mêmes aides à des fins criminelles. Le contexte régional étant tendu, il conviendrait de relancer les tables rondes sous la supervision de l’Envoyé personnel du Secrétaire général de l’ONU et engager des négociations sérieuses devant traiter de questions substantielles. Toutefois, l’Algérie et son affidé le Polisario ne semblent pas être réceptifs à l’appel du Conseil de sécurité, ce qui pose bien des questions sur l’utilité d’une approche trop conciliante du Conseil de sécurité. N’est-il pas temps de réorienter l’approche onusienne, passer à une offensive multilatérale et inscrire le Plan marocain d’autonomie dans les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité comme solution unique pour le règlement d’un conflit devenu intenable?
La Résolution 2654 a irrité le Polisario qui s’est une nouvelle fois acharné sur le Conseil de sécurité. Un commentaire?
Le Polisario n’est pas une organisation crédible. L’ONU, il convient de le rappeler, a hérité, malgré elle, d’un fardeau juridique transféré par l’ancêtre de l’Union Africaine, l’OUA qui a admis en son sein un groupe de séparatistes. On comprendra donc que, à l’heure actuelle, un tel groupe est en voie de se transformer en une organisation criminelle, connectée à des réseaux de trafics de tous genres.
La Russie et le Kenya se sont abstenus de voter la Résolution 2654. Comment expliquer cela?
Traditionnellement, la Russie adoptait une position d’abstention par rapport aux résolutions sur le Sahara considérant que ses points de vue n’étaient pas pris en considération dans le texte final, rédigé de coutume par les Etats-Unis en leur qualité de Penholder. Une telle position n’est pas dirigée contre le Maroc, mais est l’expression du rapport de force géopolitique au sein du Conseil de sécurité. Un rapport de force amplifié par le conflit armé en Ukraine et les crispations qu’il engendre. Au fond, en lisant entre les lignes, on peut considérer la position russe comme un gain pour le Maroc, vu que la Russie pouvait utiliser son véto pour bloquer le vote. Ajoutons à cela le fait que Moscou cherche à préserver un certain équilibre dans ses relations aussi bien avec Rabat qu’avec Alger. Quant au Kenya, sa position, l’abstention, n’est pas un vote contre. Toutefois, il faudrait suivre attentivement la position future de ce pays par rapport à notre intégrité territoriale, surtout lorsque le nouveau Président aura pris les choses en main.
La proposition marocaine d’autonomie pour les Provinces du Sud est considérée aujourd’hui comme l’unique issue au différend autour du Sahara. A quand une solution à ce dossier qui dure depuis bientôt 50 ans?
Le conflit du Sahara n’avait pas lieu d’être si ce n’était les contextes idéologique et géopolitique qui l’ont engendré. Un conflit qui devait être un non-événement au moment de l’indépendance du Maroc acquise de haute lutte. Néanmoins, des vicissitudes historiques avaient empêché cet accomplissement. Autant dire que, profondément, le Maroc est dans une logique de parachèvement de son intégrité territoriale qui, tôt ou tard, finira par être acté au niveau international. La dynamique de reconnaissance et d’appui apportée au Royaume, la crédibilité internationale du pays et son esprit collaboratif prouvé, lui accordent davantage de reconnaissance et de respect. L’affaire du Sahara, montée de toute pièce à cause des convoitises étrangères finira par se résoudre grâce à la détermination du Maroc et à sa légitimité politico-historique avérée.
Propos recueillis par Mohcine Lourhzal