Le nouveau Coronavirus (Covid-19) a donné une leçon d’hygiène, de civisme et d’humilité à l’humanité. Les Marocains ne sont pas en reste. De nouveaux comportements ont émergé depuis l’apparition de l’épidémie. Mohcine Benzakour, psycho-sociologue nous en dit plus.
«Je ne crois pas qu’après le confinement, les Marocains reprendront leurs vieilles habitudes»
En étant confinés, les Marocains ont acquis de nouveaux réflexes positifs (altruisme, respect des lois, sympathie envers les autorités…). Avec le démarrage de la phase II du déconfinement, ne risque-t-on pas de reprendre nos vieilles mauvaises habitudes?
L’expérience du confinement a été riche d’enseignements et nous a permis de nous refocaliser sur l’essentiel. Les Marocains ont en effet appris de nouvelles habitudes. Penser à l’autre, ne pas sombrer dans l’individualisme, renforcer l’esprit de citoyenneté que certains avaient commencé à perdre. On peut dire que le nouveau Coronavirus a permis le renforcement de l’esprit de citoyenneté au sein de la société marocaine. Pour répondre à votre question, je ne crois pas qu’avec la levée du confinement, les Marocains reprendront leurs vieilles habitudes, notamment en matière de respect de l’autre et de l’ordre public. Le nouveau Coronavirus (Covid-19) a donné une grande leçon à l’humanité. Désormais, on sait preuve à l’appui, que tout peut basculer d’un moment à l’autre et que ce qui permet à une nation de faire la différence, ce n’est pas sa puissance financière ou militaire, mais plutôt le degré de civisme et d’entraide qui y règnent.
Quid de la vie de couple?
Le confinement a donné l’occasion aux couples marocains de se remettre en question. Si certains couples ont bien vécu le fait d’être confinés chez eux, d’autres ont vécu cette période au rythme des conflits et des disputes. Certains maris ont même profité du confinement pour violenter leurs épouses, devant les enfants. Résultat, des séquelles psychologiques souvent irréversibles chez ces enfants qui assistent impuissants à des comportements, pour le moins que l’on puisse dire, inacceptables au Maroc de 2020. D’un autre côté, nombreux sont les couples qui ont profité du confinement pour se rapprocher, s’écouter et se comprendre, pour prendre un nouveau départ.
Les enfants sont ravis de pouvoir renouer avec une vie presque normale après plus de deux mois de confinement….
Les enfants ont été lésés par le confinement. N’étant pas habitués à rester inactifs pendant une si longue période, les enfants ont montré des signes d’anxiété et parfois d’agressivité envers les parents, en raison de leur incapacité à comprendre le bien-fondé de l’instauration par les autorités marocaines, du confinement pour lutter contre la Covid-19. Aujourd’hui, les parents sont appelés à faire preuve de patience envers leur progéniture, tout en leur permettant de sortir, courir et jouer librement. Néanmoins, et c’est valable aussi-bien pour les enfants que les adultes, le respect des mesures de précaution doit se poursuivre. Dans le cas contraire, tout ce que le Maroc a pu réaliser dans sa lutte contre le nouveau Coronavirus, risque de tomber à l’eau.
Quels conseils donneriez-vous aux citoyens, d’un point de vue comportemental, pour faire de la nouvelle phase de levée du confinement, une réussite?
La majorité des citoyens sont aujourd’hui convaincus qu’il est nécessaire de respecter les mesures de précaution et mesures barrières, afin de contenir la propagation de l’épidémie due au nouveau Coronavirus. D’un autre côté, certaines personnes croient que la Covid-19 n’existe plus au Maroc et qu’à partir du 25 juin 2020, on pourra vaquer à nos occupations comme si de rien n’était. Cette conception de la réalité sanitaire au Maroc est complètement fausse. Dans de nombreux pays, l’insouciance de certains fait qu’aujourd’hui de nouvelles vagues de contaminations à la Covid-19 sont enregistrées dans plusieurs pays du monde. Il ne faut pas baisser la garde. Le virus circule toujours parmi-nous. C’est en veillant au respect des mesures et directives des autorités, que nous allons limiter la propagation du virus. Restons vigilants.
Grâce à la Covid-19, le Maroc a ouvert les yeux sur une triste réalité, celle de la précarité de l’emploi, notamment dans le secteur informel. Comment remédier à cette situation qui se répercute négativement sur le moral des travailleurs concernés par cette fragilité professionnelle?
La crise sanitaire due au nouveau Coronavirus a donné lieu à une crise économique et sociale sévère. Un grand nombre de travailleurs dans le secteur informel se sont retrouvés du jour au lendemain, privés de ressources financières. Ceci a été le résultat du non-respect des employeurs des lois en vigueur au Maroc qui encadrent la relation de travail dans le Royaume. Certains employeurs, peu scrupuleux, doivent désormais sérieusement songer à accorder leurs droits sociaux aux personnes qui travaillent sous leur direction. Les autorités gouvernementales doivent également veiller à ce que tout travailleur soit inscrit à la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS). L’expérience de la Covid-19, a montré que l’affiliation à la CNSS n’est pas un luxe, mais une soupape de sécurité qui permet d’amortir les chocs imprévus, liés notamment à l’arrêt de toute activité professionnelle. Pour finir, je dirai que le Maroc de l’après Covid-19, a besoin de la conjugaison des efforts de tous. Chacun de nous doit faire preuve d’honnêteté dans l’exercice de sa mission au sein de la société. Celui qui croit que le Maroc et le monde post-Covid-19 restera inchangé, se trompe. Après cette crise sanitaire, économique et sociale qui a frappé le monde, plus rien ne sera comme avant. Tâchons d’en tirer les bonnes conclusions, notamment en ce qui concerne la place que nous donnons à la science. La Covid-19 a démontré que les mythes et les théories du complot n’ont plus de place dans le monde d’aujourd’hui.
Propos recueillis par Mohcine Lourhzal
La phrase
«Chacun de nous doit faire preuve d’honnêteté dans l’exercice de sa mission au sein de la société»